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L'Ordre Ancien.

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L'Ordre Ancien. Empty L'Ordre Ancien.

Message  Invité Mer 17 Sep - 15:58

Ludmilla et moi souhaitions croiser nos plumes avant de rencontrer Zorvan. Ce monde parallèle nous en donne la possibilité. Si qui que ce soit souhaite se joindre a nous, il suffit d'un clavier, d'une main et d'un peu d'imagination !

- - - - -

De là d'où je viens les murs sont faits de toiles, et les portes de cordes tissées. Les villages sont regroupés en cercles sur des plaines qui s'étendent sur des kilomètres, et d'un bout à l'autre on peut voir les autres villages. De là d'où je viens, on a jamais eu a craindre les monstres qui sévissent sur le Grand Continent. C'est paisible, chez moi. Du moins ça l'était dans mon souvenir.

La calèche tanguait sur la route de Navaterre. Personne n’avait prononcé le moindre mot depuis des lieux. Il n’avait pas été bien vu de prendre une voyageuse. Elle n’avait même pas voulu s’expliquer, dire d’où elle venait, mais Martin le chef du convoi avait tout de même accepté de la prendre avec eux. Martin était un homme grand, aux cheveux plus noirs que les plumes du corbeau et aux yeux gris brumeux. Il était évident qu’elle l’avait charmé. Elle avait dans les yeux la marque du diable, cette fille, et ses cheveux entre roux et blond étaient une autre preuve encore. D’ailleurs, qui prouvait qu’elle n’avait pas dans son sang un peu de celui d’un monstre ? Elle était trop belle pour être tout à fait humaine, celle là ! Ils étaient beaucoup dans la procession à vouloir la laisser sur le côté, où la passer au fil de l’épée. Mais la route était longue jusque la cité Jaune, et il faudrait subir la vision de cette fille parmi eux. Elle ferait une bonne offrande pour les vampires s’ils décidaient de sortir de leur bois pour les attaquer. Ou pour toute autre créature en mal de sang frais en fait. La nuit tombait doucement, chassant le soleil du ciel bleu. Les chevaux étaient épuisés par le long chemin parcouru. Les hommes aussi. Il fallait faire halte. Très vite, Martin ordonna que l’on stoppa les caravanes : le camps fut installé dans l’heure. On alluma des feux. Au même moment, la première des trois lunes se leva. Elle était ronde et blanche, si loin que l’on ne distinguait d’elle que la forme ovoïde. On prépara les couchages. Puis vint la question inévitable, où dormirait la fille ? L’un des hommes, celui qui se disait le plus courroucé par sa présence, se décida à se présenter devant leur maitre.
- Martin, il faut nous dire ce que tu comptes faire de la diablesse ?
L’interpelé leva les yeux des flammes crépitantes. Il soupira.
- Je suppose que tu parles de notre invitée.
L’homme se tortilla sans rien ajouter.
- Je m’en occupe, ne t’en fais donc pas. Tu peux dormir tranquille.
Martin rebaissa les yeux ; il y eu un silence.
- Que veux – tu, Andréa ?
L’homme se racla la gorge.
- Certains d’entre nous … Vous savez y a des choses qui se disent …
- Quelles choses ?
- Sur la fille. On dit qu’elle serait maléfique.
- On dit beaucoup de choses, Andréa, mais peu d’entre elles sont vraies.
Derrière les deux hommes, un des pans de toile beige couvrant la caravane principale se souleva. Le visage qui apparut tira une grimace au – dit Andréa. De longues boucles dorées comme de fins miroirs ayant emprisonné la lumière du jour encadrant un visage à la peau plus pâle que la lueur de la première lune, deux yeux aux couleurs contraires : l’un d’un bleu glacé, l’autre brun et chaud.
- Elle n’est pas nette cette fille, Martin. Nous on ne lui fait pas confiance.
Il s’éloigna rapidement. La jeune femme prit sa place auprès du feu, silencieusement. Elle aussi regardait les flammes qui dansaient en chantant. Un spectacle reposant malgré les tensions apportées par la noirceur nocturne. Un sourire fin étira les lèvres du chef convoyeur. Il échangea un regard avec son invitée. Elle lui sourit à son tour, sans mot dire, puis reporta son attention sur le feu. Vint le moment où seules les braises demeurent rouges et chaudes. Alors Martin se leva. Il posa une main sur l’épaule de la fille une seconde, et alla se coucher. Près des tisons la rousse demeura seule.

