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Abigail Oska Leroy

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Abigail Oska Leroy Empty Abigail Oska Leroy

Message  Invité Ven 1 Aoû - 22:06

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Prénom : Abigail, Oska
Nom : Leroy
Surnom : Abby, ou Daffy
Âge : 21 ans

Epoque et lieu de naissance :
2029, USA, Plateforme de Néo New York.

Physique, Caractère :

Un visage fin, de grands yeux aux couleurs de l’océan, un sourire qui essaye de cacher une profonde blessure. C’est elle, c’est Abigail. Elle est là, plantée sur ses grandes jambes dans l’un de des ses éternels costumes noirs. Comme d’habitude, ses yeux sont trop maquillés, ses lèvres sont trop pâles, ses ongles trop courts. Ses longs cheveux blonds laissent deviner la supercherie d’une couleur au niveau des racines sur son crâne ; brunes. Le vent souffle fort sur son corps si menu, il joue avec elle, avec ses cheveux, la fait tanguer légèrement. Elle a l’air terriblement fragile. Et elle pense.
Elle pense à ce qu’est devenue sa vie depuis quelques jours. A tout ce qu’elle aime, et à ce qu’elle n’aime pas, à tout ce qui fait d’elle Abigail Oska Leroy. Elle réfléchit.
Tout d’abord, ce lapin en peluche. C'était celui de sa soeur, elle le garde précieusement comme une partie de sa mémoire. Elle pense. Dormir. Ça aussi, c’est une chose qu’elle aime. Dormir, des heures durant, des jours parfois, ça la rend heureuse. Elle aime lire aussi, lire pour apprendre les pensées des siècles dans lesquels elle n’a pas vécu. Elle est curieuse, c’est évident. C’est ce qui l’a poussée à s’inscrire dans cette prestigieuse école de Lettres et apprentissage de l’Histoire des Hommes. Dessiner. Peindre. Même si elle n’est pas très douée avec un pinceau. La musique, sa passion depuis toujours. Elle aime autant l’écouter qu’en jouer. Elle a pu, durant son enfance, apprendre les bases du piano, et quelques accords de guitare. Le reste, son talent naturel à jouer, c’est elle qui l’a appris toute seule. Cuisiner. Elle a toujours été douée pour la cuisine. Courir. Elle s’est toujours sentie libre dans ces moments de vitesse, quand le rythme de ses pas s'accorde avec les battements de son coeur. Le vent dans ses cheveux, ses muscles qui forcent, et sentir son cœur qui bat, lourd, puissant, en vie. Et les couchers de soleil. C’est tellement beau, un coucher de soleil.
Elle n’est pas parfaite, elle pense. Elle est têtue, elle l’a toujours été. Elle n’aime pas perdre non plus, et est rancunière. Un peu chiante il faut avouer. Gourmande. Elle n’aime pas danser. Quand on l’y oblige, elle se sent ridicule, elle a honte. Ah oui ; la confiance en soi. Abby ne connaît pas ce sentiment. Ou alors, il y a longtemps, quand elle était encore une petite fille, dans son corps et dans sa tête. Elle est pleine de phobies aussi, trop pour toutes les énumérer. Elle a toujours peur de quelque chose. Elle n’est pas très bavarde, même plutôt sèche. Elle peut sembler infecte au premier abord ; elle n’aime pas les gens. Du coup, elle fait de son mieux pour ne jamais se trouver au milieu de foules. Elle aime boire, peut être un peu trop, surtout du whisky. Parfois, quand elle perd la sensation d’être, d’appartenir à quelque chose de plus grand, elle se fait du mal. En se coupant, ou en se battant. Elle n’a pas peur de se mettre en danger. Certains disent que c’est du courage, elle préfère penser que c’est de l’inconscience. Elle fume. Elle a trois armes à feu chez elle, dont deux dans sa chambre.

Ordre Choisi : Mystiques

Métier exercé dans l’époque d’origine :
Étudiante.

Métier ou fonction après son premier voyage :
A définir, mais certainement un métier lui permettant de s’amuser.

Histoire :

- Les jeunes années -

Extrait d’un documentaire édité en 2028 :
« Suite à la crise de 2011 qui s’est étalée, et a provoqué une sévère baisse du moral de la population ; une importante croissance démographique a été relevée. En cinq ans, les 9 milliards d’êtres humains sur la planète on été dépassés, créant de sévères troubles au niveau du logement et du travail, comme au niveau de l’écologie. Entre 2014 et 2020, les catastrophes naturelles se sont multipliées, les dégâts importants causés particulièrement par les différents tsunamis sur les côtes sud-américaines, africaines, et même européennes. En 2021, une suite de dix-huit vagues d’une envergure variant entre 150 et 1200 mètres de haut manque d’immerger entièrement le Japon. Les hauts dirigeants de tous les pays du monde se réunissent le 4 Octobre 2021, trois semaines après la catastrophe, pour discuter des évènements. Est votée la loi "Green Earth", mettant en place des mesures radicales pour la survie des peuples et de la planète. Deux mois plus tard débutent les travaux un peu partout dans le monde de « plates-formes aériennes » appelées néo-cités, qui sont des extensions habitables des capitales et grandes villes. La plus grande base est celle de Néo New York aux Etats Unis, ayant une capacité de logement de près d’un milliard de personnes. »

Faire-part de naissance :
En ce 07 Février 2029, nous June & Frank Leroy avons l’immense bonheur de vous annoncer la naissance de nos filles Brittany et Abigail.

Frank Leroy, chanteur du groupe Black Toy, qui connaît un succès planétaire fulgurant dès 2016. June Emma Perth, secrétaire principale du président de la République Américaine. Les jumelles Leroy naissent de ce couple improbable dans le grand hôpital de Néo New York. Leur venue au monde est suivie par les médias de très près. Le couple achète un duplex au sommet de la Giant Goose, une tour de deux cent cinquante étages au cœur de la cité suspendue de Néo New York. Le déménagement, lui aussi, est couvert par la presse. Pour leur premier anniversaire, les petites sont entourées de près de deux mille invités. Pour le second, les chiffres doublent. Abigail est une enfant pleine de joie, toujours souriante. Brittany est terriblement curieuse. Les jumelles sont inséparables. Trois ans, leur premier voyage hors de la plate-forme. Elles passent un mois avec leurs parents en Europe, sur les plages de la Méditerranée. Quatre ans. Abigail montre un certain talent pour le piano. Brittany préfère le violon. Cinq ans.

Extrait du New York Times du 08 Février :
«  Un tragique accident est survenu le 08 Février 2034 à trois heures du matin. Le bus qui emmenait la tournée du groupe Black Toy a été percuté par un camion. L’homme qui conduisait s’était endormi au volant et est sorti de la route pour rentrer dans le bus. Ce dernier s’est sur le coup retourné et est tombé dans le ravin qui bordait la route : une chute de près de 200 mètres. Le chanteur Frank Leroy, sa femme et leur fille Brittany, ainsi que Joyce Martin, Eath Johnson et Scott O’Reggan sont morts sur le coup. Par miracle, la petite Abigail Leroy s’en sort presque indemne. L’enfant âgée de cinq ans s’était glissée dans l’une des couchettes fermées du bus, les parois matelassées l’auront protégée. Le chauffeur du camion lui n’a rien. »

Extrait du New York Time du 12 Mars :
« Madame Mary Jenna Audrey Goldstein et Monsieur Christian Goldstein sont désormais les parents légaux de la petite Abigail. Elle est sortie de l’hôpital la nuit dernière avec une jambe dans le plâtre et un bras en écharpe. Ni les parents ni les médecins n’ont voulu nous en dire davantage. »

Deux coups furent frappés à la porte de sa chambre. L’adolescente soupira. Elle ne voulait pas se lever, pas aujourd’hui. Elle avait encore fait cet horrible cauchemar qui l’empêchait de dormir depuis des années. C’était toujours la même chose, le soir de son anniversaire, elle rêvait de l’accident. Elle se souvenait de chaque détail, de sa peur, des cris, du crâne défoncé de sa sœur quand elle était sortie de la boite. Le sang. Du sang partout. Elle se réveillait en sursaut, à chaque fois, le cœur battant, mais cette fois elle n’avait pas pleuré. Cela faisait dix ans jour pour jour qu’elle avait perdu toute sa famille. Elle ouvrit les yeux. Dans son dos, la porte s’ouvrit doucement.
- Abby ?
C’était la voix douce de Mary. Elle était gentille, cette dame. Toujours attentionnée, et très patiente. Mais Abigail n’arrivait pas à oublier sa vraie mère. Chaque jour elle avait l’impression de vivre avec des étrangers. Elle les admirait parfois, d’avoir assez de patience pour s’occuper d’elle. Parce qu’elle leur en faisait voir de toutes les couleurs, elle était insupportable, ingérable, et elle ne souriait plus. Presque plus du tout. Parfois, pour une blague. Mais elle ne riait pas. Elle ne parlait que rarement. Elle ne disait rien de gentil. Oui, les Goldstein étaient vraiment des gens bien.
- Abby ma chérie, tu es réveillée ?
L’intéressée soupira et se redressa péniblement, avant de se tourner vers la dame aux boucles rousses. Elle lui souriait de ses lèvres peintes en rouge, et de ses yeux plus verts que l’herbe en été.
- C’est bien, chérie. Il est tard, on va manger. Tu viens ?
Manger ? Quelle heure était-il? Elle consulta rapidement son réveil. Midi passé de dix – sept minutes. Ils l’avaient laissé dormir. Elle n’aurait donc pas cours aujourd’hui ? Cette idée la mit de bonne humeur, et elle décida que dix ans de silence, c’était la limite de ce que cet adorable couple pouvait supporter.
- Je viens avec vous. déclara – t – elle.
Le sourire de Mary s’agrandit jusqu’à dévoiler ses dents. Abigail savait que la femme devait se sentir fière de « sa fille ». Elle voulut lui sourire. N’y parvint pas.
- Je te laisse t’habiller. On t’attend dans la cuisine.
Et elle referma la porte aussi discrètement qu’elle l’avait ouverte.
Fin prête, la jeune fille se présenta devant ses parents adoptifs qui discutaient à voix basse autour de la table familiale.
- J’suis là. Vous parliez de moi ?
Christian et sa femme relevèrent les yeux de concert.
- Abby, bonjour trésor. fit monsieur Goldstein, Oui, on parlait de toi. On a reçu un appel pour toi ce matin, et on a une surprise.
L’adolescente croisa les bras. Elle était intriguée.
- Un appel pour moi ?
Elle se demandait qui avait bien pu l’appeler. Pas une amie, elle n’en avait que trois qui n’avaient pas son numéro de fixe. Elle faisait l’école à la maison, donc ça ne pouvait pas être un camarade de classe. Elle eut le fol espoir que cet appel concerne son passé.
- Chérie, ton père et moi, on se disait que tu devenais grande, et que peut-être, si tu veux, tu pourrais avoir un endroit à toi, et y rester de temps en temps, quand tu en as marre de la maison…
- On te fait confiance, Abby, on sait que tu es très mature pour ton âge, et c’est pour ça que j’ai… Enfin, que Mary et moi nous sommes mis d’accord.
Un endroit à elle ? Quoi, un appartement ? Sérieux ? Ils allaient lui offrir un appart ? Un semblant de sourire releva les coins de ses lèvres.
- Je comprends pas vraiment …
- C’est l’avocat de tes parents qui nous a appelés.
Le cœur de la jeune fille rata un battement.
- Tu es assez grande pour toucher ton héritage. L’appartement où tu as grandis t’appartient désormais.
- Ainsi que l’argent de ces comptes. ajouta Christian en montrant trois cartes de crédit différentes sur la table.
Le cœur de la jeune fille manquait d’exploser. Elle allait retourner chez elle !

Giant Goose, étage 249. Devant elle, une porte en acier qui lui renvoie le reflet d’une adolescente de quinze ans, vêtue de noir des pieds à la tête. Ses cheveux bruns tombent sans vie sur ses épaules, ses yeux sont cernés. Sa main tremble. Derrière elle, des parents aimants qui l’encouragent.
- Prends ton temps Abby.
La jeune fille glisse la clef dans la serrure. Elle ouvre la porte. Entrer dans un chez-soi que l’on attend depuis dix ans, ça fait une grosse dose d’émotion d’un coup quand même. Tout est propre, tout est rangé. Le ménage a récemment été fait. Elle soupçonne Mary et Chris d’être venus mettre de l’ordre le matin même. C’est trop beau, comme un rêve. Une à une, elle redécouvre les pièces de l’appartement. L’étage aussi, la grande terrasse. Elle en a les larmes aux yeux. Elle regarde l’horizon.
- C’est beau.
- C’est chez toi, ma chérie.
Mary s’approche de sa fille et la prend dans ses bras. Le contact est d’abord bancal, l’adolescente n’aime pas les câlins. Et puis finalement, timidement, elle resserre ses bras autour du cou de la femme qui l’a élevée ces dix dernières années, et elle ressent soudain un profond sentiment de reconnaissance.
- Merci… Maman.
Mary rit et se met à pleurer en même temps. Jamais sa fille ne l’avait appelée maman. Elles se séparent. Et pour la première fois depuis dix ans, Abigail éclate de rire, d’un vrai rire de joie, comme si tout son bonheur s’était caché ici tout ce temps et qu’elle l’avait enfin retrouvé.

