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Un Génie du Crime en plein paradoxe

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Message  Zorvan Ven 4 Mai - 21:57

- Prenez au moins les lunettes... A quoi bon les laisser au surveillant qui les convoite. Vous ne savez pas. Peut-être que vous serez bien content de pouvoir les troquer en échange de quelque chose dans un autre monde. Murmura le Dévoreur, un sourire énigmatique aux lèvres.

Quel drôle d'oiseau que cet Edgar! Incrédule quand on lui présentait toutes les preuves d'un paradoxe tangible mais prêt à croire aveuglément en son propre pouvoir de réussite. Le voyageur se souvint à temps que cet enfant terrible se riait de tout pour ne pas se vexer de son air amusé à chacune de ses apparitions et plus encore à son exposé. En y réfléchissant, pour tout être sensé et pragmatique, les propos du Dévoreur pouvaient le faire passer pour un illuminé mais il y avait l'incontournable preuve de sa matérialisation dans la cellule close. Peut-être Edgar ne donnait-il à voir qu'une façade dérisoire pour masquer son trouble face à cette évidence. En rire presque plutôt que de s'en montrer déboulonné de ses certitudes. Après tout, peu importait. L'essentiel était qu'il décidait de le suivre et se prêtait au jeu malgré le danger qui était annoncé. Il était vrai que le chef des enfants terribles ne s'était pas fait la réputation de reculer face au danger, même s'il s'exposait rarement directement. Le destin avait dérapé. Il s'était retrouvé en prison. Il aurait pu choisir de se ranger, d'attendre tranquillement d'avoir purgé sa peine, qui s'annonçait lourde certes, mais il avait choisi d'affronter le risque, une fois de plus. S'exposer à un jeu dont il n'était pas maître cette fois. L'homme aux cheveux de neige sourit en pensant que dans l'appellation de l'organisation d'Edgar, le mot " enfant" n'était pas usurpé. Courage ou inconscience ? Ce qui était certain, c'est qu'il allait se lancer dans l'aventure.

Il n'était plus temps de sonder les motivations de son candidat mais il fallait le soumettre au regard de Zorvan. Il s'approcha et le prit par le bras. Les murs de la pièce exiguë se fondirent immédiatement dans un halo lumineux dont la brillance s'étira à l'infini. Sifflement silencieux,furia des images et des sons, mélanges d'odeurs, froid, chaleur, poussière, paillettes de glace. Tout s'effondra sur soi-même dans une membrane tubulaire infinie le long de laquelle ils glissaient en n'osant même pas penser à la vitesse acquise. Pas de frottement pourtant, ni de douleur définissable, juste cette terrible impression que chaque atome de son corps se déplaçait indépendamment de l'autre et la crainte terrible dene pas le voir se réunir à l'arrivée. Ils n'étaient plus des hommes mais de la matière transitant d'un espace à un autre. D'une réalité à une autre. Mais laquelle était la plus vraie ?

Lorsqu'ils heurtèrent la porte de l'Antichambre, elle dut sembler très réelle à Edgar malgré son élasticité coutumière.

- Ne regardez surtout pas en arrière ! Fixez la porte ! Obéissez-lui si vous voulez vivre. Il arrive. N'oubliez pas que je saurais vous retrouver si vous rompez notre accord. Je peux savoir à chaque instant où vous vous trouvez. Bonne chance, Edgar, vous allez en avoir besoin. Dit le Dévoreur en le poussant dans la substance gluante.

**********

Il n'allait pas courir pour aller ouvrir au nouveau. C'était déjà assez pénible de s'extirper du "voyage" qu'il faisait avec le grec pour venir accueillir l'autre tombé du temps. Le Dévoreur le croyait donc corvéable à merci ? Il avait donc dû figer son image sur le bateau pour donner le change à Démétrios puis s'en départir, s'extirper de l'aventure hellène et déambuler le long du couloir interminable jusqu'à la porte qui frémissait. Il attrapa le jeunot à la coupe courte mais hirsute. Comment pouvait-on avoir le cheveu court et en bataille ? Aucune discipline sans doute. Il le jaugea et lut le cas. Ahh, un intrépide. Un hors-la-loi qui avait choisi... Aparadoxis! Le malheureux. On allait s'amuser. Il lui fit signe de le suivre et passa très vite sans s'arrêter devant Blue Hospel et le Champ des Oublis qui s'illuminèrent. A quoi bon montrer à quelqu'un si sûr de ses choix d'autres possibles. Un homme qui était persuadé d'avoir réalisé ses rêves au fur et à mesure qu'ils effleuraient son esprit, un homme qui ne regrettait rien de son passé.

- On veut jouer les filles de l'air, Brighton n'était pas assez classe pour vous ? Après vous, je vous prie.Poursuivit-il en poussant la troisième porte devenue luminescente sur leur passage. Vous voici en Aparadoxis.

Un couloir moquetté qui assourdissait les pas, une porte ouverte sur un bureau cossu dans une tour moderne. Sur la porte une plaque "Dickens & Sons Privates Investigations". Au bureau, un homme d'âge mûr, plutôt bel homme, du genre à plaire aux femmes. La ressemblance était frappante avec Edgar, assez pour ne pas échapper à l'oeil exercé de Zorvan.

- Va dire bonjour à papa! Murmura-t-il à l'intention du voyageur en affichant un air torve.

Aparadoxis frappait fort cette fois, et d'entrée. La partie s'annonçait abrupte pour le nouveau. Le gardien ne put s'empêcher de penser que la réponse de l'univers paradoxal était nécessairement proportionnelle à la remise en question nécessaire. Allait-elle oeuvrer sur Edgar ? La réponse était incertaine même pour Zorvan qui imposait par son esprit l'apparence des lieux en appelant de sa volonté les provocations qui s'affichaient aux yeux du visiteur. Provocateur d'émotions, générateur de réactions, grand juge des volontés et des âmes face à l'imprévisible, il tissait un scénario qu'il adapterait au fil des réactions du nouveau sujet. Ici, dans le même temps qu'il était "ailleurs", à la fois débarquant dans les faubourgs de la byzantine au côté d'un grec en bonnet, à la fois poussant un fils de famille britannique dévoyé vers la révélation de son être profond, à la fois en tellement d'ailleurs, si désuni qu'il n'était pas étonnant qu'il ne sût qui il était lui même, ainsi était Zorvan.