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La nuit était avancée d’une lune quand les premiers hurlements réveillèrent les hommes du cortège. Chacun se saisit d’une arme, on sortit des draps. En quelques instants, Martin et cinq autres hommes sortirent de leurs caravanes. La fille se tenait droite comme un i a l’endroit même où le brun l’avait laissée.
- Que se passe – t – il ? demanda un petit homme aux cheveux blonds.
La jeune femme lui fit signe de se taire. Il voulut protester, mais Martin lui jeta un regard dissuasif. Derrière eux, d’autres se levaient. Les cris avaient cessés quand les premiers étaient sortis, mais cela avait suffit à réveiller le camps entier. On attendait.
- Je peux les voir bouger…
C’était la première fois qu’elle parlait. Elle avait une voix claire et douce ; la voix d’une princesse. Etait – ce l’un de ses sortilèges ? Doucement, des silhouettes se dessinèrent sur l’orée de la forêt, se détachant des pins et des chênes millénaires grâce à leurs yeux luisants.
- Des vampires !
Le bruit de lames s’échappant de leurs fourreaux résonna dans la nuit.
- Non, ne faites rien !
Elle avait crié. Voilà des heures qu’elle ne disait rien et maintenant elle voulait donner des ordres ? Andréa, qui s’était lui aussi levé, s’approcha férocement de la rouquine.
- Je vais te crever sale bête, c’est toi qui les as amenés a nous !
Martin s’interposa sans que la jeune femme n’ait bougé d’un pouce. Elle fixait toujours la ligne qui avançait d’un pas assuré.
- Tu ne vas rien faire du tout, lâcha – t – il froidement, la jeune dame t’as demandé de rengainer, alors c’est exactement ce que tu vas faire !
Le blond et son chef s’affrontèrent du regard. Derrière Martin, la diablesse avait levé une main, le bras tendu droit devant elle. Elle entrouvrit les lèvres.
- Sylsas Collundorm.
Doucement, dans la paume de sa main, se forma une minuscule boule de lumière. Elle était de couleur blanche, entourée par des filaments dorés comme ses cheveux. Très lentement, sous le regard entre peur et admiration des hommes du convoi, elle tendit son second bras, et plaça la paume de sa main gauche sur celle qui brillait de plus en plus.
- Sylsas Collundorm.
La boule devint une sphère de la taille d’un œil de bœuf. Devant, les vampires s’étaient stoppés net. Ils se jetaient des regards. Qui était cette fille ? Comment pouvait – elle pratiquer une magie aussi ancienne ? Les hommes n’y connaissaient rien en magie. Tout ce qu’ils savaient, eux, c’est qu’ils avaient vu juste à son sujet. Cette saleté était une sorcière ! Andréa cracha au sol et pointa sa lame en direction de la rousse.
- Laisse moi passer Martin, c’est toi qui va tous nous faire tuer !
Le chef n’eut qu’à lui adresser un regard, et le blond se tut immédiatement. Chez les voyageurs, on ne discutait pas les ordres du maître de convoi.
- Tu auras notre sang sur les mains, lâcha – t – il froidement avant de s’éloigner.
La boule de lumière avait grossit. Elle éclairait la totalité du camp, et l’on aurait pu jurer voir les monstres aux crocs acérés reculer de quelques pas. Ils battaient en retraite.
- Sylsas Collundorm Vampyos !
Un bruit sourd commença de résonner. Tout doux en premier lieu, puis doucement il alla crescendo, devenant un bourdonnement inquiétant puis enfin un son si puissant que chacun dû plaquer ses mains sur ses oreilles. C’est alors que la sphère éclata en un milliard de paillettes de lumière, filant tout droit vers les monstres qui détalèrent comme ils étaient venus. On rengaina les armes. On retourna dormir. Et plus un mot ne fut prononcé quant à ce qu’il s’était passé.

La route continua ainsi pendant un long moment durant lequel plus personne n’osa critiquer la sorcière. Non pas qu’ils lui soient reconnaissant pour quoi que ce soit, bien au contraire, mais ils craignaient les représailles, et pas tant celles de cette démone que celles de Martin. Les hommes avaient entendu les échos d’une terrible dispute entre lui et la fille le lendemain de la fameuse nuit. L’on avait pas osé poser de question, seulement observer, et déduire. Les hommes avaient remarqué des choses étranges. Comme par exemple les cheveux de la jeune dame, si dorés quand elle avait rejoint leur rangs ; ils étaient désormais de la couleur du cuivre sale, d’un aubrun mordoré qui ne brillait pas. Loin de sembler toujours belle et raffinée, elle ressemblait désormais à une paysanne des Basses – terres, avec une robe coupée dans un tissu plus couteux, c’était l’unique différence. Même sa peau semblait plus sombre, plus terne, plus rêche. Elle n’avait plus rien d’angélique. Après une semaine de marche, ils arrivèrent finalement au croisement entre la Ligne des deux Capitales et les rives de l’Arianne. Le fleuve n’était pas si grand, et au loin on apercevait les hauts murs de Navaterre, capitale des Hautes – terres et principale ville commerciale du Grand Continent. Les biens connues grilles d’or qui couvraient la cité, ultime protection contre les monstres venus du ciel brillaient, et leur éclat parvenait aux yeux des voyageurs. La sorcière fixait l’horizon avec un sourire satisfait. Personne ne s’y trompait : elle avait de mauvaises intentions.
En quelques jours ils appareillèrent sur un minuscule bateau, tout juste assez grand pour emmener la fille et cinq des hommes du convoi. Les autres resteraient au campement. Encore quelques jours après, ils furent aux portes de la cité Jaune.