Deux ans plus tard, la jeune fille n’avait pas quitté l’appartement. Au contraire, elle avait définitivement emménagé, s’était inscrite dans une école près de chez elle, avait changé de look. Elle était enfin heureuse. Et pour la seconde fois elle fêtait son anniversaire chez elle. Elle avait passé la journée avec Christian et Mary, et se retrouvait enfin seule pour une petite fête en solitaire. Elle sortit une bouteille de champagne, une de whisky, et un saladier de tomates. Son repas préféré en temps de chaleur ! Elle déboucha la bouteille de Dom Pérignon et avala une gorgée à même le goulot. Elle grimaça en reposant la bouteille sur la table. Elle n’aimait pas le champagne. Vraiment pas. Elle attrapa la bouteille de Jack Daniel’s avant de grimper rapidement sur la terrasse. Il faisait clair en cette nuit de février, et inexplicablement chaud. Le temps partait vraiment à vau-l’eau. La jeune fille se laissa tomber lourdement sur un pouf et soupira. Ses cheveux nouvellement teints en blond lui volèrent dans la figure, elle les dégagea rapidement. La lune était cachée par les volets mécaniques de la plate-forme, et seules les étoiles artificielles étaient visibles. Elle soupira. Quand elle observait les plaques de métal qui formaient le « ciel » de la cité, des images vieilles de plusieurs années lui revenaient en mémoire. Elle était toute petite à cette époque. Elle revoyait sa sœur, ses parents, et une plage de galets. Au-dessus, la lune, majestueuse. Elle baissa les yeux, posant la bouteille sur les dalles de la terrasse. Un fulgurant mal de crâne venait de la secouer. Elle serra les dents. C’était étrange d’être aussi mal, elle n’avait pourtant encore rien bu. Elle grogna, se leva à grand peine, et décida de fêter son anniversaire plus tard. Chancelante, elle tituba jusqu’à son lit, et s’y endormit comme une masse.

- La maturation -

« Bulletin d’information 13 octobre 2049. De nouvelles disparitions inexpliquées sur le globe. La police continue d’enquêter. Météo. Il est déconseillé de sortir aujourd’hui aux alentours de New York. Néo New York, la ventilation de la plate-forme sera lancée d’ici midi, en attendant n’oubliez pas votre combinaison thermique pour sortir. Information de l’armée. Les dirigeant se réunissent pour discuter des émeutes qui … »
Abigail tourna le bouton de la radio sur off. Les problèmes mondiaux, elle s’en fichait pas mal. Elle, elle n’avait pas dormi de la nuit. Et pour une fois, sa thèse en préparation n’était pas la fautive. Non, cette fois c’était autre chose. Elle avait passé une nuit épouvantable partagée entre nausées et maux de tête, le tout lui causant des crises de larmes et de spasmes tant elle souffrait. Elle avait aussitôt appelé les Goldstein, mais ces derniers n’avaient pas pu faire grand chose pour la soulager. Ils avaient d’un commun accord décidé de l’emmener chez le médecin dès que possible le lendemain. D’ailleurs, elle allait bientôt devoir quitter son appartement. Elle attrapa une veste, l’enfila. Pour deux pas, elle se passerait de combinaison. Au même moment, on sonna à la porte. Abigail attrapa ses clefs au vol et dévala les escaliers. Direction le grand hôpital.

On lui avait fait passé un scanner. Un scanner bon dieu ! On lui avait dit de ne pas s’inquiéter. Très drôle. Dans les films, c’était toujours mauvais le coup du scanner ! Ses parents étaient morts d’inquiétude, mais sûrement pas autant qu’elle pouvait l’être. Et ce foutu mal de crâne qui la relançait … Elle attendait, assise sur un tabouret inconfortable, bras croisés. Elle n’avait de cesse de se demander à quelle sauce elle allait être mangée. Puis finalement, le "gentil" docteur qui s’était occupé d’elle entra dans la salle d’examen. Abigail se redressa d’un seul coup, faisant tomber le pauvre tabouret.
- Mademoiselle Leroy, vous devriez vous rasseoir.
Il avait dit ça sur un ton qui n’espérait aucune réponse. Un ton qui ne plut pas du tout à Abby. Elle déglutit, resserra la pression de ses doigts sur ses bras.
- Merci, je préfère rester debout. elle lâcha dans un souffle.
- Je me vois dans l’obligation d’insister.
- Je ne veux pas.
Le médecin soupira, mais n’essaya pas de discuter. Il avait un air si grave… Abigail ne le lâchait pas du regard.
- Ecoutez, je ne vais pas tourner autour du pot. Je pense que ça vaut mieux.
- Soyez direct, je suis capable de comprendre.
Il afficha les clichés de son cerveau sur un panneau lumineux.
La blonde frissonna.
- Que vous compreniez je n’en doute pas, j’ai seulement peur que ce soit dur à encaisser, surtout pour une jeune femme de votre âge.
Nouveau frisson.
- Je vous épargne tout le blabla scientifique. Pour la faire courte, vous allez mourir.
L’annonce percuta la jeune fille de plein fouet. Cependant, elle déglutit et hocha la tête dignement, indiquant à son médecin qu’il pouvait continuer.
- Vous avez une forme rare de tumeur sur une partie du cerveau qui gère votre équilibre. Cependant, elle semble étrangement endormie.
- Ce qui veut dire ?
- Ça signifie que vous pouvez aussi bien mourir dans une heure que dans dix ans.
Abigail haussa un sourcil. Ça pour sûr c’était pas commun. Avait suivi tout un tas de recommandations et des listes de médicaments qu'il lui était conseillé de prendre. Et enfin, l’affrontement avec ses parents. Leur annoncer qu’elle était mourante, et que rien ne pourrait prévenir ses derniers instants. Sa mère s’effondra sur le sol en l’apprenant, et se mit à pleurer ; elle pleura tout le long du trajet pour ramener sa fille dans son duplex de Giant Goose, et elle pleurait encore lorsqu’elle referma la porte sur eux.

- Rupture -

Son cerveau avait décidé de se déconnecter. Comme si une seule information ne pouvait être traitée à la fois. Comme si plus rien n’avait véritablement de sens. Dans l’appartement, elle se mit très vite à tourner en rond. Elle ne savait pas quoi faire. Elle montait. Redescendait. Elle étouffait. Lassée de ce décor soudainement trop grand pour elle, elle se saisit d’un vieux sac de toile pourpre, et envisagea de le remplir de tout ce qui lui passait sous la main. Aussitôt, elle fit le tour de l’appartement, fourrant dans le sac qui avait appartenu à sa mère tout ce qui pouvait y entrer. Ses clefs, des livres, une peluche, une fourchette … Un nombre incalculable de choses inutiles qui sur le moment lui semblaient d’une importance capitale. Et finalement, le sac fut plein. Il pesait sur l’épaule d’Abigail, et c’était exactement ce qu’elle voulait. Elle le posa devant la porte, fila à l’étage. D’un geste expert, elle ouvrit la porte coulissante de son dressing et en tira sa combinaison thermique. Le vêtement était tout à fait hideux. Ça ressemblait à une doudoune argentée qui descendait tout le long du corps et ne s’arrêtait qu’à un centimètre du sol. Et évidemment, il y avait la capuche. C’était vraiment ridicule de porter ça, mais elle avait pour but unique de survivre dans n’importe quel climat : en effet, elle permettait de se réchauffer quand il faisait trop froid, et de se refroidir quand il faisait trop chaud. Rapidement, elle l’enfila, remonta la fermeture éclair jusque son menton et se tourna face à son balcon. D’un mouvement saccadé, elle se hissa sur la terrasse, et s’approcha du bord jusqu’à se coller à la barrière de sécurité. Et elle se mit à fixer l’horizon. A penser. Un faible sourire étira ses lèvres trop pâles. Elle resta plantée là, comme ça à penser une heure durant. Elle voulait autre chose. Être quelqu’un d’autre, à une autre époque. Vivre une autre vie. Avoir une autre chance. Elle se le répétait sans cesse, pour oublier qu’en vingt années d’existence elle avait tout perdu, y compris son « Moi » intérieur. Et maintenant, elle allait mourir. Un sanglot menaça de la faire céder, mais elle le ravala, et retourna en trombe à l’intérieur, dévala les marche sans même prendre le temps de refermer la porte fenêtre, attrapa son sac qu’elle passa en bandoulière, et finalement, elle sortit en claquant la porte derrière elle.
Deux cent cinquante étages à descendre c’est long, même en ascenseur. On aurait tout le temps de penser à ses problèmes, à qui on est qu’on ne voudrait pas être … Mais Abby ne pensait pas. En ce moment elle ne pensait plus. Elle savait juste qu’elle étouffait, qu’elle avait besoin de se trouver dehors, dans les rues de Néo New York. De courir. Partir. Loin. Une sonnerie lui indiqua le rez-de-chaussée. Elle sortit du hall comme si elle avait voulu fuir.
Dehors, la chaleur lui brûla la peau. Rapidement, la combinaison fit retomber la chaleur de son corps. Et elle se mit à avancer, sans regarder devant elle. De toutes les manières, par des temps pareils, personne ne sortait pour une ballade. Elle avançait, essayant de ne pas penser, de ne pas réfléchir. Mais il y avait toujours ces mots qui tournaient dans sa tête, sans relâche. Elle voulait autre chose. Être quelqu’un d’autre, à une autre époque. Vivre une autre vie. Avoir une autre chance.

Possessions :
- ses vêtements (Débardeur, pull à poils, leggings, bottes)
- sa combinaison thermique
- le sac de toile de sa mère
- les clefs de son appartement
- deux livres : un de recettes, et Le Petit Prince
- la peluche « lapin » de sa jumelle
- une fourchette
- une petite bouteille Tupperware remplie d’eau
- un Ipod et des écouteurs
- le chargeur de son ordinateur
- une chaussette rouge
- une brosse à dents
- un crayon de khôl
- un feutre vert
- une éponge
- une tasse
- un petit album de photos
- ses trois cartes de crédit
- un porte – feuille
- 138 dollars

Permissions :
Libre : « j’accepte la pnjsation de mon personnage et fait confiance à mes comparses de jeu pour être fidèle à son esprit général. Si jamais quelque chose me choque dans sa pnjsation, je leur signalerais sans rancune par mp et de façon polie et aimable afin qu’ils rectifient. »

Autorisez-vous les autres joueurs à influer sur le jeu de votre personnage via la zone RP Blue Hospel, c'est à dire à vous atteindre par le monde des rêves ? Oui.

Disponibilités in RP : Faut être réaliste QmQ Une à deux fois par semaine. *dépression soudaine*

Espace personnel : -

Décharge responsabilité : « Moi, joueur du compte personnage Abigail Oska Leroy, déclare avoir pris connaissance que ce forum comporte une sous section interdire et cachée aux – 18 ans. J’ai été avertie que son contenu pouvait heurter la sensibilité du jeune public et je n’en demanderai pas l’accès en mentant sur mon âge. Toute infraction avérée sera sanctionnée par la suppression de mon compte. Je prends connaissance de ces conditions en m’inscrivant et les accepte. L’administration du forum ne saurait en être tenue pour responsable. »

Crédits avatar : Avril Lavigne

Crédits signature : -
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Message  Le Dévoreur de temps Dim 3 Aoû - 18:24

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Neo New York, le 3 août 2050

L'homme réajusta sa combinaison thermique d'un geste assuré. Il venait de se matérialiser derrière un pilier en béton armé qui n'avait rien de commun avec celui des blockhaus qu'il avait pu connaître à son époque. Ici, le béton, bien que très dur et résistant, avait une mémoire et se déformait suivant les aléas des tempêtes et canicules pour finalement reprendre sa forme initiale. Cela donnait un aspect très particulier à Neo New York, l'impression d'une ville mirage qui tremblait dans la fournaise. Lorsqu'il avait pris appui d'une main sur la colonne, elle avait absorbé la moiteur de sa paume instantanément. Il avait souri en voyant son empreinte dans le ciment. Trois secondes après le bloc avait repris son aspect lisse. La première fois qu'il était venu dans cette version du futur de New York, Stanzas n'avait pas échappé à la sensation de vertige et une vague nausée l'avait assailli lorsqu'il avait contemplé le New York des origines presque invisible sous la mer dont le niveau avait monté. Staten Island n'était plus qu'un lointain souvenir et les enfants connaissaient la statut de la Liberté sous le nom de "Dame des Eaux". Au niveau "0" où personne sauf les militaires et les scientifiques ne s'aventurait, le moyen de transport le plus sûr restait l'aéroglisseur muni d'un sonar pour détecter les débris immergés. Se baigner n'était pas une option sauf si on voulait en finir avec la vie et canoter guère mieux, sauf si on voulait rejouer le Titanic en version tiny. En revanche dans les niveaux supérieurs on avait l'embarras du choix pour les transports et plus on montait, plus le nombre de transports différents augmentait. Il décida de prendre le tube. L'appel qui lui avait été signalé par un medium voyageur venait des derniers niveaux et le tube pneumatique était le plus rapide quand on était piéton seul. Il entra dans une capsule et demanda le dernier niveau. Ce n'était rien de plus qu'un ascendeur amélioré sur des centaines d'étages mais public et extérieur aux habitations. Lesquelles avaient souvent leurs accès privés aux autres niveaux. Bon sang! Il risquait de la rater !