- Je suis là, mais ne compte pas sur moi pour t'aider. Tu es seul face à une autre réalité. Je suis juste ici pour trancher si tu es de la trempe d'un voyageur. Ajouta-t-il en matérialisant dans la poche de celui-ci un outil bien utile pour un jeune chef d'organisation comme Edgar.

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Message  Invité Lun 28 Mai - 21:39

La sensation fut particulièrement étrange et désagréable lorsque les murs de sa cellule se distordirent à l’infini dans toutes les directions. Edgard avait cru naïvement, la faute à ces stéréotypes qui jalonnaient la vie de chacun même lorsqu’on y prenait garde, une ouverture s’ouvriraient dans le mur de sa cellule, dévoilant un couloir, lumineux ou sombre qu’importe, et qu’en l’empruntant ils parviendraient tous deux à l’autre où les menait cet étrange homme aux cheveux de neige. À la place, il avait sentit son corps se désagréger, passant du froid au chaud, de l’état solide à cette espèce de masse d’atomes qui constituaient son corps et que plus rien ne maintenait, à l’exception d’une unique destination. Aucune sensation de mouvement, et pourtant il avait l’impression de se déplacer à une vitesse infinie. Malgré tous ces désagréments, Dicken trouva l’expérience intéressante. Non pas qu’il souhaitait le réaliser tous les jours, mais cela changeait tellement de tout ce qu’il avait pu ressentir. S’il était encore dubitative quant à ce que cet homme lui avait annoncé sur les voyages dans le temps et l’espace, il dû admettre que tout ce qu’il avait entendu était vrai. Cette certitude le traversa de part en part lorsqu’il vit la porte vers laquelle ils fonçaient et le choc de son corps qui s’était reconstitué contre le sien fut pareil au marquage au fer rouge d’une idée. *Tout ceci est vrai. Te voila sur le chemin de la divinité* Des perspectives infinies s’ouvraient à Edgard mais il dû y mettre une pause lorsque l’homme le poussa dans l’étrange substance qui faisait office de mur.

Il sentit des mains le réceptionner et découvrit le visage malicieux d’un homme aux longs cheveux d’ébènes qui encadraient un visage où brillait une intelligence féroce, presque inhumaine. * Est-ce lui qui va me juger ?* Il le détailla un instant, tentant de découvrir dans les traits de son visage des vérités qui lui permettraient de comprendre les règles du jeu dans lequel il s’était engagé, mais il n’eut pas le temps d’approfondir son examen que déjà il lui demandait de le suivre. Ils passèrent devant deux portes similaires à celle qu’il venait d’emprunter et elles s’illuminèrent sur son passage, mais il ne put rien voir à travers la membrane gélatineuse. Peut être s’agissait-il de ces autres possibilités qu’on lui avait présenté plus tôt. Le chef des Enfants Terrible haussa les épaules et continua de suivre l’inconnu, sans poser de questions. Il devait s’agir de Zorvan. Il sentit l’excitation le gagner à l’idée d’affronter cet homme, ou cette créature.

Ils arrivèrent à une troisième porte qui s’illumina elle aussi, mais cette fois il put voir ce qui se cachait derrière : un couloir moquetté, pareils à tous ceux qu’on trouvait dans les buildings des grandes entreprises. Aparadoxis, le monde des paradoxes. Quels paradoxes allaient-ils devoir affronter ? Au bout du couloir découvrirait-il son double en bon chef d’entreprise ? Ou peut être Solange qui l’accueillerait avec un petit sourire… La réalité fut tout autre et Edgard marqua une infime hésitation en contemplant les traits du visage de son père, mais il se reprit très vite et sourit à l’air qu’arborait Zorvan.

- Mon père, vraiment ? Voila quelque chose qui me chamboule littéralement, Zorvan, lui répondit-il.

Edgard gloussa doucement. Il n’avait jamais aimé son père, mais il ne l’avait jamais détesté non plus. Il était assez indifférent à son existence, ainsi que celle de sa mère. Il était son géniteur, voila tout. C’est en partie grâce à lui qu’il devait son intelligence, et c’était grâce à son argent qu’il avait bien vécu, mais les liens qu’ils ressentaient pour lui n’avaient jamais dépassés ces aspects matériels. À leur mort, il avait digéré l’information comme n’importe quelle autre, ni peine, ni joie particulière, peut être de la curiosité pour les détails de l’affaire.
Son père était occupé à consulter un papier, sans doute un contrat mais il finit par remarquer la présence d’Edgard et son visage s’illumina d’un grand sourire. Au même moment, Dicken sentit quelque chose se matérialiser dans sa poche et il en reconnu tout de suite le contour.

- Edy ! Que fais-tu ici ? Je ne savais pas que tu passerais. Ne m’avais tu pas dis que tu avais une conférence à l’Université ?

* Suis-je donc un professeur ? Peut être qu’Aparadoxis modélise ce qui aurait pu être mais qui ne l’a pas été. Après tout, j’ai certainement l’intelligence nécessaire pour en devenir un…*


- Elle a été reportée père, ne me demande pas pourquoi je ne sais pas. Ils ont prétextés un dysfonctionnement du système son, mais tu sais comment sont les administrations des Universités comme celle-ci…

Il avait décidé de jouer le jeu. Que ferais Zorvan en voyant qu’Edgard acceptait toutes les situations qu’on lui présenterait ? Il avait joué de nombreux rôles dans sa vie, jouer celui d’un fils aimant ne le dérangeait pas… mais il y avait cet objet qui s’était matérialisé dans sa poche…

- Puisque tu es là, que dirais tu de déjeuner avec ton vieux père ? Laisse-moi simplement finir de lire ce contrat et je bloque deux heures sur mon emploi du temps pour que nous puissions déjeuner tranquillement.
- J’espérais que tu me dirais ça, Père, c’est même pour cette raison que je te rends cette visite surprise ! Lui répondit Edgard avec un grand sourire.

Son père lui rendit son sourire et se replongea dans son papier. Edgard en profita pour observer les lieux à travers l’immense baie vitrée du bureau. Il se trouvait dans un centre ville surchargé de haut buildings, cependant celui ne lui suffit pas pour déterminer dans quelle ville il se trouvait. Il ne s’agissait certainement pas de New York car il y avait séjourné un certain temps et il aurait reconnu le centre des affaires sans difficultés. Ce ne pouvait également pas être Londres, sa ville natale. Il n’était pas dans le Sud, en témoignait le temps. Peut être une quelconque ville européenne. Il y avait une télévision et Edgard en profita pour l’allumer, coupant au passage le son. Il tomba sur la chaine des informations locales et découvrit où il se trouvait : Bucarest. * Mon père est installé à Bucarest, et je suis professeur dans ce pays ?* C’était étrange et improbable mais Edgard décida de ne pas y prêter plus d’attention que ça, son père avait finis.

