« Ego sum monstrum* »
Samuel est un homme assez grand, pour ne pas dire imposant. Légèrement plus grand que les gens qui le côtoient, donc, il mesure environ un mètre quatre-vingt trois ; du moins, à Paris il mesure cette taille. Car en effet, en France, à cette époque, selon l'endroit où l'on se trouve, le mètre ne fait pas la même longueur. Les mesures n'étaient pas encore universelles. Ses cheveux, noirs comme un nuage annonçant un orage, sont mi-longs et toujours coiffés vers l'arrière. Aîné d'une famille bourgeoise, le grand homme qu'est Samuel s'est toujours vêtu de vêtements que l'on pouvait qualifier de luxueux. Paré de riches bijoux -du moins, ils pouvaient pâlir face aux bijoux que portait la noblesse-, il faisait attention aussi à se soigner lui.
Son visage est doux et, au premier regard, ce que l'on peut se dire, immédiatement, c'est que cet homme ne ferait sans doute pas de mal à une mouche, qu'il est un homme pacifique. Il est relativement maigre lorsqu'on le regarde, ce qui ne fait que conforter les gens dans leur précédente hypothèse de lui ; en réalité, il n'est pas plus maigre que les autres, il est juste plus grand. Son poids est plus réparti que chez quelqu'un d'autre, ce qui donne une impression de... maigreur.
Au début de sa vie, jusqu'à ses vingt ans dirons-nous, son teint était un petit peu pâlot. Son visage était blanc, mais pas blanc comme de la neige ou comme un fantôme ; blanc lumineux, comme un éclair. Quelque chose de flagrant sur ce visage était son manque de confiance. C'en était étrange.
Ses bras et ses jambes ? L'on ne peut pas vraiment les décrire, car il n'y a pas grand chose à dire sur eux. Ses jambes sont d'une taille normale, assez musclées -les restes de ses courses d'entraînements matinales avant la Révolution- tandis que ses bras sont, eux aussi, de taille normal, mais un peu moins bien musclés que ses jambes.
« Sed mutata** »
A l'époque de la Révolution, les bras et les jambes de Samuel se sont musclés. Pourquoi ? Car il s'est battu pour la liberté. Son visage a abandonné son teint blanc pour une teinte plus vivante, plus bronzée. Son visage montrait une plus grande confiance en lui, il cessa de porter des bijoux et des vêtements luxueux pour des tenues plus conventionnelles. Il souriait plus et son visage prenait une apparence plus heureuse que lors d'avant la Révolution. N'était-ce pas une bonne chose ?
« Libertatem, aequalitas, fraternitatis. Hi hallmarks vitae.* »
Samuel est un farouche défenseur de la liberté, de l'égalité et de la fraternité entre les peuples, et en tout premier lieu au sein du peuple Français. Il aime être accompagné de ses frères, de son peuple, et ne refusera jamais la compagnie d'un des siens. Sachant parler, voire même parlant trop parfois, Samuel est ce que l'on peut appeler un « bon orateur » et sait encourager les gens à le suivre. Quand il parle, les personnes l'écoutant sont prêtes à tout laisser et à se mettre derrière lui, peu importe le lieu où il compte les mener. Il est prêt à tuer lorsque cela est nécessaire et n'a pas de remord pour avoir fait cela après.
Il n'est pas du tout dans le genre hautain et se lie facilement d'amitié avec les autres ; à vrai dire, il préfère parler aux gens que les mépriser. Très sociable, sa famille a toujours pensé que le mieux pour lui serait une carrière politique. Sa sociabilité lui vient du fait que jamais sa famille ne s'occupa de lui et qu'il recherche l'affection d'autres personnes pour combler ce manque ; mais ceci lui a aussi enseigné l'autonomie, qui est une de ses grandes qualités. Il est capable de se débrouiller seul, tout du moins plus que certains autres, et n'est pas dans le genre dépendant.