Il contacta son informateur par l'holoboîtier, une amélioration du téléphone GSM qui ne venait pas de cette époque mais de la préhistoire aralienne. Le professeur l'avait "emprunté" dans une vitrine du bureau de Zorvan. Vol ? Non ! Échange de bons procédés implicites . Après tout, ce fourbe de Zorvan lui avait bien emprunté du matériel génétique sans son autorisation en profitant du fait qu'il s'était assommé durant le transfert d'un haltérophile dépressif qui l'avait sonné contre la porte de l'Antichambre. Encore une fois où Zorvan avait bien failli l'avoir ! S'il était resté longtemps inconscient, et que celui-ci eût réussi à isoler une séquence ADN lui permettant de se rematérialiser, bye bye le Gardien de l'Antichambre et Vladimir savait bien que cette foutue interface temporelle ne rendait rien sans prendre quelque chose à la place. Il aurait été coincé là avec Monsieur Dakota 2013. Non qu'il le trouvât déplaisant malgré sa tendance lunatique , mais il avait fort à faire encore dans les couloirs du temps et ne comptait pas subir le même sort que le malheureux Zorvan. Comme le personnage n'avait pas été spécialement agréable et correct avec lui, il n'éprouvait à son égard qu'une compassion raisonnée. S'il trouvait un moyen de se passer son intermédiaire pour aiguiller les Voyageurs, il serait le premier à tenter de le libérer mais avant que Zorvan ne consente au pacte et se détourne de la mission à laquelle les Gardiens du Temps l'avaient condamné, pour accomplir en sous traitance du travail "au noir " pour Stanzas, ce dernier perdait la moitié de ses transfuges dans des conditions horribles. S'il essayait de les transporter sans préparation du point 0 au point cible, la moitié lâchait avant la fin du transfert, beaucoup trop long sans l'étape "aire zorvanienne". Ils étaient happés par le vortex et disparaissaient disloqués dans la dissociation moléculaire qu'induisait le déplacement supraluminique. Ceux qui arrivaient entiers physiquement n'étaient pas forcément tirés d'affaire. Certains y laissaient la raison. Cela avait été le cas de beaucoup de ces malheureux qu'il avait téléporté en groupe sur le campus de Berkeley en 2011. La plupart avaient fini en hôpital psychiatrique, ne pouvant renoncer à leur période d'origine et persuadés d'avoir perdu la raison.

Ce genre de voyage se préparait plus que tout autre. Quel plus grand dépaysement pouvait-il exister que de voyager dans un autre temps, une autre dimension, le rêve ou l'imaginaire ? On pouvait en avoir parlé, y avoir pensé. Rien ne pouvait nous préparer à s'y confronter vraiment, hormis les petites sessions de simulation de Zorvan dans l'Antichambre. De chambre d'extermination des Voyageurs trop malins, l'Antichambre était devenue un camp d'entrainement secret pour futurs rangers spatio-temporels. Vladmimir Stanzas n'était pas peu fier de cette reconversion dont il était l'instigateur. Zorvan était compliqué, sournois, caractériel, imprévisible, fantasque, parfois hautain. Mais il était brillant. Même dans l'exécution de ses missions à la solde des Maîtres du Temps, il avait dû l'être. Cela faisait frissonner le Professeur lorsqu'il pensait au nombre de victimes que cet exterminateur avait dû faire depuis son emprisonnement dans l'Antichambre, et peut-être même avant, puisqu'il était "Grand Prêtre Guerrier d'Aralia".

Le sombre personnage serait certainement content d'accueillir dans son laboratoire grandeur  nature, une personne venant d'un futur plus évolué que celui de son associé non désiré.

- J'ai capté sa présence au niveau médian. Elle est descendue par un "intra ". Vous allez la rater !


Le visage de l'indic était tendu à l'image. Le Roumain appuya sur le bouton d'arrêt d'urgence et ne prit même pas le temps de réajuster sa capuche avant de s'expulser de la capsule. Dehors l'air était sec, électrique, chargé de poussière ionisée. Il crut suffoquer. Rapidement, il mit son visage à l'abri du rayonnement et chercha sa cible.

- Essayez de faire une géolocalisation. Je suis loin du sujet ?

- Je fais une triangulation, attendez ! ... Ça y est, elle est deux niveaux au dessous du votre et à 500 mètres à l'ouest.

- Elle ? C'est une femme que je dois chercher ? Décrivez là moi...

- 21 ans, blonde et un peu sonnée. Elle vient d'apprendre  qu'elle est condamnée, c'est pour cela que je vous ai contacté malgré le contexte général. Sinon j'aurai attendu. Elle, elle ne peut pas trop attendre... Vous comprenez ?

- Oui mais si la médecine ici ne peut pas la soigner, celle de mon époque ne sera pas une solution.... A moins que ...

- De toute façon, elle a clairement émis le souhait de vivre une autre vie, autre chose ailleurs... si vous ne pouvez l'aider à guérir, au moins vous exaucerez son vœu... Elle se rapproche de vous, mais au niveau juste en dessous !

Après le couloir de circulation piétonnier qui desservait le tube, se présentait un minipont en matière totalement transparente. Plusieurs ponts superposés en fait. Un pour chaque niveau. Il suffisait de lever la tête pour voir les semelles de ceux d'en haut... et le reste. Les jupes à volant avaient depuis longtemps été oubliées. Stanzas se pencha par dessus la balustrade sans se soucier des gens qui le bousculaient par distraction. Il scruta la foule qu'il surplombait. Difficile de discerner quelque chose d'en haut lorsque tout le monde porte un manteau en argent avec une capuche. Il entrevit des mèches blondes et longues qui dépassaient de l'une d'elle. Une chance sur combien que ce soit elle ? Il prit son élan et sauta pardessus la rambarde, un peu gêné par la combinaison,... pour atterrir accroupi, assez souplement mais moins que Thorvald ne l'aurait fait. Les voyages musclaient un homme, nécessairement, mais n'en faisaient pas un chasseur ni un guerrier pour autant.  "J'aurais dû l'envoyer lui " songea Stanzas en imaginant le Varègue dans la cité aérienne. Il penserait certainement être à Asgard. Malgré l'époque dont il était originaire, le Roi de Drogmünd  arrivait toujours à trouver une explication rationnelle ou spirituelle aux nouveautés qui se présentaient à lui.

Stanzas se redressa et fit face à une petite silhouette emmitouflée sans sa combinaison. Elle avançait droit devant lui et ne l'avait pas vu. Il cria , mais peut-être un peu tard :

- Hey! N'avancez plus ! Ne me touchez pas...

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Message  Invité Dim 3 Aoû - 23:27

Ses pas se succédaient, l’un, puis l’autre, puis l’un, et encore l’autre. Elle se débrouillait pour ne pas penser. En fait, à ce moment précis de son existence, Abby sentait que tout autre chose qu’elle – même pouvait être un excellent sujet de conversation. Aussi, elle laissait son esprit vagabonder de – ça de – là et s’accrocher au grès des idées. La chaleur, c’était un bon sujet. Tout le monde s’y accordait d’ailleurs, on en parlait partout, de la chaleur. A la télé. A la radio. Sur les écrans d’information de Néo New York. Partout. Alors pourquoi pas dans sa tête ? Cette chaleur, c’était formidable. Les gens ne faisaient que s’en plaindre, toujours. Il fallait s’en réjouir aussi. Cette chaleur, ça permettait de mettre en marche les appareils hors de prix qu’ils payaient dans leurs impôts. Autant s’en servir, si l’on devait les payer, non ? L’argent. Ça aussi c’était un bon sujet. Quoi qu’Abigail n’ait jamais eu besoins de s’en soucier, elle avait toujours eu la désagréable sensation d’en manquer. Bizarre. Son compte en banque … Non, ses comptes en banque affichaient un minimum de sept chiffres. Alors pourquoi cette idée farfelue ? Personne ne pouvait l’expliquer. De toute façon, à qui cela pouvait – il importer ? Les gens. Un autre excellent sujet, ça, les gens ! Des, gens, elle en connaissait plein. Enfin, connaître c’est un bien grand mot. Elle connaissait ses parents adoptifs. Elle connaissait Shelly, Lizbeth et Ann – Katrin. Elle connaissait vaguement les visages du passé. Mais elle avait vu défilé bien des personnes à de multiples occasions. Les gens, ça l’avait toujours fascinée. Comment ils étaient. Qui il étaient. Maintenant, elle s’en fichait pas mal des gens. Il y en avait trop pour elle, en ce moment, dans les rues. Trop partout. Trop. Elle releva les yeux une seconde, le rebaissa l’instant d’après. Les gens. Elle se souvenait très précisément d’un visage dans son enfance. Celui d’un homme, elle se souvenait d’un sourire tendre, et d’un regard brillant. Son père. C’est étrange comme la mémoire choisis, sélectionne des détails, et comme il peut en effacer d’autres. Elle se souvenait difficilement du visage de sa mère. Elle en gardait une odeur, et une sensation de douceur. De sa sœur, elle n’arrivait qu’à voir le sang ; alors bien sur elle évitait d’y penser. Mais son papa à elle, c’était une chose qui l’apaisait. Frank, elle avait toujours trouvé ce prénom trop dur. Lui qui était si gentil… Elle chassa ses pensées rapidement, sentant des larmes opportunistes pointer. Ailleurs. C’était le meilleur des sujets. Penser à d’autres lieux, à d’autres paysages. A d’autre gens, avec d’autres visages. Elle aimait s’imaginer dans des endroits oubliés, décrits dans les vieux livres qui prenaient la poussière autour de son lit. Elle aurait tant aimé voir l’Italie. Surtout Venise, la Venise qu’elle avait découverte dans tant de grandes œuvres, la ville des secrets, la ville des amours, la ville de tous les possibles. Et l’Angleterre ! Fouler la terre qui avait vu naitre Shakespeare ! Elle adorait Shakespeare. Dickens aussi. Jane Austen, les sœurs Brontë, Lewis Carroll … Tous d’excellents auteurs à ses yeux. Lire. Apprendre. Elle avait toujours aimé ça. Oh, bien sur, elle aurait préféré vivre toutes ces aventures. Toutes ces époques. Mais lire, c’était génial aussi. Elle soupira. Quelqu’un la bouscula. Elle n’y fit pas plus attention. Quelqu’un d’autre encore. Il y avait vraiment trop de gens. Vraiment trop. Mais malgré tout, elle ne voulait pas se résoudre à regarder devant elle. Après tout, que risquait – elle ?

- Hey ! N’avancez plus ! Ne me touchez pas …

Enfin, à part bousculer quelqu’un ? Abby releva la tête. Tout se passa très vite. La voix de l’homme brisant soudainement le fil tumultueux de ses pensées l’avait surprise. Assez pour lui faire perdre l’équilibre. Aussi quand elle releva les yeux, se rendant compte de la collision imminente, elle tenta un pas sur le coté, s’emmêla les jambes et s’étala de tout son long sur le pont de verre glacé. Elle se fit un instant la réflexion que la climatisation de la plateforme commençait à tourner, avant je jurer grossièrement en se redressant de façon assez gauche.

- Non mais vous êtes un grand malade vous !

Abby grogna, toujours à quatre pattes, essayant tant bien que mal de rassembler le contenu de son sac qui s’était vidé sur le sol.

- Vous pouviez pas me contourner au lieu d’me crier dessus comme ça ?

Elle fourra le dernier objet « fugitif » dans son sac avant de se relever, et de se tourner vers le malotru.