*

Il continua d’avancer, sinuant entre les arbres d’un pas marqué, le regard dans le vague. Il passa devant une femme aux cheveux courts et bruns qui lui emboita le pas ; cependant il ne lui adressa qu’un demi regard. Il accéléra le pas. Elle fit de même. Bientôt ils arrivèrent face un saule de taille admirable, ses longues branches tombant en rideau jusqu’au sol, telles des larmes végétales. D’un bras, il se fraya un passage. Il y avait un trou dans le tronc de l’arbre, et l’homme s’y engouffra sans hésiter, la femme toujours sur ses talons. Là, se trouvait un escalier dérobé que rien ne pouvait annoncer. Il descendit très vite jusqu’à se trouver devant une porte, peinte en nuances de rouges. C’était d’un gout contestable … Il l’ouvrit, et pénétra le premier dans le couloir sombre. S’en suivirent un dédale de salles, corridors et différentes cours sinistres, toutes privées de lumière ou seulement éclairées par de vagues bougies de tailles tout aussi discutables que la couleur de la porte. Et puis enfin, ils se trouvèrent tous deux devant une porte gigantesque, taillée dans le bois du saule et placée là, majestueuse et inébranlable. L’homme frappa deux coups. Puis un. Et il entra. Là, la femme et lui entrèrent dans la pièce la plus grande de toutes celles qu’ils avaient passé, richement décorée par une belle tapisserie, de somptueux tapis sur un parquet ouvragé, et des meubles entre bois et marbre, et des tableaux encadrés d’or, et des fauteuils couverts de velours. Plus de luxe que l’on pouvait en voir en une seule vie. Hormis des fenêtres, rien ne manquait à l’endroit – qui possédait même une cheminée ! Assis derrière un lourd bureau, un autre homme, blond, âgé vraisemblablement d’une trentaine d’années était plongé dans la lecture d’un très vieux manuscrit. A l’entrée des deux autres, il releva les yeux.

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- Jorah et Matilde, du conseil. Nous portons un message de Stéfan, gardien de la branche médiane du territoire vampire.
Le blond hocha la tête et esquissa un sourire.
- Vous attendez que je décline mon identité peut – être ?
Le nouvel arrivant s’empourpra.
- N-non monsieur.
Le vampire dans son fauteuil allait continuer mais la femme le devança, prenant la parole a son tour.
- Vous êtes H O’Kolldrics, le gardien de la branche sud du territoire vampire et grand Maître depuis peu. Tout le monde vous connaît.
H croisa les bras, amusé.
- Je vois ça. Il y a surement une chose que vous ne savez pas.
Le regard que lui lança Matilde voulait dire « quoi donc ? ».
- Pourquoi H ?
Il y eu un silence tendu pendant un instant. Puis le blond décida de passer à autre chose, sans fournir plus d’explications.
- Quel est le message ?
- Stéfan vous informe qu’une magicienne usant de vieux sortilèges est apparue sur le continent. Elle aurait mis en fuite la totalité d’un régime de chasseurs.
H plissa les yeux.
- Vieux comment, les sorts ?
Jorah sortit un petit morceau de parchemin cacheté et le tendit promptement à son supérieur.
- Très vieux, monsieur.
Le vampire brisa la cire refroidie entre deux doigts et lu rapidement le message inscrit à l’encre noire. L’air grave, il posa le papier sur son bureau. Puis il se leva avec lenteur, les yeux toujours rivés sur le message.
- Je vois. Je pars immédiatement pour Navaterre.

*

Dans la capitale, les gens se bousculaient dans les venelles, essayant de rejoindre l’une ou l’autre des différentes échoppes. Parmi la populace, un homme aux cheveux couleur du soir et une jeune femme aux boucles bronze avançaient sans réel problème. Leurs doigts enlacés paraissaient aux yeux des passants le signe évident d’un amour partagé. En réalité, point de romance ; il la tenait pour ne pas qu’elle s’échappe. Au détour d’un chemin, ils empruntèrent une ruelle déserte. Rare comme endroit. Après quelques pas, ils arrivèrent dans un jardin privé, et une maisonnette aux murs extérieurs tapissés d’or fin. Au dessus de la porte était apposée une plaque d’argent où était gravé « Sortilèges de l’Ordre Ancien ». Martin resserra sa poigne sur la fille, qui grimaça. Il poussa la porte.

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L'Ordre Ancien. Empty Re: L'Ordre Ancien.

Message  Invité Jeu 9 Oct - 0:10

Les pavés étaient couverts de boue. Une boue qui n'était plus qu'un souvenir ; la terre, fine, desséchée, ne dessinait plus que les marbrures liquides dans des contours secs et poussiéreux. Néanmoins, transparaissant sous les traces de roues, de sabots, et de pas, les pavés brillaient.