- Les jeunes années -
Samuel naquît en l'an 1774 dans la ville de Paris, la capitale du grand Royaume de France. Né d'un père bourgeois désargenté et d'une mère noble l'ayant aider à appartenir au "Grand Monde" de l'époque, le pauvre petit n'était malheureusement pas réellement aimé par sa famille. Ses deux parents n'étaient mariés que par contrainte, pour l'alliance entre leurs deux familles. Ils ont eux-mêmes décidé de se marier pour augmenter leur puissance respective, car ils étaient incroyablement cupides et assoiffés de pouvoir. Ils avaient couché ensemble pour le plaisir une seule fois dans toute leur vie conjugale, et c'est à cause de cela qu'est né Samuel ; "à cause", car sa vie ne sera pas un modèle de vie parfaite, loin de là. A une époque, son père avait lu et soutenu les philosophes des lumières, il possédait un esprit libéraliste, en devenait presque haineux et haïssait totalement la noblesse ; il vivait dans les petits bourgs où s'entassaient à la pelle les paysans du Royaume et mais sa femme l'avait radicalement changé, et il était devenu un Monarchiste en puissance. Bientôt, il devint riche et dans tout le Comté de Toulouse l'on parlait du jeune Bourgeois devenu noble par on ne sait quelle magie. Mais là, le drame arriva : il eût un fils. Préférant s'occuper d’accroître son pouvoir personnel, s'acoquiner avec les autres nobles et faire de la chasse, il ne s'occupa pour ainsi dire pas du tout de son fils. Sa mère était comme son mari et, finalement, il fut éduqué et élevé par une gouvernante. Le petit Samuel ne connut pas réellement ses parents, qui restaient trop peu de temps à ses côtés et, finalement, il développa une grande autonomie. Ce passage lui apporta autant de qualités que de défauts ; depuis ce triste épisode de sa vie, il cherche une présence familiale forte et recherche constamment l'affection, ce qui peut parfois causer quelque soucis ; mais il en est également ressorti bien plus autonome et aimant. Sa gouvernante lui fit connaître plusieurs personnes de son âge par le biais de goûter organisés dans le château familial et il "grandit" littéralement avec eux, au lieu de grandir avec ses parents ou d'éventuels frères et soeurs. Ses "amis" étaient, bien entendu, des fils de nobles et, bien trop tôt, il fut séparé d'eux. Il ne les revit plus alors qu'il n'était encore que trop jeune. Il ne garda aucun souvenir concret d'eux ni des moments qu'il aura passer à leurs côtés, ce qui est fort dommage...
Le reste de sa jeunesse et ce, jusqu'à l'adolescence, se déroula sur le même modèle. Il avait un précepteur attitré qui lui apprenait à parler, à lire, à écrire, mais aussi à se tenir dans le Grand Monde. Il passait de longues heures à lui enseigner le Latin, cette langue morte mais que tous les nobles se devaient de connaître. Le jeune Samuel l'adorait, il aimait tenir de véritables conversations entièrement en Latin avec son précepteur. Très tôt, il développa un fort caractère patriotique, se traduisant par une envie d'aider les petites gens, le Tiers Etats, composé de paysans. Ses parents en étaient attristés et refusaient qu'il fasse cela, mais qu'y pouvaient-ils ? Ils n'étaient jamais avec lui, ne faisaient jamais rien pour lui. Ils n'avaient aucun réel contrôle sur leur fils, seule la gouvernante en avait un. Mais cette dernière s'acharnait à l'aider à aller dans cette direction plutôt que dans celle de ses parents. Ces derniers tentèrent de découvrir d'où lui viennent ses idées mais ne trouvèrent pas. Ils ne pensèrent même pas que la gouvernante puisse être la cause de tout cela, ayant confiance en elle. Pour tenter de détruire ces idées, d'empêcher Samuel de trahir sa caste sociale, ils entreprirent maintes actions ; le jeune fils, plutôt que de s'y opposer, se plia à leurs désirs mais continua, dans l'ombre, ses actions pour le bien du peuple.
Il passa toute sa jeunesse à Paris, dans la Capitale. Néanmoins, les caisses du Royaume étaient désespérément vides, et le roi n'y faisait rien. Les parents de Samuel, durant les peu de fois où ils étaient là, en parlaient ; oui, ils étaient devenus bien plus influents depuis l'époque de la naissance du petit, et avaient accès à quelques... informations importantes. La richesse de ses parents faisait qu'il avait tout ce qu'il voulait, et c'était d'autant plus vrai lors de son adolescence. Il faisait tout ce qu'il voulait. Et ce qu'il voulait, c'était aider le Tiers Etat. Chaque jour, il allait donc aider ceux qui en avait besoin, jusqu'à l'âge adulte, en parallèle de son enseignement. Un peu avant l'arrivée à l'âge adulte, il se décida à se lancer dans une carrière militaire, alors que ses parents lui destinaient une carrière politique. Cela donna lieu à une véritable dispute entre fils et parents, remportée bien entendu par ces derniers...- La maturation -
Tout démarrait promptement dans une vie comme celle de Samuel. Tout. L'on ne pouvait pas souffler, du moins pas après sa majorité. De l'âge de dix-huit ans jusqu'à l'âge de vingt ans, le jeune Black dût s'adapter au milieu politique auquel sa famille l'avait destiné. Il était obligé de s'y adapter, d'y vivre. Il devait être présent constamment dans le Grand Monde, devait se battre politiquement contre ses "adversaires". Mais cela ne lui plaisait pas. Il aurait préféré une carrière militaire, et de loin. Chaque jour, l'épuisante monotonie. Il se rendait dans un véritable palace, possédant de magnifiques murs blancs, une vaste salle de bal dans laquelle les nombreuses réunions se déroulaient, tous les jours -ou presque- pour parler à des pseudos êtres "supérieurs". Les nobles... Tsss... Durant son temps libre, Samuel se contentait de se battre pour aider le Tiers Etat. Puis tout bascula de nouveau, comme si tout n'était qu'un rêve avec des revirements plus étranges les uns des autres. Comme si la réalité s'abolissait peu à peu, laissant au rêve toute la place qu'il désirait.