- C’est vraiment pas le jour pour m’emm…

Elle se figea. Les lèvres entrouvertes sur un mot, les bras bloqués dans une amorce de geste, elle s’était soudainement statufiée en croisant le regard du possesseur de la voix. Elle ne s’en était pas vraiment rendu compte, en fait, ça avait fonctionné comme un automatisme. Comme un avertissement. Un peu comme un ordinateur aurait bugué, son cerveau avait cessé toute transmission. Encore. Elle restait là, respirant à peine, se souvenant seulement d’un visage qu’elle avait cru ne plus jamais croiser. A vrai dire, ce n’était pas vraiment le même visage. Il manquait cette cicatrice en forme de lune sur la joue, et la tâche de naissance plus foncée à la commissure des lèvres. Ses yeux aussi, ils n’avaient pas la même couleur, mais il y avait cette chose, cette aura qui la figeait sur place comme pour lui dire « c’est pas bien Abby » ! Les petites opportunistes toujours prêtes, quelques larmes vinrent menacer de sortir une fois encore. Je rêve, elle pensait. Non, je ne rêve pas. C’est mieux, je suis folle. Elle aurait presque voulu tendre une main pour caresser la joue de ce revenant – qui n’en était pas un de toute évidence – mais l’avertissement de tout à l’heure résonnait encore en elle. Ne me touchez pas… Finalement, après un instant qui lui avait paru durer des heures, elle bâtit des paupières. Ses lèvres se refermèrent. S’ouvrirent de nouveau. La voix d’Abby sortit cassée, et étonnement aigue, comme aurait pu l’être la voix d’un enfant.

- Papa ?

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Message  Le Dévoreur de temps Ven 15 Aoû - 1:27


Elle était tombée puis s'était relevée et avait prononcé ce mot qu'il tentait d'oublier ou qu'il aurait aimé souhaiter oublier. Et tandis qu'elle se trouvait là à portée de main, si proche qu'il pouvait sentir le souffle de la jeune fille caresser sa joue, il eut envie de répondre "Oui, c'est moi. Je suis venu te chercher".
Loudna. Où pouvait bien se trouver Loudna? Perdue, figée par une chaude journée, dans un charnier de campagne à quelques centaines de kilomètres de Iași. Il gardait toujours le médaillon contre sa peau pour ne pas oublier et de temps en temps, il l'ouvrait pour regarder leur photo. Gala de profil, faisant face à leur fille dans l'autre cadre. Une vielle montre à moitié brisée avec un double médaillon. Elles étaient rares. Stanzas la tenait de son grand père et il avait longtemps laissé les cadres vides, comme s'ils attendaient les "bonnes personnes". Il y avait d'abord eu Gala Draniçu, la seule femme qu'il aima passionnément, puis Loudna, leur fille, née en plein totalitarisme, morte de ses effets à l'âge de quatre ans. On pouvait passer d'un extrême bonheur, presque égoïste -si fort qu'il se croyait sans doute inatteignable- à l'Enfer total. Stanzas avait le regard grave de ceux que cette conscience aigüe a effleuré de sa caresse mortelle. Tout peut basculer dans un battement de cils. Pourquoi n'était-il pas resté avec elles ce jour là au camp de regroupement? Gala avait l'air si fatiguée, si lasse. Mais elle l'avait encouragé à partir acheter ces provisions qui rendraient leur "voyage" plus agréable "jusqu'à un petit village tranquille loin des bombardements" comme leur avait expliqué ce policier. Vladimir avait demandé pourquoi on avait rassemblé tout ce monde dans la gare, puisque le train était déconseillé comme moyen d'évacuation, étant une des premières cibles de l'aviation ennemie. Il s'était peu étonné qu'on ne le fasse pas figurer sur la liste. Il travaillait pour le gouvernement roumain et en collaboration avec les Allemands. Il devait rester sur place pour achever son travail et aussi un autre qu'il menait secrètement et il était tellement obnubilé par l'objectif: trouver une porte de sortie à tous ceux qui seraient broyés par ce conflit, qu'il n'avait pas vu le piège terrible se refermer sur les siens. Gala était juive, certes, mais à Iași, tout le monde se connaissait. Tout le monde parlait avec tout le monde. On se rendait des services, on se dépannait pour améliorer le quotidien. Rien ne pouvait le préparer à l'horreur qui allait suivre.

Les civils étaient rassemblés pour être évacués "à la campagne" car des "bombardements" étaient attendus depuis que des largages de parachutistes russes avaient été repérés autour de la petite ville la semaine précédente. Stanzas trouvait incohérent que les Russes bombardent un secteur après y avoir parachuté des hommes à eux mais on lui avait répondu qu'ils n'étaient que des espions envoyés en repérage, des "sacrifiés". Ce qu'il ne pouvait savoir c'est que si la majorité de la population se trouvait rassemblée, seuls les civils juifs seraient embarqués dans les trains ou massacrés sur place. L'autre partie devenant bourreau. Il était donc passé au travail sans se douter, pour informer son directeur de laboratoire qu'il aurait un peu de retard car il devait aller faire des courses pour le "voyage à la campagne" de sa famille. Il avait tout de même éprouvé une angoisse étouffante en serrant Gala contre lui et en embrassant Loudna. Il s'était retourné trois fois avant de disparaitre de cette salle d'attente qui sentait l'urine. Il aurait dû se sentir soulagé de les savoir bientôt en plus grande sécurité, loin de la ligne du conflit, mais il n'en était rien et il aurait été incapable de dire pourquoi. Ce fût aussi un étrange concours de circonstances qui le condamna à arriver trop tard, ou peut-être une machination orchestrée de toutes pièces. Son chef de labo, Hans Pritzel, voulait reprendre avec lui quelques points de son dernier rapport concernant l'avancée de ses travaux, et il avait dû obéir bien que trépignant intérieurement. Quand il avait enfin pu se libérer, il avait voulu se rendre dans les magasins habituels pour y faire quelques achats, mais un désordre indescriptible régnait en ville. Il remarqua tout d'abord les croix blanches sur certaines maisons, puis les pillages dont étaient l'objet celles qui n'étaient pas marquées. La police était présente dans les rues mais ne réagissait pas, pire, elle en faisait sortir les occupants et les forçait à monter dans des camions. L'angoisse s'était transformée en un étau qui lui serrait le cœur. Il demanda à son ordonnance, un soldat qui lui servait de chauffeur, de le conduire dans le quartier où ils vivaient et le spectacle qu'il eut sous les yeux se grava à jamais dans son esprit. Certains de ses voisins s'en prenaient à d'autres qui habitaient à deux pas de portes. Des femmes en tiraient d'autres par les cheveux, les trainant sur le trottoir, des hommes rouaient de coups de pieds et de poings d'autres hommes avec lesquels ils avaient naguère partagé un thé ou une partie de cartes, certains jetaient mêmes des briques trouvées sur un chantier. L'une d'elles traversa la vitre arrière de la voiture. Vladimir sût qu'il ne pouvait plus rien tenter pour ces gens mais il devait savoir si sa famille avait pu s'éloigner de ce chaos. Il hurla au chauffeur de rouler en direction de la gare le plus vite possible. Il trouva des salles d'attentes désertes, des quais jonchés de vêtements et de cadavres. Son enfer commença ce jour-là véritablement. Il dût regarder chacun d'entre eux afin de trouver les siens. A chaque visage inconnu, il éprouvait un sentiment de soulagement mêlé de honte et d'horreur. Gala et Loudna n'étaient pas parmi eux... Mais elles n'étaient plus là.

Après la fin de la guerre, en 1946, les Tribunalele Poporului entreprirent un procès pour juger les responsables de ce massacre. Il ne permit pas à Stanzas d'apprendre où se trouvaient leur corps mais quelle avait été leur mort. Pour la première fois, il vit leur nom figurer sur la liste des victimes. Il ne pleura pas, ne demanda pas que la justice de son pays soit plus sévère, il retourna juste dans le laboratoire que l'état lui avait généreusement octroyé et s'y enferma pour travailler d'arrache-pied. Il demanda un visa pour les Etats-Unis, qui lui fut refusé par la Roumanie. Il disparut un soir d'avril de l'année 1948. A ce jour, la justice roumaine avait classé l'affaire dans les disparitions inexpliquées mais la thèse officieuse était qu'il était passé à l'ouest comme en témoignait l'existence de ce brillant physicien d'origine étrangère, né selon l'état civil américain en 1979, Radu Stanzas, très probablement son petit-fils. D'ailleurs, le fait que celui-ci ait disparu à son tour pouvait laisser supposer qu'il avait été enlevé par une puissance étrangère intéressée par ses travaux. Ces rumeurs faisaient sourire Stanzas mais l'arrangeaient bien. Au moins ceux qui les répandaient, gouvernement américain ou roumain, étaient-ils loin, pour le moment, de la vérité.

Il se secoua et revint à la fille, une jolie blonde au regard perdu. La puissance des mots, la détresse d'une voix. Qu'était-ce au juste, qui l'avait plongé dans un tel état de transe ?  Un simple mot, oui, pouvait le ramener des plus de soixante-dix ans en arrière. Il déglutit, cligna des yeux pour laisser glisser les larmes qui les piquaient et murmura en secouant la tête négativement.

- Je ne voulais pas vous éviter... Je vous cherchais Abigail. Mais je ne peux pas vous toucher. Désolé pour la chute. Vous ne vous êtes pas fait mal ? Heureusement que la combinaison a amorti le choc. Je dois vous parler, c'est urgent. Pourrions-nous trouver un endroit tranquille ? Le temps nous est compté à tous deux. Je sais peu de choses de vous, mais je sais que rien ne vous retient ici. J'ai connu ce genre de situation et je peux vous faire une proposition. Je ne vous promets pas de guérison. Ce sera à vous d'en trouver la voie si elle existe ... Je vous promets de vivre autrement ... votre vie.
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Message  Invité Ven 15 Aoû - 3:04

Il n’avait pas réagit tout de suite. En fait, Abigail aurait juré voir quelque chose quitter son corps, comme s’il avait disparu un moment. Mais d’ailleurs, elle – même n’avait pas dû être tout à fait là, sur ce pont, à ce moment là. Elle s’était envolée elle aussi, dans un futur qui aurait du être le sien. Elle imaginait l’appartement de Giant Goose complètement sans dessus – dessous, avec une grande blonde allongée sur le sol, riant, deux jeunes filles se chamaillant pour un morceau de cake, et un grand bonhomme en combinaison argentée les regardant, bras croisés. Elle savait que l’homme en face d’elle n’était pas son père. Mais pour une raison qu’elle ne pouvait s’expliquer, les rares souvenirs du visage de Frank s’étaient transformés, modifiés légèrement, assez pour que la seule chose qu’elle ne vit désormais fût cet homme. Il y avait eu dans son regard l’espace d’une seconde la tendresse que seul un père peut avoir, et puis il avait disparu vers un ailleurs qui lui était propre. Un passé ou un possible futur où Abby aurait voulu le suivre. Elle avait soudainement eu la violente envie de tout savoir sur lui, sur qui il avait été, et qui il allait devenir. Elle avait envie de se voir prendre soins de lui, de rire des mêmes choses que lui, de pleurer aussi quand il le fallait. Elle avait envie de l’appeler « papa ». Elle se mit alors à l’observer. A le regarder mieux encore que la seconde d’avant, se demandant quelles pouvaient bien être ses pensées. Les gens qui passaient observaient le duo d’un œil curieux, puis s’en détachaient et oubliaient. Car qu’y avait – il à retenir de cette scène faussement théâtrale, perdue dans le labyrinthe qu’était Néo New York ? Pour les passants, rien du tout. Pour Abigail, chaque détail comptait. Elle pressentait qu’il était temps d’enclencher son magnétoscope mental, et de surtout toujours se souvenir de ce moment. Elle reprit conscience peu avant lui, en voyant une larme s’échapper de son œil. Elle lutta contre l’envie de chasser l’importune du pouce comme elle avait déjà pu le faire avec sa sœur. Elle se surpris à penser « mon papa pleure, c’est de ma faute ». Il revint à lui aussi subitement qu’il s’était envolé, et semblant oublier les instants de silence, il se mit à lui parler. Quand il prononça son prénom, elle eu un frisson. Ça sonnait faut. Aussi grande qu’ai pu être la ressemblance, il n’avait pas la même voix. Il demanda si elle s’était blessée, elle fit « non » de la tête. Au fond, elle fut tenter de répondre « blessée au cœur, ça compte ? » ; bien entendu, elle n’en fit rien. Au lieu de ça elle écouta encore. Il demanda à lui parler en privé. Il parla d’une proposition, de guérison, et d’une autre vie. C’est tout ce dont elle avait besoin. La réponse a ses prières. Il avait dit « je vous promet ». Un autre souvenir de son passé choisi ce moment pour refaire surface.

Abigail était assise sur les genoux de sa mère, un peu effrayée à cause d’un cauchemar qui venait de l’éveiller. Pendant qu’elle lui caressait les cheveux, son père tentait de la calmer.