- Allons y fiston, j’ai découvert hier un petit restaurant, tu m’en diras des nouvelles.

Les deux Dicken sortirent dans une rue bondée, pareille à celle de n’importe quelle capitale d’un pays riche. Edgard suivit son père qui prit à gauche. Après une dizaine de minutes et quelques rues, ils s’arrêtèrent devant une petite brasserie. Ce n’est qu’à ce moment là qu’Edgard réalisa quelque chose qui l’avait gêné sans qu’il n’en ait conscience : ils parlaient tous anglais. Pas seulement dans l’entreprise de son père, cela existait déjà, mais même les passants dans la rue et les devantures des magasins qui étaient écrites en anglais. Bucarest était elle devenue anglophone dans cette réalité ? Cette différence troubla quelque peu Edgard, même s’il fit mine que cela ne l’affectait pas ; Zorvan n’était visible nulle part mais il devait l’observer. Il était troublé parce que c’était quelque chose qu’il n’avait su prévoir et il sentait qu’il était moins maître de la situation que quelques trente minutes plus tôt, mais il y avait toujours ce qu’il avait dans la poche… était ce le fruit de son désir ou bien de celui de Zorvan ?
Les deux hommes parlèrent de tout et de rien devant leur repas. Edgard apprit de manière détournée qu’il était professeur de Science Economiques. Pourquoi pas. À vrai dire, leur discussion fut plaisante. Son père était une personne intéressante et il était passionné par son travail, mais l’ennui commença à gagner Dicken et il avait envie de jouer lui aussi, de chambouler les règles établies par Zorvan. Si ce dernier comptait le juger, Edgard en ferait de même également.

- Dis-moi Père, que penses-tu de la mort ?
- Pourquoi cette soudaine question Edy ?
- Oh simplement comme ça. Je trouve simplement que c'est une notion intéressante. Après tout cette douce compagne de la vie a interrogé bien du monde depuis que l'homme et homme, peut être même avant.

Edgard ressentait le poids de l'objet dans sa poche, et il aurait bien voulu l'utiliser, par curiosité, mais Zorvan avait dit qu'il ne lui serait d'aucune aide. Mentait il ? Rester coincé dans cette réalité ne l'intéressait pas, aussi fausse soit elle, mais la tentation était forte. * Est ce pour voir si j'en aurais le courage que tu es apparu dans ma poche ?*
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Message  Zorvan Lun 11 Juin - 22:16

Zorvan les observait, les bras croisés, sans se départir de son attitude impassible. Le père et le fils, dans leurs ressemblances et dans leurs différences moins visibles. Il avait lu dans l'âme de ce client cette dureté, cette absence de sentiments à l'égard de ses semblables, à une exception près mais il mesurait à présent la profondeur du gouffre invisible qui séparait Edgard de son père. Le brave homme ne semblait pas en avoir conscience, faisant preuve d'une sincère affection et d'un intérêt naturel pour ce qui faisait la vie de son enfant. Alors que le jeune criminel ne lui opposait qu'une politesse forcée et une amabilité des plus fausses. Comment cet état de fait pouvait-il s'expliquer ? Zorvan n'avait vu aucune cassure, aucun conflit dans l'histoire de cette famille qui pût justifier autant d'indifférence et de froideur dissimulée. Peut-être Edgard avait-il souffert de voir très peu ses parents alors qu'il était tout jeune et croyant qu'ils se désintéressaient de sa vie, avait-il décidé de la prendre en main sans rien attendre de leur part que ce qu'ils lui avaient toujours donné: l'aisance matérielle. Peut-être même avait-il choisi cette voie de la criminalité, extrême et provocante pour leur insuffler un camouflet à titre posthume ? Qui pouvait savoir ? Zorvan le pouvait. Et si ce n'était pas déjà le cas, il se promettait d'y parvenir. Il percerait à jour ce coeur froid et cette âme dure, il le pousserait à réagir.

Edgard jouait à merveille le rôle du fils aimant que lui avait imposé le gardien et s'il en fût déstabilisé, il ne le montra pas, lorsqu'il apprit qu'Aparadoxis avait choisi Bucarest comme théâtre, pas plus qu'il ne cilla en entendant le présentateur du journal exposer les dernières nouvelles au sujet d'un assassinat odieux dont avait été victime un magnat de la haute finance locale. De même, il ne sembla pas remarquer le regard inquiet de son père qui avait levé le nez de son contrat à l'énoncé de la nouvelle. L'homme d'affaire avait regardé son fils comme s'il s'apprêtait à lui parler puis s'était ravisé et levé en faisant un geste de la main comme pour écarter tout onde néfaste de ce moment qu'il voulait partager avec son fils. Zorvan les suivit bien sûr dans l'ascenseur de verre puis lorsqu'ils traversèrent le hall monumental de cet immeuble de société. Ils furent salués au passage par le réceptionniste de garde et le guide de l'Antichambre lui rendit un salut militaire pour la dérision puisqu'il savait ne pas être vu. Entres gardiens, il fallait rester courtois même dans l'invisibilité. Il les suivit lorsqu'ils remontèrent l'avenue en longeant le bâtiment de la chambre de commerce et d'industrie de Bucarest toute de verre et arborant fièrement sa tour transparente. Elle faisait penser à une tour de guet rendant hommage à la vocation première de l'ancienne citadelle. Une tour veillant sur l'empire des affaires locales ...