 Cependant, Claude gardait les yeux fixés sur le sol depuis si longtemps qu'elle ne les voyait même plus. Sa vue était brouillée. Ses longues mèches brunes retombaient sans cesse sur son front trempé de sueur, se balançant devant ses yeux tournés vers le bas. Elle avait cessé depuis bien longtemps de les rejeter en arrière, considérant que c'était peine perdue. De temps en temps, elle s'arrêtait pour remettre son fichu en place. Mais, immanquablement, la toile jaunâtre se détendait doucement, et les cheveux reprenaient impitoyablement leurs droits.

- On fait une pause ?

 Elle se tourna vers Annie. Elle avait du mal à reprendre son souffle, elle se contenta de hocher la tête pour répondre. Sans un mot, les deux jeunes filles s'éloignèrent sur le côté du chemin, franchirent maladroitement les fossés dans leurs robes, et se laissèrent tomber sur l'herbe qui bordait la petite route. Elles restèrent un instant silencieuse, respirant péniblement, la tête levée vers le ciel, leurs visages rougis par le soleil et par la marche. Au bout d'un moment, Claude demanda, d'une voix entrecoupée de respirations:

-T'as encore de l'eau, dans ta gourde ?

-J'y ai pas touché, comme tu m'as dit.

- Très bien. Prends la mienne, si t'as soif. On doit garder la tienne pour le reste de la journée.

 Annie hocha la tête, répandant instantanément une cascade de cheveux noirs qui enveloppèrent son grand corps maigre comme une cape.

Crénom ! S'exclama-t-elle avec énervement, s'empressant d'attraper la masse sombre et de l'entrelacer rapidement d'une main experte. Il faudrait vraiment qu'je coupe ça.

- Ce serait idiot ! Protesta Claude. T'as les plus beau cheveux du village !

-Pour c'que ça me sert, grommela l'autre.

 Mais elle attacha la tresse bien serrée avant de l'envelopper dans un morceaux de tissus beige, non sans s'être essuyé le visage avant.

- Alors, il reste combien de temps, tu crois ?

 Claude avait tiré de sa sacoche un morceaux de papier bruni. A présent, elle l'étalait précautionneusement sur la toile brune et grossière de sa robe.

- Attends, murmura-t-elle.

 Elle se pencha vers l'image qui colorait à présent ses genoux. Des lignes entrelacées, parcourus de signes à l'encre sombres et de points de taille différentes, surmontaient de maladroits griffonnages de montagnes et de nuages.

- Pas étonnant qu'Mr de Maistré l'ai achetée, pesta Annie, qui s'était penchée dans son dos pour voir. On dirait le dessin qu'on fait ses gosses sur les murs quand y sont venus visiter la ferme, l'autre jour !

- T'éxagères, marmonna Claude, l'air absent, un doigt posée sur l'une des lignes.

- J'te jure, et j'en sais que'qu'chose. C'est moi qu'ais tout nettoyé.

- Une heure, fit soudain la brune en relevant brusquement la tête.

- Claude ! Tu m'écoutes jamais !

 Annie se laissa tomber en arrière. Elle n'alla pas jusqu'à s'allonger dans l'herbe ; si elle tâchait ses vêtements, elle en serait pour ses frais.

- Désolée, fit l'autre avec un sourire d'excuse. C'est juste que j'ai besoin d'me concentrer pour trouver notre route. J'sais pas lire les cartes, moi.

- Encore heureux ! C'est pas comme si ça pouvait servir.

 La grande fille frissonna, se retourna . Au loin, très loin, dans la lumière brûlante du soleil de début d'après midi, le début d'une tâche sombre.

- J'me sens pas bien hors des murs, murmura-t-elle. Ces saletés de bestioles peuvent sortir de n'importe où. Et puis, c'est tellement bizarre, de pas avoir une bonne vielle grille au dessus de la tête. On a l'impression que ça va nous tomber dessus à tout moment.

- Moi, j'aime bien , observa la plus petite.

 Elle avait dénouée son fichu, et resserrait lentement sa tresse d'un brun clair, sans regarder ses mains qui s'agitaient rapidement, les yeux fixés au loin, vers la tâche sombre.

- C'est parce que t'es bizarre, Claude. T'as l'habitude. Toi, le Maistré n'a pas été tendre avec toi. J'arrive pas à croire qu'il t'ai fais sortir du village, ramasser du bois mort,à l'entrée de la forêt, sans protection.

- Il n'y a pas d'attaques de vampires, par ici,  fit Claude en haussant les épaules. Il paraît même que personne a jamais vu d'anges entre ici et le bourg d'à côté. De toute façon, tant qu'tu t'enfonces pas, tu risques rien. Et puis s'il envoyait une protection, ça servirait à rien. Et ça coûterait cher.

- Oui, mais je vois pas pourquoi il s'acharne sur toi, insista la fille aux cheveux noirs, l'air soucieux.

 Ce n'était pas une question vaine. Oui, pourquoi, quand on envoyait dix hommes armées pour aller ramasser quelques troncs morts à l'entrée d'un bois et se sauver à la va-vite lorsque le travail était fait, mr de Maistré envoyait-il l'une de ses filles de fermes, seule, toujours la même, pour s'aventurer un peu plus loin ramasser les branches mortes ?