- Tout va bien, il avait dit, nous sommes tous là.

Abby avait acquiescé.

- Tu devrais aller jouer avec ta sœur, il avait ajouté.

Abby avait encore acquiescé.

- Je te promets que tout ira bien.

Une heure après, un camion les percutait. Il avait menti.

Et peut être que l’homme devant elle mentait, lui aussi. En fait, il devenait évident qu’il mentait. Comment aurait – il pu l’aider de toute façon ? Qu’aurait – il pu faire pour elle ? Rien. Il ne pouvait rien. Elle le savait, ce n’était pas si grave. Elle allait mourir. Il fallait bien que ça arrive un jour où l’autre. Alors pourquoi lui, pourquoi ce sale type venait s’immiscer dans sa vie. Ou plutôt dans sa mort, dans le cas présent, et puis dans tout les cas, ce n’était plus le moment des promesses. La jeune femme eue envie de lui cracher à la figure qu’il avait quinze ans de retard sur sa promesse, mais avant que le venin ne monte à ses crocs, la terrible vérité s’imposa à elle. Cet homme n’était en aucun cas Frank Leroy. Il n’était pas son père. Et toute cette scène lui sembla soudainement au delà de l’étrange, bien plus haut. Tout cela était malsain. Comment pouvait – il la connaître ? Comment il savait pour sa maladie ? Soit ce type était un malade, soit c’était un magicien. Hors il y avait longtemps que la magie ne faisait plus partie du monde d’Abby. Elle s’asséna une gifle mentale. Comment avait – elle pu un instant confondre cet illustre inconnu avec son père ? Elle devait vraiment être mal pour avoir besoins de s’inventer des retrouvailles. Alors qu’il lui semblait que son cœur rétrécissait dans sa poitrine, Abigail serra les mâchoires et fit deux pas assurés en arrière.

- Foutez moi la paix. Je sais pas d’où vous me connaissez, mais sachez que c’est hyper flippant, et que j’hésiterais pas à vous envoyer en taule si je vous vois rôder autour de chez moi !

Elle douta cependant que l’homme sache réellement où elle habitait. Elle tourna les talons, mais une voix en elle qui lui hurlait « tu te trompes » l’empêcha de faire un pas de plus.
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Message  Le Dévoreur de temps Ven 22 Aoû - 23:43

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Elle avait réagi de façon logique et saine, elle l'avait pris pour un dingue. A bien y réfléchir elle n'avait sans doute pas tort. La situation était pour le moins dingue. Elle tournait déjà les talons et allait disparaitre dans la foule qui traversait le pont.

Il haussa les épaules et la regarda s'éloigner, hésiter, avec un petit sourire désabusé.

- Chiche, faites-le ! Dégainez votre digiphone et appelez les Sentinelles. Ils m'embarqueront et me mettront dans une de leur cage en verre et à peine auront-ils tourné le dos qu'elle sera vide.

Il s'appuya le dos à la rambarde. Finalement il avait quand même un peu le vertige à force de sauter des repas. Elle n'avait pas l'air très fraîche non plus. Il tenta un ultime:

- Depuis combien d'heures n'avez-vous pas avalé un vrai repas ? Et si nous allions manger quelque chose dans un bar ?  Ok,vous avez raison, je suis flippant et encore, vous ne m'avez pas vu au mieux de ma forme. Mais je dois absolument vous parler. Si on va manger un bout dans ce resto là-bas, en bas, vous accepterez de m'écouter ? Je ne vais tout de même pas vous agresser au milieu de centaines de personnes ?

Il leva les mains vers le ciel comme pour le prendre à témoin de son impuissance et bascula légèrement en arrière, comme s'il éclatait de rire. Puis il lui tourna le dos à son tour, regardant vers le niveau inférieur, ces gens qui contournaient la fontaine de l'esplanade. Il se pencha, se pencha puis finalement il escalada le garde fou et s’assit sur le bord. Il pouvait entendre, dans son dos, le pas des gens commençant à ralentir tandis que les murmures s’enflaient pour se concentrer vers lui: "mais qu’est-ce qu'il fait?"... "l'empêcher de sauter"... "oh mon dieu!  faites quelque chose!". Le soleil était bas à l'horizon et donnait des reflets orangé aux tours gigantesques. On voyait loin vers la baie Hudson, les frissons que le vent dessinait à la surface de l'eau. Il haussa un peu la voix pour être certain qu'elle l'entendrait malgré le bruit de la foule.

- Abigail je vous donne rendez-vous en bas ... Une de ses mains lâcha la rambarde, ce qui provoqua une nouvelle vague de cris dans la foule, pour désigner le bar qui faisait l'angle d'une tour en contrebas .J'y serai, disons dans ... environ 10 minutes. Vous aurez le temps de me commander des travers de porc frits. C'est très mauvais à la santé mais j'adore ça et je me "souviens" qu'ils en font d’excellents dans ce fast-bar ! A tout à l'heure et prenez l’ascenseur ou les escaliers.

Sans se retourner, il avait sauté dans le vide en écartant les bras, comme un plongeur au dessus d'une piscine. Il avait senti l'air chaud qui lui caressait les joues dans sa chute, entendu les cris horrifiés des badauds puis il avait fermé les yeux et disparu.

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Quelques nanosecondes après...


Vladimir était assis sur la banquette devant une table tout au fond de la salle, le grand menu arborant fièrement "chez Matrix" et en forme de gratte-ciel, dissimulant à moitié son visage. Il consultait la carte d'un air distrait en lorgnant vers la porte. Elle allait venir. Il était certain qu'elle serait assez maligne pour filer sans attendre que quelqu'un appelle les forces de polices pour signaler un ... Signaler quoi d'ailleurs ? Ils penseraient avoir été victimes d'un mirage, ou d'une hallucination collective. Ils mettraient cela sur le compte de la ventilation mal réglée ou de cette "satanée chaleur". Aucun corps ne s'était écrasé en bas ou disloqué sur les rebords de la fontaine . Ils avaient juste imaginé ce grand type aux cheveux argentés, avec ce drôle de sourire, qui parlait à cette fille, quelques secondes auparavant. Bizarre elle d'ailleurs, elle s'était étalée ... Ils avaient juste cru le voir sauter ... mais rien ni personne n'était arrivé en bas.

Il avait fait exprès de dire qu'il lui faudrait dix minutes pour rejoindre le lieu de rendez-vous. Il voulait qu'elle se croie la première sur les lieux. Pour l'observer, voir ses réactions, comment elle avait été affectée par ce qu'elle avait vu et entendu. Il commençait déjà à l'évaluer à son insu. Pour savoir si elle tiendrait le choc avec Zorvan.

Il se souvint qu'il faisait ça parfois avec Gala, dans les premiers mois où ils se fréquentaient. Il lui donnait rendez-vous dans un café qui servait de somptueux chocolats chauds et il arrivait un quart d'heure avant l'heure du rendez-vous, essayant de dompter son impatience, se mordant les lèvres chaque fois qu'une silhouette ressemblant à la sienne se profilait à l'entrée de la salle rétro. Et il essayait de se faire le plus discret possible pour la regarder, s'emplir les yeux et les souvenirs de chacun de ses gestes. Comment elle se passait la main dans les cheveux après avoir ôté son bonnet, comme elle hésitait à interpeler le garçon pour passer "leur" commande. Gala était timide malgré une beauté saisissante. Elle rougissait toujours lorsque le garçon accourait pour prendre sa commande, de le voir si empressé et souriant, charmé de servir cette jolie fille. Puis après, lorsque la petite était née, il avait fait pareil avec elles, lorsque il leur donnait rendez-vous dans le parc, à la fin de sa journée de travail. Il arrivait toujours le premier mais se mettait sur un banc éloigné, derrière son grand journal et il les regardait arriver par l'allée des tilleuls, dans la lumière de fin d'après midi, Loudna pendue au bras de sa mère et riant en demandant encore qu'elle cède à une de ses envies de manège. Et il souriait derrière son grand journal, en entendant sa fille dire "de toute façon, Papa, lui, il voudra !". Et il se régalait quelques minutes de les voir sans être vu, Et il s’émouvait de les entendre parler de lui avec cette tendresse qu'on ne partage qu'au sujet d'un être élu. C'était ses minutes rien qu'à lui. Il les leur volait, à leur insu, par amour. Un amour si grand qu'il ne pouvait se montrer entièrement sans sortir du cadre. Seulement après les avoir savourées et imprimées dans son cœur, il rejoignait les deux femmes de sa vie, prenant l'air de celui qui est en retard et s'excuse. Gala avait un petit sourire indulgent et Loudna lui disait que pour se faire pardonner, il y avait un bon moyen. Il avait volé ces précieuses minutes au temps, il y avait longtemps et si parfois, lorsqu'il fermait les yeux, il s'effrayait de ne plus arriver à  voir en imagination leur visage, il n'avait rien oublié de ces images dans le café et dans le parc.

Il ferma les yeux pour chasser la tourmente qui menaçait de faire céder le barrage et les rouvrit pour se concentrer sur la carte.
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Message  Invité Mer 27 Aoû - 4:38

Alors qu'il lui parlait, Abigail se refusait à lui accorder un regard. Au lieu de ça, elle gardait les yeux rivés sur la plaque de verre qui lui servait de sol. Son cœur s'était comme remis à battre quand elle avait entendu sa voix. Il y avait quelque chose d'étrange dans ses mots. Une chose qu'elle avait bien longtemps attendu et activement cherché, mais que jamais elle n'avait trouvé: de l'espoir. L'espoir pour elle de vivre enfin. Malgré les paroles blessantes qu'elle avait pu avoir, il n'avait pas l'air de lui en vouloir. Non en fait, elle aurait juré entendre un sourire dans sa voix. Quand il parla d'évasion, elle ne douta pas un instant qu'il puisse en effet disparaitre des prisons de verre. Il avoua être "flippant". La remarque lui tira un sourire sans qu'elle puisse le retenir. "Je ne vais tout de même pas vous agresser au milieu de centaines de personnes ?" Elle pouffa. Non que ce fût spécialement drôle, mais un homme qui vous demande très explicitement de ne pas le toucher sans raison particulière ne doit pas être, en effet, un bon agresseur... Autour d'elle, elle vit peu à peu les gens ralentir, jusqu'à s'arrêter même. Elle entendait des chuchotements, des mots clefs qui lui permirent d'imaginer la scène qui se déroulait dans son dos. Il avait dû monter sur la rambarde. Les chuchotis se muèrent en un grondement, voir parfois en cris. "Rendez - vous en bas", il avait dit. Et puis la foule s'était affolée, tout le monde avait hurlé. Au milieu de l'agitation, la blonde restait parfaitement droite, plantée sur ses grandes jambes regardant les passants de l'étage inférieur lever les yeux, horrifiés. D'un seul coup elle se tourna; s'approcha de la rambarde à son tour, jouant des coudes pour écarter la foule apeurée. Quand elle regarda en bas, il n'y avait plus rien. Ou en tout cas, pas ce qu'elle s'attendait à voir. Les gens faisaient un brouhaha d'enfer au tour d'elle. Il l'attendait. Elle ferma les yeux, eut un sourire, et quand ses paupières s'ouvrirent à nouveau elle avait pris sa décision.

- Fais chier. Ok, j’arrive …

Elle donna un coup dans la barrière et se tourna vers la foule.

- Bon, dégagez tout le monde !

Les gens mirent un moment à se rendre compte qu’elle avait parlé. Une femme aux cheveux roux la dévisagea.

- Pardon ?
- Vous avez pas entendu ?

Elle haussa le ton.

- J’ai dit, dégagez tout le monde !
- Un homme vient de sauter dans le vide…
- Et il va surement très bien ! Alors ouste, on s’en va !

Après quelques protestations, Abigail se débrouilla pour repousser tout le monde loin de la barrière.

- Allez, allez, vous avez bien vu qu’il n’y avait rien.

En effet, tout le monde fut forcé de constater qu’il n’y avait pas trace de cadavre, là, en bas. Finalement, le pont se dégagea. Abby jeta un dernier coup d’œil dans le vide. Doucement, des questions se mirent à danser dans sa tête. Mais bizarrement, elle ne s’en posait pas à propos de cette fausse chute. Elle savait qu’il n’avait rien. En toute logique, on ne donne pas rendez – vous à quelqu’un avant de se suicider ! C’est donc plus ou moins sereine qu’elle changea de destination. Elle rebroussa chemin pour remonter dans un ascenseur, direction le rez – de – chausser.
Ce type était étrange. Elle se repassait en boucle ses mots en avançant rapidement vers le « Matrix ». Elle connaissait quelqu’un qui bossait là bas d’ailleurs. Ann – Katrin, l’une de ses trois seules amies. La jeune femme était un peu plus âgée qu’Abby, étant de trois ans son ainée, mais elle se comportait toujours comme une adolescente puérile et capricieuse. C’était un peu ce qui les avait rapprochées. Ça, et le fait qu’elle soit allemande. Le jour de l’accident, le bus de tournée emmenait les Black Toy à l’aéroport, direction Néo – Berlin. Depuis, la blonde n’avait jamais trouvé le temps ou le courage de quitter sa plateforme natale. Perdue dans ses pensées, elle passa devant l’établissement sans le voir, et dû faire demi – tour en levant les yeux au ciel. Ce qu’elle pouvait être étourdie à des moments. Elle poussa la porte du restaurant.