Il marchait quelques pas derrière eux et fixait les deux silhouettes aux épaules larges malgré une taille élancée, deux silhouettes qui se déplaçaient avec la même aisance dans cette foule de milieu de journée très dense. Une assurance teintée d'arrogance qui n'avait aucun mal à se frayer un chemin parmi les cols blancs qui fourmillaient dans le quartier d'affaires, ralliant frénétiquement leur lieu de restauration habituelle pour s'octroyer une pause bien méritée dans une journée harassante. Pour le gardien, ce n'était pas plus compliqué mais différent. Tous à peu près lui passaient au travers plus ou moins. Il n'y faisait plus attention depuis le temps! Cela ne sembla pas troubler Edgard plus que de mesure non plus. A peine se retourna-t-il une fois pour lui jeter un regard moqueur. Zorvan disparut, un peu vexé et prit l'idée fantaisiste de jouer le chat d'Alice en ne laissant paraître désormais que sa barbichette. Ainsi, dans la charmante brasserie où Monsieur Dicken père avait eu la bonne idée de les mener, le jeune criminel pouvait-il désormais voir un oranger en plastique servant de séparation entre deux tables, arborer une barbichette qui flottait dans l'air. De plus l'arbre soupira pour manifester sa présence lors du repas et parce que la conversation semblait, vue de l'extérieur un simple moment de quiétude entre un père et son fils . Il fallait que cela bouge et Zorvan se concentra en gratouillant de sa main invisible sa pilosité visible qu'il frisa. Comme par magie Edgard ouvrit alors le feu des vraies questions. Il était temps. D'abord un peu décontenancé, monsieur Dicken plissa les yeux et répondit.

- C'est à cause de cette affreuse nouvelle, n'est-ce pas ? Il est vrai que nous sommes peu de choses. Hier encore, je déjeunais avec Piotr Cielescu et j'apprends ce matin en écoutant la radio, qu'il a été assassiné d'horrible manière. Le cinquième en deux mois. Tous des hommes d'affaires qui étaient mes clients. Depuis quelques temps, ils se sentaient menacés. Oui, nous sommes vraiment peu de choses sur cette terre. Ce que je pense de la mort ... Pour en revenir à ta question, je pense qu'elle vient bien assez tôt sans aller la chercher. Et pourtant j'ai choisi un métier dangereux. Peut-être que j'aime l'idée de jouer avec elle.

Le brave homme soupira puis regarda autour de lui d'un air suspicieux.

- Tu n'as pas l'impression qu'on nous surveille ? Depuis que cela a commencé, j'ai l'impression d'être épié! Un comble pour le dirigeant d'un cabinet d'investigations non ?

Peut-être Edgard n'avait-il pas eu le temps d'intégrer ce paramètre inédit et conséquent d'Aparadoxis . Son père n'avait plus exactement le même statut que dans l'autre réalité.

- Tu sais, depuis que le gouvernement roumain a signé ce traité de coopération avec notre pays, les affaire marchent de mieux en mieux pour moi ici. La plupart de mes clients sont des roumains. Aussi, il faut dire qu'avec ces évènements...Mais je dois être extrêmement prudent. Finit-il par dire d'un air conspirateur. En tout cas, je ne regrette vraiment pas d'avoir installé mon siège social ici, outre les avantages fiscaux, cela m'a permis de me rapprocher de toi. Je n'ai jamais compris que tu viennes enseigner dans ce pays, alors que tu aurais pu briguer un poste à Oxford. Ajouta le père d'un air amusé.

Il remplit à nouveau le verre d'Edgard avec cet excellent vin qu'il avait commandé et se pencha vers son fils en murmurant entre ses dents .

- On m'a dit que tu en pinçais pour une certaine Solange, une collègue qui a décidé de faire carrière dans la finance internationale. C'est ennuyeux pour toi mon fils mais je dois te le dire. Tu as une carrière toute tracée et prometteuse comme professeur et je crois qu'elle n'a pas pris la même voie que toi. J'ai appris des choses pas très claires à son sujet. Je ne sais pas ce qu'elle mijote mais la mafia russe voit la concurrence des amis de cette femme d'un très mauvais oeil. C'est peut-être bien lié à ce que nous avons entendu tout à l'heure à la télévision. Tu vois, ta visite tombe bien. Je m'apprêtais à te demander de passer pour qu'on en discute. Il faut bien que cela serve d'avoir un père à la tête d'un réseau de détectives privés. Mais je préfère qu'on continue cette conversation au bureau. Je t'en ai peut-être déjà trop dis ici.

Zorvan sentit l'air se remplir de tension. Il n'était pas possible que Dicken père ne le sentit pas lui-même. Ou alors il était aveuglé par son amour filial.

- Je dois partir pour New-York rejoindre ta mère demain. Je ne sais pas ce qu'elle a préparé mais elle m'a dit d'aller m'acheter des maillots de bain et un gilet de sauvetage. Je crois bien qu'elle a succombé à son rêve d'acheter un voilier. Les femmes nous mènent par le bout du nez mon fils. Il faut toujours veiller à ce qu'elles ne nous mènent pas en bateau. Hahaha.

Déjà, l'homme d'affaires appelait la serveuse pour commander deux cafés et régler l'addition. Le gardien sentit l'excitation monter d'un cran. Comment allait réagir Edgard face à cette situation complètement imprévue ? Zorvan s'efforçait de lire sur le visage de ce jeune homme, cet ennemi public notoire, les pensées qui agitaient en ce moment crucial son cerveau en ébullition mais le faciès d'Edgard demeurait insondable tout comme son regard qui ne semblait pas le moins du monde troublé. C'en était ... troublant. Avait-il déjà pris une résolution ? Ou pensait-il que cela n'était pas nécessaire en Aparadoxis ? Il allait rapidement déchanter.

- Nous pourrions aller marcher un peu dans ce magnifique parc qui a été restauré juste derrière la Chambre de commerce. Qu'en dis-tu ? Proposa Monsieur Dicken en sirotant son digestif offert par la maison.
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Message  Invité Dim 24 Juin - 19:20

Tandis qu’Edgard écoutait son père lui parler de l’affaire relaté quelques temps plus tôt, la barbichette de Zorvan flottait devant ses yeux. Il s’efforça l’ignorer, mais sa présence, pile entre les deux Dicken, devenait énervante. Edgard prit une inspiration mentale et se calma. *Ce n’est pas avec ce genre de petits tours que tu m’auras.* Revenant à la discussion, il prit une mine un brin soucieuse lorsque son père aborda la possibilité d’une surveillance de sa personne.

- J’ai moi aussi cette impression, Père. Maintenant que tu me le dis, j’ai remarqué que j’étais observé depuis quelques temps maintenant. Il vit son père se crisper sur sa chaise, ses craintes soudain confirmées. Un sourire étira les lèvres d’Edgard. Oui père, j’ai remarqué qu’une de mes étudiante m’observe beaucoup, et pas seulement en tant qu’élève. L’Assassin gloussa doucement et il vit son père se détendre, comprenant qu’il avait été victime d’une plaisanterie de son fils. Pour en revenir à ce que tu disais, Père, je dirais que c’est normal. C’est ton métier d’être paranoïaque, alors cela ne m’étonne pas que tu te sentes observé alors qu’il n’y a rien !