- C'est parce que j'coûte rien. Regarde moi : j'suis pas la meilleure des gens qui travaillent, ici. J'srais pas une grande perte.

 C'était un fait indiscutable. Un petit sacrifice pour un gros bénéfice. Après tout, le bois valait très cher, par ici. Ce n'était pas comme si on avait pu en faire pousser pour soi, les créatures les habitaient dès qu'il poussait un germe, disait-on. Quand à aller chercher dans la forêt, c'était bien sûr hors de question. Alors, les êtres humains avait trouvé autre chose. On cuisait la nourriture avec un minerai noir dont les nains se servait, qui sentait mauvais en brûlant, mais aux odeurs duquel  des générations d'hommes et de femmes avaient habitué leur nez. On chuchotait, dans le village, que les nains vendaient le pire minerai de chauffe qu'ils avaient. On racontait que les grandes villes avaient du bois, elles. Le nom de la Ville Jaune passait sur les lèvres pincées. Et on regardait avec admiration et envie les colliers de bois que portaient la femme de Monsieur de Maistré, les fines décorations de branchages qu'il avait fait construire dans sa maison. Tout le village avait rêvé de s'asseoir sur le tabouret en bois sur lequel il lui arrivait de trôner fièrement, le soir, contemplant les étendues de ses champs qui allaient si loin que l'on voyait à peine les murs , au loin.

- C'est pas vrai ça Claude, répondit mollement Annie.

 Claude sourit, mais sans se faire d'illusions. Sans doute la grande maigre n'en pensait elle pas moins. La brune était habile de ses mains, certes, et elle accomplissait ses devoirs. Mais elle ne le faisait pas mieux que tout le monde, et il lui arrivait de disparaître des heures entières sans qu'on sache ce qu'elle faisait. On lui trouvait le visage mutin, l’œil espiègle, on la chuchotait menteuse, elle aurait des secrets . Et puis, elle était si étrange, cette gamine, à sortir dehors sans crainte, à ne pas aimer comme tout le monde sentir sur elle la bonne ombre d'une épaisse grille rassurante ou d'un mur de pierre lourde. Pour son employeur, sans aucun doute, elle n'était pas la meilleure affaire. Tout le contraire d'Annie, une grande enthousiaste qui travaillait de son mieux, et dont le sourire lisse et sans faille ne laissait pas de place au doute. Certes, elle était bien maigre pour les travaux des champs, mais ses bras osseux portaient sans trop de souci les lourds seaux d'eaux et tout le monde était bien content. Entre les deux, le choix était vite fait. Et elles étaient les deux seules filles de fermes de monsieur de Maistré. Les autres employées disparaissaient à la tombée du jour, dans leurs maisons, au village. Ce n'était pas la même chose pour elles, qui habitaient là, dans une petite pièce sombre qu'elles se partageaient, où elles usaient leurs yeux sur des travaux à terminer. Mais après tout, elles lui appartenaient.

- Tu crois que la ville Jaune ressemble à quoi ? Demanda-t-elle pour changer de sujet.

- Alors là... !

 Les yeux d'Annie se mirent à briller, elle se redressa, l'air enchanté.

- C'est immense...Les murailles sont très grandes comme chez nous, mais pas de champs, ah, ça, non ! Ils ont des villages tout autour, pour ça ! Non, c'est des tas, des tas de maisons et de palais. Les bâtiments vont très très haut ; les murs sont immenses. Et bien épais ! Même habiter à côté, ici, c'est du luxe. Et puis quand tu regardes le ciel, c'est magnifique et brillant...Avec ces grilles en or. En or !

 Elle sourit rêveusement.

- Là bas, tu as pleins de choses...Des boutiques, partout...Du théâtre...Des gens de la ville...Ah ! Les gens de la ville.

 Elle se regarda, circonspecte.

- Je suis sûre qu'ils sont mieux habillés qu'moi.

 Claude éclata de rire.

Bah, tu te couseras quelque chose, fit elle.

- Non mais tu comprends pas. Annaëlle m'a raconté que là-bas, les robes des dames sont couvertes de diamants...Et quand elles marchent, ça ruisselle tout autour...Comme ça !

 Elle se releva, et esquissa un pas de danse qui fit pouffer la brune.

- Et puis, il y a tous les animaux qu'on a pas ; ici. Il paraît qu'il y a un grand Jardin … (elle parut chercher ses mots) … Zoologique quelque part, il faut qu'on y aille. Enfin...C'est pas comme si on pouvait y aller...

- Oh, tu sais, c'est pas si grave, en plus, je parie qu'ils ont juste quelques Changeformes, et comme ils aiment pas être enfermés, ils ont pris l'apparence la plus ennuyeuse possible, comme l'an dernier, quand le marchand est v'nu au village.

- Non, non, ils doivent aussi avoirs des Tarentula, des Guhrabans, des Khanénides, des Orillais...On m'l'a dit. T'sais comme c'est beau ? J'aimerais vraiment en voir, ah ça oui.

 Elle s'arrêta, rêveuse, son visage à mi-chemin entre un large sourire et une tristesse mal contenue. Claude la regarda, avant de murmurer :

- T'as raison...