A l’intérieur, il faisait indiscutablement bon. Rapidement, Abigail se défit de l’encombrante combinaison qui entravait ses mouvements. Elle exécuta les gestes de pliage comme un automatisme, et bientôt l’habit ne se résuma plus qu’à un carré de tissu gris. Pratique, ce matériau. Elle put donc aisément le glisser dans son sac avant de se diriger vers le bar, tout sourire.

- Salut toi.

Une petite brune releva des yeux noirs sur Abby. Son visage s’éclaira en la voyant.

- Abigail Oska sort de son appart chicos ?! J’aurais tout vu !

Elle se pencha par dessus le bar pour serrer son amie dans ses bras. Puis elle reprit, ses phrases ponctuées par un fort accent :

- Alors dit moi, qu’est – ce qu’y t’as fait sortir de ton trou ? T’as un rencard ?

Les joues d’Abby se tintèrent de rose.

- Mais non voyons, tu sais bien que non !
- Je sais rien du tout, fit elle en haussant les épaules, rien de rien !

Ann relâcha enfin la blonde, cette dernière rigolant timidement. Elle se passa une main sur la nuque.

- Ecoute, j’attends quelqu’un en fait. Tu pourrais me préparer des travers de porc frits ?

L’allemande haussa un sourcil. Elle ne ferait plus de remarque sur un potentiel rendez – vous galant ; elle savait qu’Abby était du genre à croire au Prince Charmant, et non du genre à draguer pour draguer. En revanche, elle sentait que son amie lui cachait un truc important. C’était dans son regard. Cette petite teigne ne se livrait pas facilement, alors ses amies avaient appris à lire son regard.

- Depuis quand tu manges ça, toi ?
- C’est pas pour moi.

Elles échangèrent un regard long et silencieux. C’était plus clair que n’importe quel discours : Abby ne dirait rien. La brune soupira.

- Amen. Je fais passer en cuisine. Tu veux un truc, toi ?
- Sers moi un grand whisky.

Sans un mot de plus, Abigail alla s’asseoir a une table. Et aussitôt, elle replongea dans ses pensées. Ne rien dire à Ann – Katrin n’était peut être pas dans ses habitudes, mais elle ne savait pas si elle aurait toujours autant envie de lui dire après avoir discuté avec le taré du pont. Ce gars lui avait un instant fait oublier l’hôpital, ses cachets et sa putain de merde dans le cerveau, c’était vraiment bienvenu. Une seconde, Abby trouva très énervant de ne pas pouvoir mettre un nom sur son visage. Elle avait tant de mots pour le qualifier, mais pas un seul ne pouvait s’apparenter à un nom. Elle se souvint alors qu’il avait disparu subitement après avoir clairement dit qu’il savait pour sa maladie. Et si ce type était un ange ? Après tout, Shelly et Ann – Katrin s’étaient toujours entendues sur ce point : les anges étaient des schizo à plumes drogués aux vapeurs de nuages. Ça rend forcément un peu fou, les vapeurs. Le souvenir de ses délires entre amies lui tira un sourire. Mais elle déchanta rapidement. Peut être qu’il était la Mort. Ou Dieu ? Un truc du genre en tout cas ; c’est vrai enfin, on ne disparaît pas comme ça après s’être jeté dans le vide ! Le bruit d’une assiette se posant sur la table la tira de ses pensées.

- Je voudrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas mais y a un super beau mec qui te fixe depuis qu’t’es rentrée cocote. Si tu veux mon avis il est là depuis un bon moment : j’me souviens plus d’l’avoir vu rentrer c’est pour dire ! Ce serait pas lui ton rencard ?

Abigail releva les yeux sur son amie serveuse.

- C’est pas un rencard je t’ai dit !

Elle tourna ensuite le regard en direction de la table du fond que lui avait désigné la brune. Retour sur Ann, qui se mordillait la lèvre inferieur en mettant en pratique ce qu’elle appelait sa tactique de « je matte un peu mais pas trop non plus ». Désespérante.

- Et oui, c’est bien lui.
- C’est vraiment pas ton copain ?

La jeune femme couina, faussement outrée.

- Kat ! Je t’ai dit que non, t’es impossible ! Y doit avoir deux fois mon âge en plus !
- Et alors, minauda – t – elle en se tortillant de manière provocante, y a pas d’âge pour être amoureuse ! En plus, je vois pas c’que ça t’embête. Si c’est pas ton mec j’ai toutes mes chances, soit pas rabat – joies !

Ce mec veut pas qu’on le touche, j’te souhaite bonne chance. Ou alors c’était juste moi ? … Abigail soupira et se leva finalement.

- Fiche lui la paix Kat, tu veux ?

Elle attrapa l’assiette chaude d’une main, son verre dans l’autre, et se dirigea vers la table où l’homme, en effet, ne l’avait toujours pas quittée des yeux.

- En plus je parierais ce que tu veux qu’il est marié ! lança – t – elle par – dessus son épaule.
- Rien ne m’arrête, Daffy !

La blonde secoua la tête, dépitée, et finalement posa verre et assiette sur la table, puis s’assit face à « monsieur – je – disparais – dans – les – airs – en – sautant – d’un – pont – donc – je – dois – être – un – grand – malade ». Elle ne put s’empêcher d’afficher un sourire bêta, et se contenta de fixer ses doigts. Elle se sentit soudainement devenir toute petite. Timidité mon œil oui, j’suis surtout la pire couarde que cette Terre ait porté ! Cette soudaine timidité n’était pas étonnante pourtant, Abby n’avait jamais été à l’aise dans les tête – à – tête, même avec sa meilleure amie. Alors avec un faux Tarzan aux cheveux argent, c’était une autre paire de manches ! Elle soupira.

- J’espère que vous n’avez pas entendu Ann.

Mauvais plan. Parler de son amie ne répondrait pas à ses questions.

- Mangez tant que c’est chaud. Et dites moi ce que vous me voulez. Au fait, joli vol plané. J’ai essayé de vous voir vous écraser dans une marre de sang en bas, mais vous avez déçu mon imagination débordante…

Bon, ok, ça n’était pas le comble du gentil que de dire avoir espéré le voir mourir dans d’atroces souffrances. Quoi que vu la hauteur il n’aurait pas souffert longtemps. Mais quand elle ne savait pas comment réagir face à une situation, elle penchait souvent pour les sarcasmes et l’humour noir. Prenant son courage à deux mains, elle releva les yeux vers l’homme en face d’elle, priant pour qu’il ne lui en veuille pas.
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Message  Le Dévoreur de temps Dim 14 Sep - 17:08

Elle avait fini par entrer. En fait, il avait souri derrière son menu en la voyant à travers la baie vitrée du bar passer tout droit le long de la devanture, et rater la porte d'entrée puis faire demi-tour en levant les yeux au ciel d'un air excédé. Depuis quelques temps le hasard lui envoyait de jeunes voyageurs et cela lui donnait l'occasion de se souvenir, de sa jeunesse estudiantine lorsque l’insouciance des premières années était sur le point de vaciller dans la terreur d'une tyrannie annoncée. Abigail , elle avait une autre forme de tyrannie accrochée aux basques. "Tu vas mourir parce qu'une merde te bouffe le cerveau". Ce n'était ni plus ni moins trash que "on va te prendre ta femme et ta fille pour les mettre sans un train de la mort, bondé à plus de 40 ° à l'ombre un jour d'été et elle suffoqueront debout dans le wagon à bestiaux, avant qu'on les enterre vite fait sous plusieurs centimètres de chaux, dans une fosse commune creusée à la va vite au milieu d'une forêt". C'était juste différent. C'était quelque chose qui rongeait et faisait voir la vie différemment du commun des mortels encore épargnés. IL voyait la vie différemment. Cette fille voyait la vie différemment. Tous deux n'avaient plus rien à perdre à l'heure où même l'espoir a vacillé. Ils se regardaient comme deux naufragés se contemplent sur une plage, échoués. Brisés par les lames qui les avaient heurtés sans pourtant réussir à les anéantir, à les noyer. L'âme à nu et grelottant, ils se regardaient. Lui émergeant douloureusement de ses souvenirs et elle remerciant la grâce d'une trêve. Il la trouva belle malgré les années qui les séparaient et il se surprit à prier qu'elle aie le temps d'aimer avant de partir. Il lui sourit.

- Je n'ai rien entendu, mais je lis un peu sur les lèvres. Votre amie est allemande, n'est-ce pas ?

Il remercia pour l'assiette mais la repoussa au milieu de la table.

- On partage ou vous prenez autre chose de CONSISTANT. Sérieux, il faut manger. Vous n'avez même pas encore perdu la première bataille et encore moins la guerre.  Ça vous a plu mon petit tour de passe passe ? Je suis content de voir que les jeunes de votre époque sont moins blasés que ceux du début du XXI°.

Il eut un sourire en coin et la gratifia d'un clin d’œil.

- Désolé de vous avoir déçue et de ne pas avoir répandu ma cervelle contre la margelle de la fontaine.

Il piqua une frite dans l'assiette et mordilla dedans.

- Mangez !  Pensez-vous arriver à oublier votre déception, si je vous dis que je connais quelqu'un qui peut probablement vous soigner. Un type très rock'n'roll , un peu barré et sadique mais qui a des talents cachés . Seule difficulté, il va falloir le convaincre, ou peut-être l'obliger. J'ai quelques contentieux à régler avec lui donc je ne pense pas faire preuve de mansuétude ni de modération dans ma façon de le convaincre.

Il appela la serveuse qui franchit la distance entre son comptoir et la table en un temps record.

- Fräulein, könnten Sie mir das Gleiche geben Sie bitte? puis se tournant vers Abigail il ajouta profitez en pour commander quelque chose à manger sinon je me lève et je disparais.

Pour une fois, il dérogerait à la bonne vieille vodka et goûterait un whisky "pure future". La petite brune s'éloigna promptement pour aller préparer la commande non sans lui avoir adressé un regard de braise.

- Qu'avez-vous dit à cette jeune personne à mon sujet ? Demanda-t-il alors qu'elle s'éloignait dans un savant déhanché. Abigail, je suis venu pour vous sauver. Comme ça les choses sont dites. Mais pour cela, il va vous falloir me faire confiance. Êtes-vous prête à voyager dans d'autres époques et à mener de nouveaux combats ? A oublier ce que vous êtes ici et renoncer à ce que vous possédez. Enfin du moins quand vous ne serez pas ici.

La petite Allemande revint avec un plateau et il prit son verre pour en descendre une bonne gorgée, laissant les deux filles se livrer à leur échange typiquement féminin et dont le code lui échappait partiellement. Lorsqu 'elle s'éloigna mais pas trop pour nettoyer quelques tables, il reprit.

- Je ne serais pas venu si brutalement faire irruption dans votre vie, et surtout je ne serais pas si direct, si le temps n'était encore plus précieux dans le combat que vous menez. Je sais que vous aspirez à vivre quelques aventures avant de mourir. Je vous propose d'en vivre qui vous permettront peut-être de guérir. Qu'en dites-vous ? Poursuivit-il en levant son verre.

- Bien sûr, je ne garantis aucunement la réussite de votre entreprise. Votre destin reposera entre vos propres mains mais je vais vous donner quelques armes de plus pour le défendre.
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Message  Invité Mar 23 Sep - 23:18

Heureusement, il n’avait pas écouté ce que les deux amies s’étaient dites. Abigail se serait sentie bien mal si elle avait dû fournir des explications. Ann – Katrin avait si peu de self – contrôle… Il avait remarqué que la brune était allemande. Etrange, pensa Abby. S’il n’avait rien entendu, comment avait – il deviné ? Il affirmait savoir lire sur les lèvres, soit, mais elles n’avaient parlé qu’en Anglais… Il poussa l’assiette devant elle. Lui ordonna de manger. Décidément, il avait l’air décidé a prendre soins d’elle ! La jeune fille entrouvrit les lèvres pour répondre quelque chose, mais un clin d’œil lui coupa toute capacité de parole. Doucement, elle devina ses joues se tintant d’un rose flashy et pas du tout discret. Pourquoi avait – il fallu qu’il fasse ça ?

- Désolé de vous avoir déçue et de ne pas avoir rependu ma cervelle contre la margelle de la fontaine.