Edgard prit une gorgée du délicieux vin. S’il n’avait jamais éprouvé d’affection particulière pour son père, l’ancien chef des Enfants Terribles devait reconnaitre qu’il avait bon goût en matière de spiritueux, plus au moins forts. Edgard songea un instant à la vaste cave bien garnie qu’il avait laissé derrière lui dans sa maison familiale anglaise. Lorsqu’il serait maître de ses nouveaux pouvoirs, il irait y faire un tour afin de récupérer les grands crus qui y étaient gardés. Il l’écouta parlé de son travail, glanant au passage la réponse à sa question sur la langue anglaise parlée en Roumanie. Dans cet univers, ce pays avait signé un traité avec l’Angleterre. Edgard se demanda un instant quelle était la différence dans le passé de ce monde qui avait amené à ce traité.

- Tu sais, Oxford ne mérite pas vraiment sa réputation. Oh, le niveau est excellent, je ne le remets pas en cause, dit il devant la mine surprise de son père, simplement c’est un monde bien trop ancré dans ses traditions. Le poids de l’histoire y est trop lourd là bas pour que puisse se développer une libre pensée. Mon opinion de surprend ? Tu penserais comme moi si tu avais côtoyé ces hommes. Ils ont le souci de l’éducation, je ne peux pas leur retrier ça, mais le savoir qu’ils transmettent ne peut souffrir d’aucun changement. Ici, j’ai devant moi des étudiants curieux, qui ont choisis l’université où je travaille pour ce qu’elle pourra leur apporter, et non pour le prestige de son histoire. C’est gratifiant lorsqu’un étudiant brillant t’amène à te remettre en cause par la pertinence de ses questions. J’apprends autant à leur contact qu’eux au mien.

Son père était captivé. Edgard avait toujours été un bon acteur et il s’était merveilleusement bien glissé dans le rôle de fils aimant et passionné par son travail qu’il jouait en ce moment même. Si Zorvan voulait le voir déstabilisé, incertain quant à la marche à suivre, ce n’était pas avec ce genre de tour que cela fonctionnerait. * Ne me dis pas que tu n’as rien de mieux ?* pensa-t-il en observant la barbichette. Peut être que l’homme était capable de lire ses pensées. Si c’était le cas, il espérait qu’il avait capté son message silencieux. Le reste de leur conversation se serait passé sans problème si son père n’avait abordé le sujet de Solange. Edgard se contracta involontairement et il se força à se détendre. Son père n’avait rien remarqué, ce qui n’était sans doute pas le cas de Zorvan qui ne devait pas le lâcher des yeux une seule seconde. La suite fit monter en lui une rage froide et irrationnelle dont la force et la violence le surpris. Extérieurement, il ne laissait rien paraître du bouillonnement d’émotions qui faisait rage dans son esprit. Le fait que la Solange de ce monde fricote avec le côté sombre de la société ne le gênait pas, c’était le ton de son père, et cette phrase : Tu as une carrière toute tracée et prometteuse comme professeur. Il n’y avait rien de pire qu’une vie parfaitement réglée. Heureusement, son père abandonna rapidement ce sujet sensible et vint à parler de son futur voyage avec sa mère. * La vie sait se montrer ironique*. Ses parents allaient ils mourir dans cet univers comme les siens étaient morts ? Cette question l’amusa un peu. La différence entre les deux mondes allaient elle jusqu’à changer radicalement la vie des protagonistes ? Finalement, son père lui proposa une balade.

- Avec plaisir, Père. La nourriture était très bonne, et je pense qu’une marche me fera du bien.

Les deux hommes sortirent une fois l’adition payée et Edgard suivit son père à travers les rues de la capitale. Ils arrivèrent dans ledit parc. Cette touche de verdure était agréable au milieu du béton et du verre et Edgard apprécia la manière dont il était aménagé. Il s’y dégageait une certaine harmonie. Son père ne dit rien, lui aussi touché par les lieux et Edgard en profita pour porter un regard rétrospectif sur ce qui s’était passé dans le restaurant. L’énoncé de Solange l’avait mis dans un tel état. Il ne se savait pas posséder une telle faiblesse, et inévitablement, Zorvan allait l’utiliser contre lui. Recourant à la logique, il analysa sa réaction et arriva à une réponse. Ce n’était pas le fait que son père est mal parlé de Solange, mais le fait qu’il en ait parlé tout court. Dans son monde, personne ne connaissait son existence, ni l’attachement qu’il avait pour elle et il avait été surpris que son père en parle librement. Intégrant cette information, celle que dans cet univers, les liens entre Solange et lui étaient d’une certaine manière connus, Edgard sentit son armure se reformer. Il accepta cette réalité et savait qu’il pourrait soutenir une discutions sur Solange. La chose serait peut être différente si celle-ci était présente devant lui.

- Pour en revenir à Solange, dit Edgard, brisant le silence qui s’était installé. Qu’entends-tu par cette histoire de mafia russe ? Que sais-tu sur elle qui te pousse à me demander de m’éloigner d’elle ? Tu as toujours était très ouvert d’esprit quant à mes relations, et c’est quelque chose que j’ai toujours apprécié chez toi. Que tu me dis aujourd’hui qu’elle n’est pas une fille pour moi, c’est quelque chose qui me surprend et pas forcément dans le bon sens du terme.

Sa voix était neutre mais sa colère n’était qu’en en partie feinte. Il dut faire l’effort de considérer que la Solange de ce monde n’était pas la sienne, tout comme le personnage qu’il jouait. Il ne devrait pas ressentir de la colère, simplement la feindre.

- Je ne peux pas t’en parler ici, Edy. Même les arbres ont des oreilles. Attendons d’être dans mon bureau. Là bas, je pourrai tout t’expliquer. Parlons d’autre chose, tu veux ? Sur quoi porte la conférence que tu dois donner ?

Edgard dut prendre son mal en patience. Ne sachant rien de ce monde et de son contexte économique et politique, il inventa une réponse qui aurait convenue à n’importe quelle réalité moderne, expliquant qu’il parlait de l’impacte du crédit dans le financement d’une économie sans rentrer dans les détails. Son père sembla satisfait et finalement, après une demi-heure de marche, les deux hommes se dirigèrent vers le siège de l’entreprise de son père. * Détective, toi ! * Il avait du mal à imaginer son père en inspecteur, lui dont il gardait l’image d’un homme d’affaire doué et souvent occupé. Lorsqu’ils furent dans son bureau, il s’assit sur le petit canapé et croisa les jambes.