Les Etats Généraux furent convoqués par le roi. Cette auguste assemblée allait se réunir pour la première fois depuis cent-cinquante années d'histoire. Ils allaient présenter les problèmes de la nation au garant du peuple Français et allaient l'aider à résoudre le problème du déficit. Samuel allait se présenter. Il voulait devenir un élu, il voulait être présent là-bas. Il voulait représenter... le Tiers Etat. Étrange pour un Noble, et pourtant, il ne fût pas le seul à faire ce genre de chose. De Mirabeau se présenta aussi ; Black le connaissait de vue, mais sans plus. Quelques nobles et éclésiastiques se présentèrent également, et ils furent élus. Samuel faisait parti de ce groupe. Il allait pouvoir aider mieux que durant tout le reste de sa vie le peuple. Et il n'avait que vingt ans.
Il se rendit à Paris le plus vite possible. Là-bas, le roi fit un court discours pour expliquer la situation. Il ne valait pas mieux que les parents du jeune élu. Ensuite, ce fût au tour du Ministre des Finances du Roi, Monsieur Necker, de présenter la situation. Cela avait l'air réellement grave. Les trois ordres se retirèrent pour discuter et tout se déroula bien durant les premiers jours.
Mais si tout se déroulait toujours bien, que serait la vie ? Que serait notre vie si elle ne nous imposait pas des épreuves, si nous ne devions pas nous battre pour obtenir ce que nous désirons ? Les portes furent fermées au Tiers Etat. C'en était trop, trop d'affronts, d'injustice, d'humiliation. Mirabeau entraîna le reste des Députés vers le jeu de paume. Les hommes se dirigeaient d'un pas rapide et pressé vers la salle de jeu, un peu plus loin. Les costumes noirs des représentants voletaient fébrilement dans l'air, accompagnant la douce brise et le mouvement des jambes des hommes les portants. Les grondements des représentants légaux du peuple étaient perceptibles de loin, leur fureur pouvait être ressentie sur des kilomètres. Tous tenaient leurs livres de lois, de revendications, comme s'ils avaient entre leurs mains l'arme de la liberté, de la vengeance. L'étrange cortège fut bientôt rejoint par le peuple lui-même, ceux qui les avait envoyés là. Des hommes et des femmes, tous différents les uns des autres suivirent le groupe de Députés jusqu'au Jeu de Paume. Les bruits de pas sourds des hommes en colère apportait à Samuel un grand bonheur. Enfin, les choses allaient changer. Ils arrivèrent au grand bâtiment, l'investir et firent sortir les joueurs sans autre forme de procès. Ils les emportèrent jusqu'aux vestiaires, le jeune Samuel aida à décrocher le filet et d'autres hommes apportèrent une table. Puis on appela Bailly. Bailly, l'homme de toutes les situations. Il s'approcha lentement de la table, au centre de la pièce. Il regarda tout le monde autour, jeta un regard inquiet à l'assemblée ; puis enfin, il posa son cahier sur la table et monta dessus. Il se prépara à prononcer un discours, qui resterait sans nul doute célèbre dans les années à suivre. Il leva la main et commença à parler. "Faisons le serment, ici et maintenant, de ne jamais nous séparer et de nous rassembler partout où les circonstances l'exigent jusqu'à ce que nous ayons donné à la France une Constitution."
Aux fenêtres, de nombreuses personnes étaient présentes. Le peuple Français avait suivi les Députés. Tous ensembles, élus comme paysans, ils levèrent la main et crièrent "Je le jure". C'était fait. Le premier pas vers la liberté avait été accompli...
Mais quelques heures après, tous furent réunis à Versailles. Le Roi avait à parler. C'est ainsi que dans cette grande pièce, somptueusement décorée, Louis XVI fit un discours.
-Ainsi, je déclare nulle, illégale et inconstitutionnelle les décisions de la prétendue Assemblée Nationale qui s'est réunie malgré mes ordres. Je suis l'unique garant de mon peuple, et si vous m'abandonnez dans une si belle entreprise, c'est vous qui serez abandonnés, et pas moi !