Le rose vira au rouge. Abby eu soudainement honte. Vraiment. Il était gentil avec elle, et tout ce qu’elle était capable d’articuler c’était des insultes, ou d’autres choses désagréables. Elle aurait voulu répondre mais resta désespérément muette. Fort heureusement pour elle, lui parlait beaucoup. Une nouvelle fois, il lui intima de manger. Elle se demanda une seconde si elle était capable d’avaler quoi que ce soit. Et puis il prononça les mots. Ceux qui n’étaient pourtant pas imaginables. Une fois de plus, son cœur se mit a battre au ralentit, et le monde sembla se rétrécir à cet homme devant elle, a ce qu’il lui disait, a cette promesse improbable qu’il lui faisait. Elle se souvint du pont. De la réaction qu’elle avait eu. Une seconde, elle fut de nouveau tentée de tout rejeter en bloc. Elle le regarda appeler Ann – Katrin et commander en allemand – ce qui ne l’étonna même pas – et dû fournir un effort extrême pour faire sortir quelques sons d’entre ses lèvres. Mais il menaçait de s’en aller, et ça, elle ne le voulait pas. Elle avait trop souvent été privée des aurevoirs en bonne et due forme. La jolie serveuse se pencha vers son amie.

- Le laisse pas filer, mange quelque chose !
- Euh, bredouilla – t – elle, fais moi du poulet ?
- Je vais voir ce que je peux faire.

Et elle s’éloigna. Abby porta son verre à ses lèvres.

- Qu’avez vous dit à cette jeune personne à mon sujet ?

Le whisky décidant de jouer les voyageurs du corps humain, la blonde s’étouffa. Elle releva les yeux sur son vis à vis avec un air affolé. Pour son plus grand bonheur, monsieur « je – pose – des – questions – gênantes » s’empressa de continuer. Mais ce qu’il ajouta eut pour effet d’emballer encore plus son petit cœur trop fragile, alors qu’il affirmait être venu pour « la sauver ». Tout ce qu’il lui disait était tellement … Surréaliste ? Bizarre ? Tentant. Tout ça en même temps, en fait. Et si la condition de son bonheur potentiel était de tout quitter, alors il était évident qu’elle le ferait. Quoi qu’il lui en coûte. Elle n’aurait jamais été capable de tout quitter sur un coup de tête, comme ça, avant. Mais il y avait ce truc dans la façon d’être de ce type, cette sorte de pouvoir attractif qui effaçait toute tentative de raisonnement de la tête de la jeune fille. Devant lui elle se sentait comme une enfant, et en tant que telle, elle se sentait le devoir de lui obéir aveuglément. Son esprit critique s’éveillait de temps en temps. Pas très robuste cependant, car il était tellement plus doux de croire, plutôt que de savoir. Car sa réalité n’étais plus celle qu’elle aurait voulu vivre. La fin la chanson « I dreamed a dream » de la comédie musicale Les Misérables résonna dans sa tête.
I had a dream my life would be so different from this hell I'm living, so different now from what it seemed… Now life has killed the dream I dreamed.
Certes, Fantine était surement bien plus à plaindre qu’elle. Mais ça collait bien à son actuel état d’esprit. Alors si vraiment, lui, devant elle, pouvait d’une façon ou d’une autre lui faire oublier tout ça, elle le suivrait jusqu’au bout du monde. Elle serait prête à tout donner s’il lui promettait ne serait – ce que l’illusion d’un bonheur sincère. S’il lui procurait la sensation d’être de nouveau en vie.
Ann choisit cet instant pour refaire surface. Elle avait troqué son T – shirt trop moulant pour un bout de tissu si court et transparent qu’Abby se demanda si elle n’aurait pas mieux fait se mettre directement en sous vêtements, brandissant une pancarte « mangez – moi ». Cependant seule la blonde semblait avoir remarqué ce changement si soudain. Tant mieux, elle ne pu s’empêcher de penser. Et puis elle se pencha de nouveau vers son amie.

- Code rose, Abby.
- Tu oublies.

Dans le langage des filles, « code rose » signifiait approximativement « ce mec est a moi je le veux je le prête pas tu le vois tu le vois plus jamais plus tu ne le reverras il finira enfermé dans une cage sans aucun droit de visite car maintenant je me l’approprie ». Plus ou moins. La jeune Néo new yorkaise imagina une caricature de la scène, transformant les deux jeunes filles en chats, et ce pauvre homme en gamelle de croquettes. Elle voyait très bien Ann – Katrin tourner autour de la nourriture avant de se l’approprier d’un coup de patte expert. Mais il était hors de question qu’elle laisse son amie brune se faire trop d’illusions. Il était clair sur ses intentions : si elle décidait de vivre une autre vie, ils partiraient pour ne plus revenir. Abigail lança donc son regard le plus meurtrier à la jeune serveuse, faisant discrètement claquer sa langue sur son palais.

- Mais pourquoi ? couina – t – elle.

Abby hésita. Elle lança un regard vers l’homme ; il semblait avoir replongé dans ses pensées. Avec de la chance, il n’écoutait pas. Elle reporta son attention sur Ann, qui se dandinait dans l’espoir de capter son attention.

- Peut – être bien qu’en fait, c’est mon rencard !

Elle avait tout de même parlé relativement doucement. Si jamais il avait laissé ses oreilles traîner … L’allemande écarquilla les yeux d’abord, puis un large sourire étira ses lèvres pulpeuses. Elle gloussa. Sans ajouter quoi que ce soit, elle s’éloigna, non sans avoir mimer une légère révérence. Elle se moquait d’elle, c’était tellement évident. La blonde soupira, et rebaissa les yeux sur ses longs doigts qui s’étaient entremêlés. Son « rencard » ne tarda pas a reprendre la parole.

- Je ne serai pas venu si brutalement faire irruption dans votre vie, et surtout je ne serais pas si direct, si le temps n'était encore plus précieux dans le combat que vous menez.

Elle fronça les sourcils. Ce qu’elle avait pris pour une qualité – soit le fait de ne pas tourner autour du pot – n’était peut être que le fait du hasard. Elle se sentit un peu déçue par cette prise de conscience. Elle aimait les gens directs. Quoi que non, elle n’aimait pas les gens, mais ayant à en côtoyer certains, elle les préférait francs. Et puis de quel combat parlait – il ? Si combat il y avait eu, jamais elle n’aurait un seul instant accepté de lui parler, à ce type. S’il était là devant elle, s’ils discutaient devant une assiette de porc frit, c’était justement parce qu’Abby avait rendu les armes avant même que la guerre ne soit déclarée. Elle n’avait pas les épaules d’une battante. Elle n’avait pas le courage d’un soldat. Elle n’avait pas la force de supporter plus que l’accident quinze années plus tôt, plus que la nouvelle de sa mort prochaine, plus que le chagrin qu’elle causait à sa mère. Cependant, elle le laissa parler. Elle aimait se dire qu’il voyait en elle la jeune femme qu’elle aurait voulu devenir. Cette Abby qui le fameux jour n’aurait pas perdu ses parents et sa sœur. Une douleur fulgurante la lança soudainement. Elle serra les mâchoires pour tenter de canaliser le mal. Elle se souvint alors qu’elle avait abandonné sa boite de cachets sur son lit, a Giant Goose. Sa tête lui tourna, mais elle lutta, fixant l’homme devant elle. « Votre destin reposera entre vos propres mains » avait – il dit. Allait – il la laisser seule, après, si elle acceptait son aide ? Allait – il lui aussi l’arracher aux bras de parents aimants sans rien lui offrir en retour ? Une vie, Abby, ce n’est pas rien, lui susurra une petite voix dans sa tête. Peut être. Mais une vie solitaire, elle n’en voulait plus. Elle avait besoins d’un guide, d’un ami, d’un père, pourquoi pas d’un dieu ; elle avait besoins de croire en quelqu’un, et non plus en une idée qu’elle ne puisse toucher. Quoi que sur ce point, lui non plus n’était pas « touchable ». Pourquoi, d’ailleurs ? Elle devrait peut lui demander plus tard. Elle avait soudainement une multitude d’autres questions en tête : où allait – il l’emmener, y aurait – il d’autres personnes, l’aiderait – il à reprendre gout à la vie, réussirait – elle a guérir pour de vrai ? Tant de choses qu’il lui faudrait élucider. Quand finalement il se tut et qu’elle devina qu’il lui laissait la parole, Abigail soupira. Elle refoula une vague de douleur, avala une gorgée de whisky, chipa une frite dans l’assiette. Puis elle poussa un autre long soupir.

- Ce que j’en dis, c’est que je n’ai aucune raison de vous croire, laissa – t – elle tomber froidement.

Ann – Katrin s’approcha pour poser sur la table une assiette contenant des cubes de poulet aux couleurs visiblement pas naturelles du tout, et s’éloigna au pas de course. Magie, magie … La blonde attrapa un morceau bleu et l’avala presque sans mâcher.

- Cependant, je ne suis pas stupide, je vous ai vu disparaître tout à l’heure. Je pense que vous êtes capable de tout ce que vous avancez. Et puis même si vous étiez un tueur en série, je suis déjà condamnée, alors…

Haussement d’épaules, cube rouge, avaler.

- Je suis prête à tout oublier de mon passé, si c’est la condition de votre aide. Vous n’aurez qu’à me dire où, et quand. Commandez, j’obéirais. C’est ce dont j’ai besoins je crois, partir a l’aventure. Vous avez justement fais remarquer tout à l’heure que je n’étais pas « blasée ». Je ne sais pas si c’est caractéristique de mon époque, mais ce que je sais c’est que je préfère croire en votre magie aussi étrange qu’elle puisse être plutôt que de me dire que vous êtes fou. D’ailleurs, excusez moi de vous avoir aussi mal parlé. Je ne suis pas aussi … Proche des gens, d’habitude. Je ne sors presque jamais de chez moi. Mais ici, je n’ai plus rien à perdre, et rien a gagner non plus. S’il existe un ailleurs, c’est là que je devrais être alors. Dites moi ce que je dois faire pour.

Encore un cube coloré, une frite aussi. Et une gorgée de son verre, la dernière.

- Oh, une dernière chose.

Un sourire enfantin étira les lèvres pâles d’Abigail.

- Je ne dois pas parler aux inconnus. Vous avez un nom peut – être ?
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Message  Le Dévoreur de temps Lun 20 Oct - 16:36

Il était très déconcertant , parfois étrange même, de lire sur les visages des personnes contactées l'étonnement, l'incrédulité, la peur, l'indignation, l'espoir, la ferveur, la haine voire le rejet en bonne et due forme de ce que lui était, de ce qu'il proposait comme autre possible. Abigail Oska Leroy afficha tour à tour tous ces états en un temps extrêmement court et il fut touché d'imaginer sans peine le combat intérieur qui se jouait en elle. Bien sûr, la donne était différente pour cette jeune fille par rapport aux  autres possibles voyageurs. Elle n'avait plus de lien dans le monde où elle vivait, si ce n'est cette charmante serveuse affriolante et amicale, elle n'avait plus d'avenir non plus. Mais ce n'est pas parce qu'une personne n'a plus rien à perdre en apparence, qu'elle est prête à tout. Il y a les choses invisibles et inavouables qu'on a à perdre et aussi en premier lieu, ses principes. Le Dévoreur l'avait maintes fois expérimenté; certaines personnes étaient prêtes à tout abandonner mais leurs principes les empêchait de franchir le pas. "Je ne parle pas à un inconnu" ou " vous pourriez être un tueur en série" en étaient la parfaite illustration.

Après avoir beaucoup parlé lui-même, il l'avait écouté parler enfin, à son tour, tout en piochant dans l'assiette apportée par son amie. Les nourritures terrestres lui semblaient aussi exotiques que les spirituelles en ces temps et il ne savait de quoi s'étonner le plus: les dés multicolores et comestibles ou la nouvelle tenue de la barmaid. Pour résumer: ce que mangeaient ces humains du futur et leur parade d’appariement. Il se souvint de la répliquante de Blade Runner dans son ciré totalement transparent, avec ses bottes à talons et ses dessous. S'il avait été célibataire et plus jeune, il aurait sans doute eu du mal à déglutir et aurait songé, "heureusement que je n'ai pas à me mettre debout maintenant" . Mais il était marié et amoureux, officiellement d'une morte, il avait une trentaine d'années mais en avait vécu plus de cent. Le charme de la jeune allemande, même si perceptible, se brisa sur une sorte de résignation "je suis trop vieux pour ces choses-là" et surtout "je n'ai pas d'avenir, mais des avenirs" .