- Je t’écoute, Père, que sais-tu de Solange ? Ce n’était pas vraiment une question.

Avant même que son père ne parle, Edgard sentit une nouvelle bouffée de colère l’envahir, comme s’il anticipait déjà ce qu’allait dire son père. Il l’étouffa aussi vite qu’elle était venue, mais elle lui rappela l’objet qu’il gardait dans sa poche et qu’il n’avait toujours pas décidé d’utiliser.
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Message  Zorvan Dim 8 Juil - 18:10

La promenade était agréable pour les deux hommes, comme elle pouvait l'être pour tous les citoyens de Bucarest qui étaient venu se ressourcer dans le parc. Zorvan goûtait avec une sorte de nostalgie douloureuse toutes les manifestations de la nature champêtre de ce monde. Encore qu'il ignorât si c'était une fantaisie d'Aparadoxis ou le reflet fidèle de la réalité sur la planète d'où venait Edgard. Là d'où il venait, lui, on envoyait les condamnés purger leur peine sur des planètes "poubelles". C'était une extrême punition pour ceux qui étaient convaincus de haute trahison, aussi était-il presque persuadé que le monde réel de la Terre était une fosse à purin puisqu'on avait voulu l'y envoyer. Sauf qu'on avait ajouté une double peine spéciale. Il avait été projeté dans un artéfact, une copie grotesque de cette petite planète. Zorvan avait accès à certaines bases de données concernant la Terre et ce lorsqu'il prenait connaissance du "parcours" de ses hôtes. Lorsqu'il voyait le passé d'un voyageur, il intégrait nécessairement des connaissances sur son milieu de vie. Il avait rapidement pris conscience de la dégradation irréversible que les hommes infligeaient à leur monde. Il suffisait de comparer la campagne environnante à l'époque du fameux grec au bonnet et celle qui couvrait la planète Terre des souvenirs d'Edgar pour comprendre les ravages. Les contemporains de l'enfant terrible semblaient tenir pour précieux les îlots de verdure qu'ils reconstituaient ou préservaient aux portes de leurs cages de verre alors que dans le même temps ils pillaient sans vergogne les grandes forêts qui servaient d'habitat naturel à certains de leurs congénères. Paradoxe de ces humains ... Une petite partie d'entre eux s'évertuait à réparer les erreurs de la grande majorité. Lui, recréait une autre réalité en s'inspirant des connaissances qu'il avait emmagasinées, en les disposant, les arrangeant de façon à susciter le trouble chez ses visiteurs. Zorvan était très doué pour cela, pour croiser des informations, déduire des hypothèses, construire des probabilités. Un monstre, même parmi les siens, auquel on attribuait le don de prescience et de divination, qu'on avait érigé en prêtre guerrier de son peuple, alors qu'il avait simplement un esprit brillant et terriblement analytique. Chaque être vivant donnait des indices, se dévoilait sans le savoir, au fil de la conversation et de la fréquentation. Zorvan avait simplement toujours su capter et assembler ces indices. Il ne doutait pas de parvenir à le faire concernant Edgar.

Le Dévoreur avait clairement exprimé ses souhaits quant à ce criminel. Directives qui agaçaient d'ailleurs le gardien. Pourquoi vouloir retourner le mal en bien ? L'utiliser à l'état brut n'eût-il pas été plus efficace ? Enfin ... Le savant avait ses raisons pour vouloir tenter une récupération salutaire de cette âme noire. Raisons que Zorvan connaissait fort bien pour les avoir sondées en un temps passé. Pourtant, il était certaines armes qui se révélaient périlleuses à transformer et vous explosaient à la figure. Edgar pouvait bien être de celles-là. Le Dévoreur aimait jouer à des jeux dangereux, ce n'était pas nouveau. Edgar aurait été d'une efficacité redoutable comme simple associé. Il aurait suffi de lui laisser croire qu'il menait le jeu. Mais le Dévoreur n'aimait pas donner même la simple impression qu'il suivait les règles d'un autre. Il était celui qu'on suivait et non celui qui suivait. C'était d'ailleurs un des traits que Zorvan admirait chez cet homme. Le Dévoreur avait ployé l'échine, mis genou à terre dans la boue devant l'adversité mais jamais il n'avait renoncé à suivre son chemin, à mener sa quête. Qu'est-ce qui lui donnait cette force indomptable ? Voilà un des rares secrets que le gardien n'avait pas réussi à percer. Il lui fallait donc retourner Edgar comme une crêpe, à la demande du Dévoreur. Cuistot du grand chef ? Et puis encore quoi ? Il soupira pour la forme. Après tout, la cuisine de l'âme humaine était une sorte de quête alchimique et changer le coeur d'un génie du crime en un ange salvateur valait bien la mutation du plomb en or.

Le guide apprécia le sens de l'improvisation formidable du jeune loup du crime lorsque son père le questionnait sur son travail. Il reconnut là le talent d'un homme qui savait faire feu de tout bois et collecter, lui aussi, les indices qui se trouvaient sur sa route pour échafauder un univers factice. Edgar était habile oui, et c'était sans doute ce qui avait motivé le Dévoreur à l'accueillir parmi les futurs voyageurs. Pourtant le gardien de l'Antichambre fut soulagé quand les deux hommes se décidèrent à regagner les bureaux de verre qui abritaient le siège de Dickens and son investigations. Enfin, on allait entrer dans le vif du sujet.

- Tu sais que je n'étais pas destiné à cette carrière, à l'origine. Je t'ai maintes fois expliqué que je m'étais orienté dans la voie des investigations privées suite à ce qui est arrivé à ta soeur...

Zorvan plissa les yeux, assis sur le fauteuil qui faisait face au sofa où avait pris place le jeune homme. Comment allait -il réagir à ce rebondissement ?

- La police s'est révélée hautement incompétente dans ses recherches lorsqu'elle a disparu... Je sais à quel point son enlèvement t'a bouleversé. Vous étiez ... aussi proches que des jumeaux peuvent l'être et pourtant ... si différents. Tu te souviens comme la vanité, la corruption lui étaient insupportables. Elle partageait notre lucidité au sujet de la bassesse dont l'humanité peut être capable mais contrairement à nous, elle n'arrivait pas à l'accepter.