Après ceci, il donna des ordres. Il voulait que tout le monde se sépare. Non, pas cette fois. Tandis que les Nobles et le Clergé obéirent, se levèrent en criant "Vive le Roi" et en quittant la salle, tels des chiots obéissants, dans leurs tenues trop serrées et moches qui plus est, l'Assemblée Nationale nouvellement créée resta dans la salle du trône. Aucun des hommes ne voulait se lever, tous refusaient de se plier à la volonté du Roi. Pourquoi ? Car ils étaient là pour le peuple. C'était le peuple qui les avait envoyés ici, et ils savaient ce qu'ils devaient faire. Bailly se leva alors et se déplaça, assez rapidement, vers l'un des sièges devant le trône. Il s'assit, posa ses mains sur la table et attendit, alors que tous les représentants du Tiers Etat étaient là, devant lui. Ils attendaient que quelque chose se produise, un nouveau coup d'éclat à ces temps troubles. Et cette chose arriva.
Un homme arriva dans la pièce. Il remarqua Bailly et s'avança un peu, avant de remarquer le reste des Députés. Aucun ne sourcilla, sauf Samuel, trop jeune. Il tourna les yeux et regarda le nouveau venu, le détaillant rapidement. Il portait un uniforme bleu et blanc, un chapeau parfaitement ridicule et un sabre au côté. Il se tenait parfaitement droit mais son allure ne lui prêtait pas un charisme exceptionnel, et il ne semblait pas homme à avoir une grande autorité. Il s'approcha du Président de l'Assemblée Nationale et lui demanda qui il était, ainsi que ce qu'il faisait là. Bailly répondit tout à fait honnêtement, ce qui eût pour seul effet d'énerver ce représentant du Roi. De quel droit faisait-il ça ? Ce n'était pas ses airs de soldat borné qui allaient l'aider ! Mirabeau se leva alors et cria qu'ils n'étaient présent ici que par la volonté du peuple et qu'ils n'en sortiraient que par la force des baïonnettes. Samuel se leva alors, accompagné de plusieurs autres Députés, et tous applaudirent. Un tonnerre d'applaudissement résonna et emplit la salle, des "vives Mirabeau !" sortaient de toutes les bouches, et la joie de ne plus devoir être un esclave emplissait le coeur de Samuel. Il pouvait enfin aider le Bas-Peuple et se venger de ses parents...
Mais il y avait toujours un revers à la médaille. Les Députés apprirent bien vite l'arrivée de bataillons étrangers sur le Champ de Mars. Cela constituait un véritable outrage et, déjà, le peuple se battait pour les chasser. "Les Suisses et les Allemands ne sont pas les bienvenus chez nous !" se dit Samuel, à raison. Beaucoup pensaient comme lui, et l'exprimaient plus ou moins violemment dans la Capitale. Le Noble étant devenu élu du peuple n'en pouvait plus. Il s'échappa et se rendit dans les rues de la ville, dans le quartier du Palais Royal. Et ce qu'il vit dépassa toutes ses espérances.
Un homme, du nom de Desmoulins, monta sur une table. Il n'était pas mal habillé, mais ne portait pas de vêtements luxueux. Il était l'un des Députés du Tiers Etat, tout comme Samuel. Ce dernier s'approcha lentement, écoutant son appel. "Citoyens ! Citoyens !" criait-il. Ainsi, tous autour, homme ou femme, pauvre ou bourgeois, se rassemblèrent autour de lui, écoutant ce qu'il avait à dire.
-Le Roi a renvoyé Necker !, cette déclaration fut suivit d'un "hooooo !" de la part de tous. Necker était, depuis toujours, un ami du peuple. Il n'avait jamais eu de mauvaises intentions, et son renvoi allait sans doute déchaîner les foules. C'est le signe ! C'est le signe d'une Saint-Barthélémy pour les Patriotes ! Ce soir même, les bataillons, Suisses et Allemands, sortiront du Champ de Mars... Pour nous égorger ! Nous n'avons qu'une seule ressource : Les arrrmes ! Aux armes ! Aux armes ! Tout Paris doit prendre les armes ! "Aux armes ! Aux armes !" répétez le peuple de Paris. Ils étaient prêts à mourir et à se battre pour leur liberté. Et Samuel aussi. Il s'approcha, les yeux s'illuminant, pour mieux écouter le discours de cet homme, qui allait pouvoir unifier le peuple Français contre le tyran qui ose se déclarer leur ami. Mes amis ! Nous connaissons notre ennemi ! Mais nous devons nous reconnaître entre nous !, il regarda autour de lui et décrocha d'un arbre une cocarde verte. Il avait une idée grandiose. Que tous ceux qui veulent se battre, avec fierté, comme un défi. Mettent cette cocarde verte ! Verte ! Couleur de l'espérance ! Ce sera, notre symbole, notre uniforme, notre victoire !