 Sa main vérifia discrètement la poche de sa robe. Oui, sous le tissu rêche, elle sentait encore le rouleau de grosses pièces qu'elle avait recueilli. Combien y avait il de chances pour que Mr de Maistré oublie un rouleau d'argent dans l'une de ses vestes avant de les leur donner à laver ? Combien y avait-il de chance pour que lui, l'avare, ne s'interroge même pas sur leur disparition, ne la remarque pas même ? Annie avait déjà eu pareille chance ; mais c'était toujours des pièces vieilles tombées dans la boue d'un champ, ayant roulé au fond d'un puits, qui n'appartenaient plus à personne depuis longtemps. Là, elle avait trouvé tout un petit tas, coincé au fond d'une poche de veste.

 C'était un soir d'hiver, ils faisaient très froid, et mr de Maistré leur avait annoncé qu'il ne le restait plus que quelques légumes pour leur repas. Les récoltes n'avaient pas été très bonnes, et leurs rations réduites en conséquence. Cela faisait un mois que Claude ne mangeait presque rien. Elle devait fournir un effort considérable pour rester debout ; et souvent lorsqu'elle se relevait un peu trop vite, ses yeux se voilaient de noir et elle avait le tournis. La faim lui dévorait le ventre. Elle connaissait les risques, mais sa main avait malgré tout agrippé les pièces, avant de les jeter précipitamment sous son tablier. Juste un peu. Elle était désespérée : Dieu la punirait, elle le savait. Le prêtre le disait souvent, au catéchisme. Le mot de péché résonnait dans la petite pièce où l'on entassait l'orphelinat pour l'enseignement. Ses grands yeux terribles se posaient sur chacune des enfants , qui frémissaient.  Mais son ventre était vide et elle n'arrivait plus à penser tant ce vide était présent et constamment douloureux. Juste un peu... Le regard tremblant, les mains crispées, elle avait baissé la tête vers son ouvrage, consciente de son crime.

 Elle s'était maudite, après. Et si c'était un piège ? Et si mr de Maistré se servait du prétexte pour baisser sa ration de nourriture , ou pire ? Enfin, il n'irait tout de même pas jusqu'au vrai pire. Celui qui vendait au marchand était mal vu, dans le village. On voyait la bonne marchandise partir au loin ; on grognait. « Elles sont bien de chez nous, pourtant. » Imaginez tout ça servir pour des nobles, des richards qui ne sauraient plus qu'en faire ! Le marchand n'était acclamé que quand il ramenait. On le regardait partir avec des soupirs, quand il tenait dans sa carriole deux-trois bonnes choses qu'on voulait se garder pour soi. Ceux qui vendaient étaient assez mal vus. On préférait faire des affaires tranquilles, entre nous. C'était toute l'étoffe de la bonne camaraderie de campagne.

 Mais elle avait eu peur. Elle s'était arrêté vingts fois devant la boulangerie en rentrant, ou chez le boucher. Un petit quelque chose , oh, ça ne se verrait pas . Mais les ragots traîneraient, la boulangère raconterait que la petite bonne de Maistré achetait de la nourriture au rabais, tout ça reviendrait aux oreilles du concerné, et la punition serait terrible. Elle avait détourné les pieds, tristement, l'argent gelé roulant encore et encore au fond de sa main, sans s'arrêter.

 Mais aujourd'hui, il n'y avait plus de boulangère. Ni de boucher. Il y avait juste la gentille Annie, qui avait déjà partagé avec elle quelques larcins alors qu'elle était d'une maigreur affamée. Et Claude l'avait décidé, comme un petit contrat avec Dieu, dont elle devinait la réprobation, plus que tout, marquée au fer rouge sur sa peau brunie par le soleil, luisant. Elle ne garderait rien de cet argent, ce fichu argent, il disparaîtrait dans la poche d'un marchand quelconque,et tout irait bien, ce serait joyeux. Ce serait une bonne surprise pour Annie.

_ En tout cas, conclut cette dernière, 'vaut mieux pas qu'on traîne. Une heure, et on arrive à la prochaine étape.

- C'est vrai.

 Claude se leva, non sans avoir précautionneusement rangé la carte dans sa robe. Puis elles partirent.

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L'Ordre Ancien. Empty Les premiers pas d'un épuisant voyage.

Message  Invité Mar 18 Nov - 1:08

A l’intérieur, il faisait plus sombre que dans une grotte. Il ne fallut que quelques instants a la jeune femme pour comprendre qu’il s’agissait d’un sortilège. Elle sentait contre sa peau le souffle électrique de la magie qui lui donnait la chair de poule. La porte s’était refermée d’elle même quand ils étaient entrés, Martin et elle. Ils ne s’en étaient pas vraiment étonnés. Cet endroit respirait le surnaturel.

_ Tu devrais peut – être me laisser faire ?

L’homme fit claquer sa langue sur son palais pour signifier son désaccord.