Dickens père laissa échapper un profond soupir et s'assit dans son fauteuil, derrière son bureau, le visage empreint d'une profonde tristesse.

- Je me souviens de vos conversations animées au sujet de la corruption des marchés, et des multinationales. Tu temporisais toujours. Tu étais le plus posé, mon fils. Nous n'avons pas su voir à quel point sa révolte était profonde et douloureuse. A nos yeux, elle n'était qu'une étudiante idéaliste et enflammée qui se calmerait l'âge venant. Elle s'est engagée dans un activisme, elle s'est tournée vers cette voie parce qu'elle ne trouvait pas le soutien qu'elle cherchait auprès de nous.

L'homme baissa la tête, les épaules voûtées, comme si le poids des années avait soudain brisé son échine.

- Je n'ai pas su voir que son combat la mettait en danger. Je ne l'ai pas prise au sérieux.

Il releva le nez, les yeux brillants de larmes.

- Ta mère va mal . Elle vit dans la peur de te perdre, toi, le seul enfant qui nous reste. L'idée de t'associer à cette société d'investigations ne lui plait guère. Pourtant, j'y vois, moi, au contraire, une façon de te mettre à l'abri et de t'associer à un combat qui doit nécessairement t'être cher. Je crois qu'il est temps de te parler de mes projets à ce sujet.

Disant cela Dickens père extirpa d'un tiroir, qu'il avait ouvert avec une clef, un épais dossier qu'il tendit à Edgar .

- Tout est là. Les preuves que j'ai patiemment collectées. Je voulais, et je veux toujours, savoir ce qui est advenu de ta soeur. J'étais loin de me douter que mes recherches mettraient sur ma route une personne que tu connais fort bien. Pardonne-moi, Edgar, mais j'ai enquêté sur toi , tes fréquentations... Nullement dans le but de régenter ta vie, ohh non ! Je ne veux que te protéger. Je sais donc qui sont tes amis, et qui elle est...

L'homme fixait son fils dans les yeux, les lèvres et le menton tremblotant légèrement.

- Je ne te blâme pas. Tu as été très perturbé par la perte de ta soeur. Je me demande même si tu ne t'es pas rapproché de ces milieux dans l'espoir de trouver sa trace... Edgar, parle-moi ... Unissons nos efforts, et ensemble, sauvons Solange, malgré elle. Bien sûr, son cas est différent de celui de ta soeur. Elles sont même dans des camps opposés. Ajouta-t-il avec un sourire amer. Pourtant, je pense que ton amie, ou dois-je dire ta maîtresse, est elle aussi une victime de ces monstres en quelque sorte. Ils sont si habiles à faire vibrer l'ambition d'une certaine jeunesse. Solange a sans doute des raisons de vouloir s'élever, une revanche à prendre sur sa vie, son passé, ses origines. Mais toi ... toi, tu as toutes les raisons de ne pas la suivre, de prendre l'autre voie.

Zorvan écoutait la longue tirade émue du père, qui ne laissait pas le temps de réagir à son rejeton, en se frisant la barbe. La tension était extrême mais d'une autre nature qu'il y avait quelques heures. Edgar se rembrunissait à vue d'oeil au fur et à mesure des révélations qui lui tombaient sur le dos . Aparadoxis refermait ses griffes sur l'enfant terrible, lui laissant entrevoir ce que vivaient les gens qui se trouvaient de l'autre côté de sa barricade criminelle. Ceux qu'il avait privé d'un fils, d'un frère, d'une soeur. Aparadoxis était cruel en lui projetant au visage ce fantôme d'une jumelle.

- Ta soeur et toi ... Je me suis toujours demandé comment tu ne t'étais pas effondré à sa disparition, comment tu n'avais pas sombré dans la folie. Cette inquiétude s'ajoutait, pour ta mère et moi, au chagrin d'avoir perdu notre fille chérie. Tu as toujours été un enfant si secret, si distant. C'est comme si... tu avais bâti un rempart invisible entre les gens et toi. Entre nous, tes parents, et toi. Seule ta jumelle savait percer la muraille et toucher ton coeur. C'est pour elle seule, que l'Edgar si peu manuel, avait construit ce pigeonnier bancal afin de lui permettre de soigner cet oiseau estropié qu'elle avait recueilli. Tu te souviens ? Sa manie de prendre en pitié tous ces animaux blessés ou malades ? Elle a toujours su révéler la meilleure part de toi.

Le gardien fixait à présent un Edgar dont il ne savait quoi penser. Le garçon avait le teint livide mais il était bien en peine de savoir ce qui s'agitait derrière ce masque de pâleur extrême. Zorvan s'était attendu à ce que le fauve bondisse par dessus le bureau pour faire taire cette avalanche d' émotions dérangeantes. Après tout, il en avait le "pouvoir" et les "moyens" dans sa poche. Le guide pouvait s'imaginer comme cette autre version de sa vie pouvait indisposer le jeune chien fou du crime. Il se trouvait à présent encombré d'une soeur jumelle disparue, qu'il avait aimé à l'extrême. L'homme à la barbichette sourit en songeant à l'avatar qu'avait choisi Aparadoxis pour tenter d'éveiller la bonne part en Edgar. Le mythe du jumeau disparu qui emporte la meilleure part de cette entité, de ce couple qui forme un tout. Vraiment, lui, Zorvan avait induit tout cela dans le monde paradoxal qu'il voulait infliger à son disciple ? Il se trouva remarquable d'inventivité et se sentit pressé de voir comment le jeune homme allait faire face ce déchirement.

Dickens père continuait de parler alors qu'Edgar feuilletait les rapports d'enquête donc certains concernaient Solange et d'autres une jolie brune aux yeux lavande dont la photo était épinglée au dossier. Zorvan se glissa derrière l'épaule du fils et lorgna sur la soeur dont Aparadoxis avait doté le voyou. Joli brin de fille, ma foi. Regrettable que sa destinée fut celle d'une disparue.

- Edgar, si tu aimes Solange, ne la suis pas dans cette voie, ne couvre pas ses exactions mais efforce toi de l'extirper de ce milieu avant qu'il soit trop tard... L'argent et le pouvoir faciles ne le sont qu'un temps mon fils.