Le peuple s'embrasa. Tous décrochèrent une cocarde verte et l'accrochèrent à leurs vêtements, quels qu'ils soient. C'était une véritable foule qui s'assemblait désormais autour de Desmoulin. Tout le monde applaudissait, provoquant un brouhaha assourdissant, mais ramenant l'espoir en chacun. Tous pourraient désormais savoir que les choses allaient changer. En bien ou en mal, mais elles allaient changer, et c'est tout ce qui comptait pour eux...
-Regardez ! Le parrain de police est ici ! Oui ! C'est moi qui appelle mes frères à la Liberté ! Mais vous ne m'aurez pas vivant ! Et je saurais mourir glorieusement, plutôt que de voir la France demeurer esclave !
"Ouiiiiii ! Vive la Liberté !" S'écrièrent en coeur les personnes présentes. Le temps de l'espoir était venu.
Samuel se souvenait encore, des années plus tard, de la suite des évènements. La foule en furie avait battu les membres de la police et avait couru à travers la ville jusqu'aux invalides. Tous ceux qui voyaient le spectacle les rejoignaient, y compris moi. Nous étions prêts à mourir pour la Liberté qui nous était si chère et qui paraissait aussi si lointaine. Et, alors que nous déambulions dans les rues de la ville par cette chaude journée de Juillet, les Invalides nous apparurent. Armés de fourches, de marteaux et de haches nous fracassions les vitres et la porte, avant de distribuer des armes à tout le monde. J'en attrapai une au passage, un bon fusil, et le rechargeai. J'avais appris à m'en servir grâce à mon percepteur. Arme à l'épaule, doigt sur la détente et oeil dans la visée.
Nous nous rendîmes ensuite au Club des Cordeliers. Partout dans la Capitale, les réunions étaient sévèrement réprimées et l'armée n'hésitait pas à engager le combat. Dans plusieurs quartiers de la ville, les Hussards Allemands avaient attaqué des paysans, faisant à chaque fois plus de victimes. Danton, un homme très influent, faisait alors un discours, embrasant les foules comme Desmoulin l'avait fait à peine une heure plus tôt. Notre District était prêt à se battre lui aussi, et tous vinrent signer les papiers d'engagements de Danton, moi également. Les fusils étaient aux Invalides, et la poudre ? La poudre, à la Bastille !
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Ils étaient tous rassemblés dans le District, brandissant fourches, fusils, haches et tout ce qui pouvait servir d'armes. Les soldats de la Liberté avançaient vers la Bastille, le fort effrayant la Commune. Samuel se trouvait au centre de cette foule enragée, prête à tout pour conquérir cette Liberté chérie, cette Liberté tant attendue. L'espoir s'est embrasé, et plus rien ne pourra l'éteindre. "La poudre ! La poudre ! La poudre ! La poudre ! La poudre !" criaient les représentants de cet Espoir. Ils allaient l'emporter, car la Liberté combattait avec eux et les soutenait. Samuel frissonnait encore en repensant à la suite des évènements :
Un groupe de personnes, le Comité Permanent de l'Hôtel de Ville, fut autorisé à entrer pour converser avec le Gouverneur. Nous exigions alors le retrait des canons, criant "Enlever les canons !". Mais tout ne se passa pas comme prévu : ils reculaient les canons. Craignant que c'était pour les charger, un homme cria "ILS VONT TIRER !" et la panique saisit tous les hommes du District. Le délégué de ce même District fut prévenu et il entra dans la Bastille. Sur les toits, nous voyions un groupe d'hommes escalader les murs et s'introduire à l'intérieur. Eux pourraient nous ouvrir, au moins.
Là-haut, ils agitaient leurs chapeaux. Ils nous faisaient signe d'entrer ! Mais les gardes des portes ne les ouvrirent pas. Les hommes infiltrés le firent, ouvrirent les portes et abaissèrent le pont-levis. Cela écrasa les jambes d'un de nos hommes, mais nous n'y fîmes pas attention. Nous entrions dans la Bastille, et rien ne nous arrêterait plus. "Yaaaaaaaaaaaaaaah !". La prise de la Bastille débutait aujourd'hui et maintenant. Mais là-haut, sur les murs, les soldats firent feu. Ce fût un réel carnage, un bain de sang. Des dizaines d'hommes et de femmes tombaient autour de moi. L'odeur mélangée de la poudre et du sang me provoquait une nausée étrange, et je sentais que ma tête commençait à tourner. Je fis un pas pour me mettre à couvert, alors qu'une balle atteignit mon compagnon, un homme m'accompagnant depuis le début. Il s'écroula à terre, raide mort. Je pris mon fusil, m'agenouillai aux côtés de plusieurs autres tireurs et nous ripostâmes, ou du moins tentions-nous de le faire. A l'abri, là-haut, ils étaient beaucoup plus invulnérables que nous. J'entendais le bruit grave que provoquait les coups de feu, le sifflement des balles résonnait dans mon oreille. Nous nous faisions massacrer sans pouvoir nous défendre réellement, mais la Liberté nous appelait, et elle nous écoutait. Je commençais à fredonner un air, me donnant du courage. "Ami entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines...". Je ne pouvais toucher aucun homme là-haut et tous s'écroulaient autour de moi. Derrière, de courageuses personnes firent venir des chariots de paille et y mirent le feu, tentant ainsi d'enfoncer la porte. "Ami entends-tu les bruits sourds du pays qu'on enchaîne...". Je m'insérai alors dans l'escorte d'un des chariots, mon fusil à l'épaule, sans cesser de tirer. Mais ils amenèrent les canons...