_ C’est hors de question. Tu crois que je vais risquer que tu me files entre les doigts ? Surement pas.
_ Si je te promets de …
_ Je sais ce que valent tes promesses.

Il avait dit ça d’une voix sèche. Ils n’osaient pas trop bouger dans cette épaisse bouillasse d’obscurité. Ils avaient peur de ce sur quoi ils auraient pu tomber. Un silence désagréable s’installait entre eux, lentement, s’étalant dans le noir, presque assez tangible pour pouvoir voir les ramifications de non – dits telles des racines qui courraient dans le vide. Martin toussa.

_ Tu n’as pas le droit de m’en vouloir encore, protesta la sorcière d’une voix fluette.

Le voyageur lui répondit par un soupir.

_ Oublies ça, tu veux ?
_ Non, toi oublies ! Tu crois vraiment que ça sert à quelque chose ?
_ Et toi tu penses que j’ai envie d’en parler ?

Elle ne répondit rien. Il y eu un nouveau silence.

_ Tu es parti le premier, je te rappelle.
_ J’ai dit que je ne voulais pas en parler.

Un vif courant électrique traversa soudainement les deux jeunes gens, leur faisant pousser un cri entre surprise et douleur. En un instant la pièce s’éclaira totalement d’un feu doré. Ils plissèrent les yeux le temps que ceux – ci s’habituent. Autour d’eux, c’était ce qui ressemblait à une boutique de bric – à – brac dont les murs étaient vraisemblablement tapissés d’or. C’était étrange comme endroit. Les étagères étaient pleines de bibelots en tous genres, de livres qui semblaient vieux comme le monde, de fioles aux contenus plus que douteux. Ici vit un sorcier, pensa immédiatement la rousse. Le voyageur et elle étaient bouche bée devant le spectacle. Soudainement, une étagère devant eux se décala lentement sur la droite. C’est alors qu’ils remarquèrent qu’aucuns des meubles ne touchait le sol. En fait, eux non plus n’avaient pas les pieds sur le plancher, car en réalité, de sol il n’y avait pas ! En dessous, un bassin d’eau claire faisait office de parquet. Dans l’eau ils pouvaient voir différentes espèces de poissons, plus ou moins gros, et plus ou moins effrayant. La jeune femme poussa un petit cri de surprise en voyant ce qui semblait être un grand requin blanc glisser juste sous ses pieds ; elle se réfugia dans les bras sécurisants de son ami. C’est alors qu’un rire inattendu leur fit tourner la tête. A la place de l’étagère face a eux une seconde plus tôt se tenait un homme à la peau marquée par le temps. Il avait de grands yeux noirs et le sourire malicieux de celui qui a su rester un enfant dans son cœur. Il observait d’un œil bienveillant les deux jeunes gens.

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_ Impressionnés ?

Ils ne répondirent tout d’abord rien, un peu sous le choc. L’homme s’approcha doucement.

_ Il ne faut pas, susurra – t – il en regardant la sorcière droit dans les yeux, vous êtes tout à fait capable de maintenir un tel sortilège vous même, n’est ce pas ?

La jeune femme secoua la tête, toujours sonnée.

_ Mh, vous y arriverez.

Le bruit du verre qui se brise attira les regards. Sur le plateau d’une des étagères, une petite chose couverte de plumes aux couleurs chatoyantes observait le sol d’un air dépité. Elle releva le visage vers le petit groupe et lâcha un pauvre sourire en haussant les épaules.

_ Désolée Raphaël …

La chose avait parlé. La rouquine se dégagea de l’étreinte de martin, médusée. Que pouvait bien être cette chose ? Elle s’approcha en la dévisageant. Ca avait un visage au milieu d’un plumage qui couvrait un corps humanoïde. La peau était brune, sombre comme la terre après la pluie. Là dedans se découpaient deux yeux si grands qu’ils ne laissaient la place qu’à un nez si petit et une bouche si fine qu’ils étaient presque inexistants. Ses grands iris violets observaient la jeune femme en retour, calmement. Dans son dos, si on y faisait très attention, on pouvait voir comme un vague éclair bleuté, et si l’on tendait suffisamment l’oreille, on pouvait même entendre une sorte de bourdonnement. Ça avait des ailes ? Serait – ce …

_ Tu es une fée ?

La petite chose joignit ses mains – pourvues de trois doigts seulement – devant sa petite poitrine et se mit à rire.

_ C’est vraiment une fée, fit la rousse en se retournant soudainement, ça existe pour de vrai ?

Le – dit Raphaël semblait amusé. Il hocha simplement la tête. La petite voix de ce qui était vraisemblablement une fée s’éleva de nouveau.

_ Bien sur que je suis une fée, ça t’étonne ? Tu es pourtant bien une sorcière, toi, Cleya.

L’interpellée fit volte face pour observer le petit être. Serait – elle plus grande qu’une main ? Je n’en ai pas l’impression…

_ Oui mais moi c’est différent, je veux dire la magie c’est… Mais attends ! Comment connais – tu mon nom ? Je ne te l’ai pas dit !

La petite chose s’envola. En une seconde elle se mit à papillonner devant le visage ahuri de la sorcière.