Du reste, par une sorte de convention bien supérieure à celle de Genève, la jeune allemande se mit hors course après quelques mots échangés à l"oreille avec sa complice. Cela ôtait un embarras dans les projets immédiats. Restait à rassurer définitivement Abigail sur le fait que la proposition n'était pas un piège mais une planche de salut. Si elle semblait prête à renoncer à beaucoup de choses, elle doutait encore non de ses capacités mais de sa sincérité. Il finit son verre et décida que c'était le dernier pour aujourd'hui. La fatigue aidant, il tenait moins bien l'alcool et il avait une voyageuse à ramener. Le faisant claquer sur la table il répondit en la regardant bien dans les yeux.

- Les premières choses en lesquelles vous devez croire c'est que je m'appelle Vladmir Stanzas, que je suis docteur en physique quantique, que je suis né en 1910 et que j'ai trouvé un moyen de me déplacer dans le temps et l'espace. Partant de cette certitude, tout est possible. Même votre guérison.

Il se cala contre le dossier de la banquette et croisa les bras en réfléchissant à tout ce qu'elle venait de dire avant de lui demander son nom.

- Je n'ai jamais dit que vous devez oublier ce que vous êtes. Je voulais dire que votre statut d'héritière ne vous servira à rien là où nous allons. Vous ne pouvez transférer vos comptes à travers le temps. En revanche ce que vous êtes à l'intérieur de vous, il faut le conserver. Cela vous aidera. C'est de nos expériences que nous tirons notre force. J'aimerais pouvoir vous dire que vous reviendrez souvent voir Ann-Katrin mais je vous mentirais. Quand on est voyageur temporel on ne rentre pas tous les soirs dormir à la maison. On s'en crée d'autres, plein d'autres. Et puis il y a la maison ouverte à tous les voyageurs: Targoviste, notre QG pour ainsi dire. C'est là que je vais vous mener. Comment ? Il vous suffira de me donner la main et de ne pas la lâcher ... quand vous serez prête ...
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Message  Invité Sam 25 Oct - 1:38

Il l’avait regardée droit dans les yeux. Evidemment, la seconde d’après Abigail semblait avoir été peinturlurée de rouge. Elle trouvait ce regard extrêmement dérangeant. Dans d’autres circonstances, elle l’aurait même trouvé impoli. Oui mais voilà, elle avait l’impression que cet homme assis devant savait lire en elle. Ce qui, en l’occurrence, aurait posé bien des problèmes … Elle tenta de se concentrer sur sa voix et non sur ses yeux pour se dérober un instant à sa gêne.
Vladimir… C’était son nom. Ça sonnait presque trop normal. Abby sentit un soupçon de déception pointer le bout de son museau mesquin. Né en 1910 ? Voilà qui s’annonçait bien plus intéressant ! Il ajouta qu’il voyageait dans le temps et l’espace. La blonde ne s’en trouva pas étonnée le moins du monde. Une seconde, cette nouvelle lui sembla même la plus normale qui soit puisqu’expliquant le saut depuis l’arc supérieur. Ce n’est que lorsqu’il lui parla a nouveau de guérison qu’elle prit véritablement conscience de ce qu’il venait de lui dire. Les couleurs se mirent à fuir ses joues aussi vite qu’elles y étaient venues. En peu de temps elle fut plus blanche encore qu’à l’habitude, si bien qu’elle espéra qu’Ann ne la remarque pas. Guérir. Comment pouvait – il lui parler de ça s’il n’en savait rien, rien de plus qu’une vague théorie ? De toute façon il s’en foutait pas mal, lui, de la santé d’Abby. Mais elle, ça lui faisait mal les faux espoirs. Son mal de tête s’intensifia légèrement, assez pour lui faire plisser les yeux. Il voyage dans le temps, se répéta – t – elle. Aussitôt, la vision du crâne défoncé de sa jumelle, son petit corps baignant dans son sang et celui de ses parents frappa la jeune femme de plein fouet ; elle eut un haut – le – cœur. S’il pouvait voyager dans le temps, peut être accepterait – il de l’envoyer ce jour là, sur cette route, et peut être qu’alors, elle pourrait empêcher l’accident ? Elle se surprit à avoir la gorge sèche. Soudainement les mots lui manquaient pour mettre un nom sur les sentiments qui la tiraillaient. Car plus profond encore, sous ce tendre espoir naissant, crispé sous une vague de bonheur interdit, Abigail ressentait ce même malaise qui la prenait le matin quand elle s’éveillait d’un rêve de paradis. Elle savait que ce qu’elle désirait ne serait certainement pas sans conséquences. La jeune femme, dans sa grande solitude, avait profité de la technologie luxueuse de son duplex pour visionner quantité de films. Bien entendu, ceux qui la faisait rêver parlaient de famille, d’amour et de pouvoirs magiques. Elle avait vu ce film une fois, qui racontait la vie d’un homme qui voyageait dans le temps, par flashs, et qui avait du construire sa vie autour de ça. Elle ne se souvenait plus du titre de ce film, plutôt vieux. Elle se demanda si Vladimir risquait de disparaître subitement comme l’homme du film. Son cœur se crispa, elle éluda l’idée. Sa famille, alors, c’était cela le fond du problème ? C’était cette sœur qui n’avait pas grandi a ses côtés, qui n’avait pas rit avec elle, qui n’avait pas souffert avec elle, qui n’avait, en fait, pas vécu. La blonde déglutit. Elle se trouvait trop sentimentale. Tu es faible Abby, reprends toi. Finalement, qu’importait le prix a payer si son souhait lui était accordé ? Le film lui revint en mémoire. Et si empêcher cet accident changeait la face du monde ? Si la raison de tout ce mal était en fait réellement définie, s’il existait un destin qui avait mené Abigail jusque dans ce restaurant, a cette table ? Car il était évident qu’elle aurait été toute autre si l’accident ne s’était pas produit. Elle tourna les yeux vers son amie qui essuyait des chopes derrière le bar. Jamais elle ne l’aurais connue surement, avec Brittany pour lui tenir compagnie. Ses doutes se muèrent en peine. Il lui apparaissait que tout allait mieux ainsi. Que tout était comme il fallait que ce soit. Et que sa colère, aussi réelle soit – elle, n’était plus aujourd’hui qu’une cause supplémentaire de souffrance. La colère n’aidait pas à se souvenir. Elle n’aidait pas a surmonter l’épreuve. Elle n’aidait même pas à oublier. Alors Abigail décida qu’elle ne serait plus en colère. Ensuite venait la tristesse, qui en elle même pouvait être noble ; seulement quinze ans plus tard, elle ne ressemblait plus à autre chose qu’à un caprice. Elle décida de cesser d’être triste. Elle prit une profonde respiration. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle ne rompe pas ses décisions. Après tout il était difficile d’oublier un traumatisme gravé si profondément en soi. Il fallait pardonner. Elle n’en était peut – être pas capable.

Elle avait tant pensé qu’elle faillit ne pas saisir tout ce que ce « Docteur Stanzas » lui avait expliqué. C’est de nos expériences que nous tirons notre force, disait – il. Abby n’était pas certaine d’être en accord avec ça. Elle avait plutôt tendance a penser que ce qu’elle portait en elle était une faiblesse. Elle se sentait forte quand elle parvenait à oublier ; ce qui en soit était loin d’être une victoire. Alors peut – être apprendrait – elle une nouvelle façon de vivre maintenant. Peut – être qu’elle découvrirait une autre Abby, cachée dans un petit coin d’elle – même. Peut – être qu’elle réapprendrait a sourire vraiment. Comme un oiseau en cage dont cet homme serait la clef, voilà la femme qu’elle se voyait être. La personne qu’elle voulait laisser derrière elle. Il lui dit qu’elle n’aurait qu’à prendre sa main quand elle serait prête.

Dans son dos, Ann – Katrin laissa tomber un verre qui se brisa sur le sol avec grand fracas. La Néo Newyorkaise sursauta, replongeant d’un seul coup dans la réalité.
Lui tenir la main ? Se répéta – t – elle en rougissant de plus belle. N’avait – il pas explicitement demandé à ne pas être touché, justement ? Abigail battit des paupières. Elle jeta un regard inquiet à son amie allemande qui jurait dans une langue qu’heureusement elle ne comprenait pas avant de reporter son attention sur Vladimir. Son cœur se mit a jouer accelerando. De nouveau, le regard de l’homme sembla lui bruler la peau. Elle baissa les yeux sur ses doigts qui avaient recommencé a se battre.

- Quoi, ici ? Je veux dire… Maintenant, comme ça ? On ne va pas un peu attirer les regards ?

En s’écoutant parler, Abby se dit que ses questions pouvaient s’avérer tendancieuses, aussi remercia – t – elle le Ciel pour avoir éloigné les oreilles trop curieuses de la brune. Une nouvelle pensée s’imposa alors : Ann n’allait – elle pas mourir d’angoisse en la voyant disparaitre ?
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Message  Le Dévoreur de temps Sam 15 Nov - 15:09

Tout en jouant avec un dé couleur turquoise aromatisé "bleu d’Auvergne " ou "vieille chaussette humide oubliée dans un coin", Stanzas sourit, d'un de ces sourires en coin qui avaient fait craquer Gala lorsqu'il avait 20 ans.

- Non ... On va faire ça dans un endroit plus tranquille. Le voyage dans le temps à ma façon, c'est quand même assez sportif et rapproché.


Il ramassa les miettes de bleu synthétique du plat du pouce puis le lécha.

- Mais vous devriez informer votre amie, une fois qu'elle aura fini de se battre avec les verres, que vous allez vous absenter de New- York durant un certain temps. Je veux bien servir d'alibi. Dites-lui que cet étrange type qu'elle drague avec subtilité vous emmène en voyage à travers le pays. Si vous êtes mal à l'aise avec les possibles suppositions que pourrait faire votre amie, vous pouvez dire que je suis un ami de Frank, qu'il m'a chargé de prendre soin de vous. Je suis certain que s'il avait pu, il l'aurait fait...

Il n'avait encore jamais parlé à un voyageur condamné à court terme. Ni à une voyageuse si jeune. Il était fatigué des événements des derniers jours, des derniers mois, des dernières années... Décennies. Il prit conscience qu'il n'avait pas été heureux depuis presque 73 ans.  A trente cinq ans, ce constat lui laissa un goût de regret. Sauver la vie d'Abigail le rendrait heureux, il le savait. Ce serait un bonheur par procuration, une pépite précieuse à garder pour les jours sombres de désespoir, comme ceux où il n'arrivait plus à se souvenir des visages de Gala et Lounda. Sauvez une jeune femme, presque encore une enfant...  une vie, une victoire sur la saleté de mort injuste...

Pourquoi ne pouvait-elle pas être digne ? Venir prendre le vieillard qui vient de recevoir ses proches et de vivre un moment de tendre souvenir. Pourquoi la passerelle d'embarquement n'était-elle pas agréable et rassurante, réservée à ceux qui ferment les yeux d'une lassitude légitime des choses accomplies au cours d'une longue vie et regardent en arrière en songeant: j'ai vécu tellement d'émotions, et fait tellement de choses. J'ai rempli la vie de tant d'êtres de douceur et de tendresse, j'ai combattu tant de fois des chose monstrueuses ou révoltantes, parfois en moi-même. Je suis fatigué et j'aimerais me reposer. Pourquoi ne voulait-elle pas juste ressembler à un long sommeil ? Mais la mort ne décidait pas toujours. Parfois, elle devait obéir au dictat du corps qui disait ne plus en pouvoir. Elle devenait alors délivrance. Elle était bonne et charitable. Il voulait croire cela lorsqu'il pensait à ses deux amours, étouffant dans un wagon plombé. Elles avaient dû l'appeler et elle était venue, la mort libératrice.  ET alors il comprenait dans ces moments de sombres pensées que la mort doive aussi ravir des enfants à leur père et des femmes à leur mari. Elle ne faisait que soulager les maux infligés par des humains au corps d'autres humains. Elle était louable, même pour une fillette de 5 ans et une femme de 28 ans.

Lorsqu'il fixa  à nouveau Abigail, il ne put soutenir très longtemps son regard. Il s'était laissé avoir encore une fois et les larmes n'auraient rien de rassurant pour la jeune femme. Il détourna le regard  et murmura tête baissée.

- Je vous laisse aller régler, je n'ai pas la monnaie des lieux. Vous en profiterez pour faire vos adieux, enfin pour lui dire au revoir. Je vous attends dehors pour prendre un ascenseur. Si vous voulez passer chez vous récupérer des affaires ou des souvenirs... On peut y faire un saut. Ensuite, on pourra faire ça dans l’ascenseur ...

Il se tût soudain parce que la jolie brune revenait en faisant danser son nombril et ses protubérances mammaires. Il ramassa son briquet et son paquet de cigarettes et gratifia la serveuse d'un petit sourire faussement  gêné en se demandant ce qu'elle avait pu entendre, puis se leva et  se dirigea vers la sortie en marmonnant un "au revoir ".


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