"Ohé partisans, ouvriers et paysans, c'est l'alarme !". Les canons firent feu. Le massacre fut encore plus grand. Les groupes de combattants de la Liberté volaient, de véritables pans de l'armée des citoyens étaient totalement détruits. Les maisons elles-mêmes étaient prises pour cible. Nous avions perdu. Je lâchai mon fusil et soulevai un blessé. Je n'avais pu me résoudre à le laisser là et, plutôt que de ne penser qu'à ma propre sécurité, je préfère sauver une vie. Raisonnement illogique pour un Noble n'est-ce pas ? Hé bien je ne me sentais plus un Noble. J'étais un homme du peuple, un point c'est tout. Je transportai le blessé jusque sous un chariot, arrachai un bout de ma manche pour panser sa plaie. J'entendis également un bruit de tambour. L'armée...
Ils arrivaient en grande pompe. Plus personne ne savait que faire, pas même Samuel. Tous sortirent de leurs cachettes, le sang sur leurs visages et leurs corps séchant peu à peu. Tous étaient mal en point et, pourtant, aucun ne perdait l'espoir. Et ils avaient raison. Le capitaine de cette compagnie tira son sabre au clair et cria "Vive la nation !" suivit par ses hommes. Ils étaient sauvés.
Les canons furent mis en place. Les gardiens de la Bastille avaient perdu toute combativité, et il fut plus facile encore de mener l'assaut. Les morts, se chiffrant par centaines auparavant, avaient diminuer. La bataille n'était pas réellement perdue. Et ce que tous considéraient comme la fin n'était en fait que le début. Les soldats stoppèrent le Gouverneur, qui désirait faire exploser la poudre, et capitulèrent. La prise de la bastille était achevée...
Qu'arriva-t-il au gouverneur ? Je vais vous le dire : Sa tête fut coupée puis mise sur une pique, et mit au centre d'un bûcher. Les soldats de la Révolution dansaient joyeusement autour de cette même tête.
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Qu'arriva-t-il ensuite ? Un groupe de volontaires forma un corps défensif à Paris et prit le nom de "Garde Nationale". Samuel fut l'un des premiers volontaires et hérita du grade de Capitaine. Ils demandèrent tous à ce que La Fayette devienne leur général et le Roi donna son aval. Le premier corps défensif ouvert aux simples citoyens était créé.
Désormais Garde de la Nation, Samuel fut affecté à la défense du Palais du Roi. Et le Palais fut littéralement "pris d'assaut" par les femmes de Paris, qui réclamaient du pain. Ils n'eurent d'autre choix que de leur ouvrir les portes. Le jeune Black et quelques autres se rendirent ensuite au Club des Cordeliers, n'obéissant réellement qu'à Danton ; il déboula d'ailleurs et déclama un nouveau discours. Le District des Cordeliers se mit en marche pour soutenir les femmes, qui marchaient sur Versailles pour demander au Roi de nourrir son peuple...
*****Une année plus tard****
Tout s'était bien passé. Un semblant de stabilité était revenu en notre Royaume. Le Roi habitait à Paris et la Garde Nationale le protégeait, lui et son habitat, le Palais des Tuileries. Tous les jours, ils gardaient Sa Majesté et son Palais. Chaque jour. La monotonie commençait à s'emparer du coeur de Samuel. Il ne voulait pas cette vie. La vie de Garde Nationale était bien trop lassante pour être celle qu'il voulait. Il désirait quitter ce corps et entama le processus pour un peu avant la fête de la Révolution. Le processus se finit pile pour cette journée, à laquelle il participa. Il avait vécu la Prise de la Bastille, un an plus tôt ; et il était désormais certain que la vue des gens qui travaillent ensembles, comme des amis de toujours, était un bien plus beau spectacle qu'une bataille n'apportant que la mort. C'était le jour après la nuit.