Le gardien lisait par dessus l'épaule les lignes d'un scénario qu'il avait lui-même injecté dans cet espace temps. Aparadoxis était la matrice de sa créativité foisonnante et il était toujours curieux de voir ce qu'elle enfantait une fois fécondée par ses idées. En l'occurrence, la dite Solange avait déjà un pedigree impressionnant. Le cursus de la jeune étudiante qui avait fini major de sa promotion , aux côtés d'Edgar d'ailleurs, s'infléchissait depuis deux ans. Deux ans, cela correspondait à peu près à la période à laquelle le jeune loup avait décidé de venir enseigner en Roumanie dans cette dimension. La date d'embauche de Solange chez Meta Corps Inc était surlignée au feutre fluo, tandis que celle d'entrée en fonction d'Edgar à l'université de Bucarest , deux mois plus tard était aussi repérée d'une marque sur son propre dossier.... Zorvan bascula par devant Edgar comme un être plasmatique seul sait le faire et scruta le beau visage juvénile qui découvrait l'épais document que son père avait réuni à son propre sujet. Ce devait être terriblement déstabilisant de découvrir que son géniteur savait jusqu'à sa marque de boxers préférés. Des photos agrémentaient les pages de textes imprimées. On y voyait Edgar aux côtés de la belle Solange, tant dans des soirées mondaines, qu'en boîte ou encore devant des entrepôts, échangeant une mallette avec un grand barbu. Ou encore attablé dans un des plus grands restaurants de la ville avec des hommes de type mongoloïde dont les mains étaient ornées d'énormes bagues. Une autre encore était prise dans ce qui était visiblement un cercle de jeu privé. Sur le bord de la table de jeu, il n'y avait pas que des jetons et des cartes ou des bouteilles. On discernait nettement des revolvers et il n'y avait pas que des marques de ronds de verre sur le vert du tapis. Des traces blanches très évocatrices attestaient que les joueurs n'étaient pas seulement grisés par l'alcool. Solange arborait un décolleté vertigineux qui contrastait avec les habituels tailleurs d'avocate d'affaire qu'elle portait sur les autres photos. Elle semblait complètement déridée et, la tête basculée en arrière, embrassait à pleine bouche le bel Edgar. Ou se faisait embrasser plutôt, lui, ayant posée sur la cuisse de la jeune femme une main possessive.

- Quel beau couple. Tu as l'air mordu. Murmura Zorvan revenu contre le mur, à l'oreille de son sujet.

Il vit une tension manifeste raidir la nuque du jeune homme et sentit qu'il se retenait de se retourner pour un spectre que son père ne pouvait voir. Monsieur Dickens père s'était enfin tu , sans doute pour laisser son fils prendre connaissance des dossiers. Lesquels ne mettaient que trop en avant que la jolie soeur avait vraisemblablement été enlevée par les patrons de la belle Solange. Meta corps était une multinationale qui s'était étendue à tous les pays d'Europe centrale mais aussi à la Chine. Ses activités officielles étaient l'extraction des métaux précieux et leur traitement jusqu'à la commercialisation. En réalité, Dickens père avait accumulé des preuves assez accablantes que ce n'était qu'une activité écran couvrant différents trafics allant des armes, aux métaux dangereux en passant par l'esclavage moderne qu'était le commerce de main d'oeuvre clandestine et la prostitution. La seule chose que cette firme ne marchandait pas était la drogue mais elle traitait avec des "collègues" pour s'en procurer à titre privé. Le constat était sans appel. Surtout le document de synthèse qui présentait Solange comme un des lieutenants du chef de l'organisation dont l'identité demeurait inconnue. Jeune cartel mais qui faisait de l'ombre à son grand frère russe, lequel était en passe d'éliminer tous les associés de son concurrent.

- Je crois que cette vague d'assassinats est le fait de la mafia russe. Tu verras dans le dossier que le cartel auquel appartient ta chérie lui fait grand tort. Je ne porte pas les russes dans mon coeur, surtout ces maffieux, mais je rage que Solange se serve de mon carnet d'adresses pour trouver des associés à son patron, associés qui se font assassiner. Si tu n'es pas sensible à l'aspect moral de ce détournement qu'elle opère en se servant de ton nom, tu conviendras que cela est préjudiciable pour moi de perdre mes clients. Sans parler du fait que ... ta soeur est sans doute encore en vie, entre les mains de Meta Corp, mais j'ai presque réuni assez de preuves démontrant qu'elle a été enlevée par les amis de Solange... Pourquoi ? Eh bien parce que mes clients m'ont demandé d'enquêter sur Meta corps avant de s'associer avec eux. C'est une démarche courante. Bien entendu, cet enlèvement est survenu juste après pour m'obliger à mentir et falsifier mes rapports sur les employeurs de Solange... Refuser ne m'est pas venu à l'esprit un seul instant. Quand il s'agit d'un mince espoir de revoir notre chère petite en vie...

L'homme s'était levé, les poings appuyés sur son bureau et il fixait son fils dans les yeux.

- C'est trop de coïncidences. Elle sait forcément qui a enlevé ... ma fille. Peut-être est -ce même elle qui a suggéré ce moyen de pression pour me faire taire. Elle se sert de toi ! Ouvre les yeux ! Réagis ! Je le ferais, sinon. Je divulguerais ce que je sais à Interpol. Ne m'oblige pas à perdre mes deux enfants. Si elle consent à dire ce qu'elle sait... nous l'aiderons, nous la protégerons.

Il contourna le bureau et vint s'asseoir à coté d'Edgar.

- Tu dois convaincre Solange de jouer avec nous, sinon tu perdras tout, ta soeur, ta famille, et celle que tu aimes. Tu es la seule chance pour nous, pour Solange aussi, de sortir de cette impasse mortifère. Ensuite nous quitterons ce pays, tous ensemble. Nous recommencerons une autre vie ailleurs, en nous serrant les coudes, comme une vraie famille. Solange y a sa place, si elle t'aime vraiment.

Le ton de la conversation avait radicalement changé depuis la fin de matinée qui avait réuni le père et le fils. Zorvan avait les yeux braqués sur Edgar et guettait la moindre de ses réactions à venir. Est-ce que le mur d'impassibilité allait se fissurer ou allait-il monter d'un cran dans l'ignominie ?
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Message  Le Dévoreur de temps Lun 1 Oct - 0:09

RP archivé pour non réponse depuis le Dim 24 Juin 2012 - 19:20 et non réponse au mp de recensement.

Le RP pourra être repris là où il s'est arrêté si tu recrées un compte pour ce personnage.

Bonne continuation à toi.
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