En 1792, Samuel s'engagea dans l'armée Française. La guerre approchait à grand pas. La guerre que Samuel avait toujours rêvé de connaître. Il espérait pouvoir changer le cours des choses par sa seule présence, sans aucun doute. Mais la guerre n'allait pas être une épreuve pour lui. Elle allait beaucoup apprendre à notre jeune héros. En Avril, la guerre commença. Son bataillon fut envoyé à la frontière Belge pour se battre contre les armées Autrichiennes. Immédiatement, la cavalerie de ces dernières lança la charge. Les soldats Français stoppèrent leur progression et se préparèrent à tirer. Arme à l'épaule, oeil dans la visée. "Feuuu !". Le massacre n'était pas dans le camp du jeune Black cette fois, non. Pas un mort. Mais la cavalerie Autrichienne fut réellement décimée. L'un après l'autre, ils tombaient. Les chevaux, les hommes s'effondraient, laissant couler leur sang. Mais ils étaient trop nombreux. Ils arrivèrent bien vite au niveau de l'infanterie ennemie et la Victoire changea de camp. Partout, les hommes tombaient, pourfendus par les épées des soldats ennemis. Samuel parvint à s'enfuir avec quelques hommes. Le bataillon était presque entièrement détruit.
Dans la Capitale, ça jasait de nouveau. Le Roi utilisait son véto continuellement pour stopper la guerre, et les électeurs ne le supportaient pas. Le Roi fut agressé dans son propre Palais par ces mêmes électeurs... Samuel était loin de tout cela désormais. Son rêve s'accomplissait.
L'Assemblée décréta très vite la patrie en danger. Les bataillons Marseillais furent appelés à combattre et Samuel, ainsi que les restes de son bataillon, leur furent assignés. Ils allaient combattre les armées du Duc de Brunswich, le meilleur général Prussien. En chemin, ils rencontrèrent un petit enfant, qui sifflotait une petite chanson. Une chanson très connue, que beaucoup de personnes sifflotaient. Le capitaine de l'unité lui demanda de la chanter et il eût sans doute un déclic. Toute l'armée s'organisa et, sur le sentier qu'ils empruntaient, alors qu'ils n'étaient plus très loin de l'armée ennemie, un étrange chant, mélangé aux sons des instruments, s'éleva dans l'air.« Allons Enfants de la Patrie,
Le jour de Gloire est arrivé !
Contre nous de la tyrannie,
L'étendard sanglant est levé !
L'étendard sanglant est levé !
Entendez-vous dans les campagnes,
Mugir ces féroces soldats ?
Ils viennent jusque dans nos bras,
Egorger nos fils, nos compagnes !
Aux armes citoyens !
Formez vos bataillons !
Marchons, marchons,
Qu'un sang impur ! Abreuve nos sillons !
Aux armes citoyens !
Formez vos bataillons !
Marchons, marchons,
Qu'un sang impur ! Abreuve nos sillons ! »
Alors que le chant touchait à sa fin, l'armée ennemie était en face. Elle avait entendu les Français chanter à la gloire de leur nation et était paniquée. Allaient-ils perdre ? Allaient-ils abandonner ?
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Les Français avaient gagné. Ils avaient remporté la bataille et fêté ceci dignement dans la ville la plus proche. Ils se rendirent ensuite à Paris, pour aider Danton et le peuple à réellement prendre le pouvoir. Leur travail était de prendre les Tuileries. Ils paradèrent dans la ville en chantant la Marseillaise et arrivèrent au lieu qu'ils devaient prendre et tenir. La Garde Nationale trahit le Roi et rejoint alors l'armée. Louis XVI a perdu... Mais ses hommes refusent d'abandonner. Sitôt les portes ouvertes, les soldats de Louis de Capet tirèrent sur les soldats de la République. Un violent combat s'engagea alors entre les Suisses et les Français. Ces derniers, en surnombre, écrasèrent l'ennemi, au prix de nombreuses pertes...
Durant les années à venir, la vie de Samuel se résuma à faire la guerre.- Rupture -
C'était une journée comme les autres pour Samuel. Une journée des plus banale. La guerre faisait rage, la Deuxième Coalition étant créée depuis peu. Le jeune Black était un commandant talentueux de Napoléon Bonaparte. Ils progressaient en Égypte dans la guerre contre les courageux Mamelouks, mais c'était terriblement difficile. L'armée était affaiblie et malade et ne tiendrait sans doute plus très longtemps. C'était même sûr. Elle était condamnée depuis que Napoléon était reparti discrètement vers Paris. Samuel en avait marre de cette guerre. Marre des combats incessants, marre de ce soleil capable de détruire un homme à lui seul, marre de ce sable partout sur des dizaines, sur des centaines de kilomètres ! Une nouvelle fois le soleil, écrasant, implacable, s'était levé. Samuel était déjà éveillé depuis une bonne heure et était assis sur un rocher, attendant le réveil des autres. Il regardait au loin, le regard vide, l'air absent. Ses yeux regardaient le tapis de sable semblant s'étendre sur l'infini mais son esprit voyait plus loin. Beaucoup plus loin. Son esprit voyait l'aventure, sous toutes ses formes. Il rêvait depuis maintenant plusieurs années de vivre l'aventure comme il le souhaitait, de n'avoir aucune contrainte, de visiter tous les lieux ! Il se leva, souriant. Il aimait rêver, cela lui conférait un sentiment de paix intérieure. Il réfléchit un instant et se dit que rien ne pouvait être pire que ce qu'il avait déjà vécu. Rien. Il se convainquit que cette journée ne serait, finalement, ni pire ni meilleure que celles qu'il vivait d'ordinaire dans ce désert sans fin.
Lorsque la trompette résonna pour que tout le monde se réveille, l'on put constater la disparition de quelques hommes. Tous les jours, un ou deux soldats disparaissaient mystérieusement. On avait pensé à des désertions au début, mais des désertions ne seraient pas aussi régulières. C'était réellement étrange. Le général avait lancer des instigations pour découvrir ce qui se passait, mais d'habitude, tout cela passait vraiment par-dessus la tête de Samuel. Il ne pensait qu'à revoir Paris, sa douce Paris. Il se souvenait du temps de la Révolution. L'aventure chaque jour, la guerre pour obtenir sa liberté... C'était ça la vraie vie. Mais là c'était différent. Cette fois, un ami et compagnon de Samuel, qui était avec lui depuis le début de la campagne d’Égypte, avait disparut. En découvrant cette disparition, le commandant s'effondra à terre. A genoux, les mains sur le visage et les larmes commençants à monter jusqu'à ses yeux, il commença à s'intéresser de plus près à ceci.
Quelques jours après, certains réapparurent. Dont l'ami de Samuel. C'était étrange. Comment avaient-ils fait ? Et puis, pourquoi étaient-ils tous à moitiés cinglés, ou au contraire extrêmement joyeux ? Certains d'entre eux étaient complètement fous, ils n'avaient plus aucun repères et ils erraient sans but à travers le camp. D'autres revenaient donner leur démission au général : ils étaient devenus, par on ne sait quel moyen, riches. Très riches même. L'ami de Samuel, lui, était parmi ceux qui apparaissaient complètement déboussolés. Mais il était revenu, et c'est tout ce qui comptait ; le commandant finit par ne plus s'y intéresser du tout. Il aida son ami à revenir « à la normale ».
Ils étaient enfin arrivés dans une ville. Entre temps, de nouvelles disparitions avaient eu lieu. Samuel ne s'en souciait plus. Cela n'était pas ses affaires, il n'avait pas à s'en mêler. Mais dans cette ville, tout était encore plus étrange ; des étrangers étaient présents. Mais pas n'importe quels étrangers : Ils étaient habillés étrangement. Ils parlaient une langue étrange, rarement la même. Ils erraient, sans but ni repère, à travers la ville. Mais qui étaient-ils réellement ? Des fous ? Un peuple de nomades arriérés fraîchement arrivés dans le monde civilisé ? C'était absolument sans importance.
Mais Samuel en avait réellement marre de cette vie. Il était lassé de son quotidien, en avait marre de tout ça et voulait de l'aventure. De la réelle aventure. Il voulait s'amuser, voyager. Il apprit qu'un groupe de ces gens ayant disparu et étant revenu se trouvait dans la ville où son unité stationnait. Ni une, ni deux, il commença à se rapprocher d'eux. Pourquoi ? Pour faire comme eux. Ils s'appelaient entre eux « Voyageurs » et c'était ce qu'il fallait à Samuel. Il se rapprocha de plus en plus d'eux et, finalement, il est devenu une connaissance pour eux. Et l'un d'entre eux, discutant un jour avec lui, lui avait demandé :
-Tu es lassé de ta vie, n'est-ce pas ? Tu la trouves trop monotone, ton quotidien t'ennuie, c'est pour ça que tu cherches à te rapprocher de nous. Je me trompe ?
-Non, c'est bel et bien ça.
L'homme approcha sa tête de l'oreille de Samuel et lui chuchota des indications. Il lui fallait se rendre en dehors de la ville, à la tombée de la nuit. La bas, « Il » viendrait le chercher et l'emmènerait voyager, lui ferait quitter sa vie si monotone. Il s'exécuta et, à la soirée, parvînt à sortir de la ville. Il « L' » attendit. « Il » ne tarderait sans doute pas à venir...