_ C’est parce que je suis une fée ! Ce que je veux savoir sur toi, je le devine !
_ C’est impossible …

Le même rire amusé s’échappa d’entre les lèvres du sorcier.

_ Ah tu crois ça ? Alors tu seras bien étonnée de voir tout ce dont Claire est capable !

Claire ? Comment une telle chose pouvait avoir un nom aussi … Normal ?

*

Le voyage pour rejoindre la route principale avait duré près de deux semaines. Evidemment, ils auraient été plus rapides a pied, mais le poste de gardien comportait  certaines règles que l’on se devait de respecter. Aussi H avait, comme la tradition le voulait, fait apprêter les calèches pour lui, Mathilde et Jorah. Les représentants du Conseil de la branche médiane partageaient la leur. Les jours passèrent donc lentement, solitaires, pour le gardien. A l’orée du bois, il eu tôt fait de trouver un dresseur de dragons. L’homme en avait miraculeusement trois, et il fut vidé de son sang en guise de paiement. Sur le dos des monstres, rejoindre la branche médiane fut très rapide. En quelques jours seulement, ils se posèrent à l’endroit même où avait eu lieu l’attaque quelques semaines plus tôt. Les yeux des vampires se mirent à rougir doucement, et à les piquer. La magie n’avait pas encore tout à fait quitté le lieu. H pensa que c’était une bonne nouvelle. Si la fille ne savait pas garder sa magie, c’est qu’elle était très jeune, et ne savait pas réellement s’en servir. Cependant, pour que les effets soient toujours aussi forts après tant de temps signifiait qu’elle devait être véritablement puissante. Il soupira. Déjà ses compagnons de voyage l’appelaient depuis les abords du bois. Il les observa un instant, puis jetant un dernier regard aux énormes reptiles ailés qui se demandaient s’ils allaient vraiment pouvoir s’échapper, il décida de les rejoindre. Autant ne pas trainer ; et puis après tout, cela faisait bien longtemps qu’il n’avait plus parcouru les couloirs de la cité du Passage.

Tout était exactement comme dans son souvenir. Les vampires pouvaient faire de grandes choses, mais ils avaient une tendance à la stagnation plus qu’évidente. Malgré tout, c’était agréable, car partout où ils étaient allés une fois, en y revenant ils s’y sentaient chez soi. L’endroit ne ressemblait en rien aux réseaux de la branche Sud. Ici les couloirs et les différents halls étaient pleins de monde, pleins de voix, de rires et de chants. Le silence n’existait pas. Jour et nuit l’on s’amusait, c’était l’effervescence. H se sentait bien mieux dans des endroits comme ceux – ci. Après tout, lui et son frère avaient été élevés à la capitale, dans des dédales souterrains surpeuplés. Leur vie à cette époque était rythmée par les fêtes, la musique à chaque instant, et le cocktail magique qui combinait le sang et les femmes. Partir pour Androginia avait était une réelle punition. Cependant avec les siècles il avait appris à s’assagir et à apprécier le silence qui meublait les heures. Surement que son frère ne devait pas connaître ça. Victor était Roi désormais, et sous son autorité la dynastie qu’avaient bâtit leurs aïeux avait sombré en un temps record. Cependant personne n’avait jamais véritablement tenté de le défier, tant les représailles qui suivaient à sa fureur étaient meurtrières. Il avait été nommé Victor le Cruel par ses pairs. Ceux – ci étaient bien sur morts peu après, mais le nom était resté. Ruminant ces souvenirs, H zigzaguait entre les gens, guidé par Mathilde. L’autre vampire les avait laissés au détour d’un couloir. Bientôt ils furent devant une porte plus belle que les autres. Elle était d’un bois différent, très clair, presque blanc, et finement sculpté. Elle semblait plus épaisse aussi. Et terriblement lourde. Pourtant la brune en poussa les battants avec une facilité déconcertante. La salle dans laquelle ils entrèrent n’était plus un salon bondé. L’endroit était spacieux, et pour une fois presque totalement vide. A l’exception d’une table ronde et d’une dizaine de chaises, il n’y avait rien. Les trois hommes assis à la table relevèrent les yeux en même temps quand les portes se refermèrent. L’un d’entre eux, celui aux cheveux blonds, fendit son visage pale d’un large sourire.

_ Bonsoir mon frère ! As tu fais bon voyage ?
_ Victor, s’étonna H, mais que fais – tu ici ?!

Pour une surprise, c’en était une de très mauvais gout. Depuis quand le Roi quittait – il le siège du Conseil, ses bals et ses dévouées amoureuses d’un soir ? Cela ne lui ressemblait pas, surtout s’il s’agissait d’une histoire sérieuse.

_ Mais comme toi mon cher frère, je viens sauver notre peuple d’une mort certaine !

Il avait le don de tout tourner à la dérision. Pourquoi devait – il être si énervant ? Rapidement, H rejoignit le groupe. Il salua un homme qu’il reconnu comme étant le Conseillé du Roi, puis Stéfan qui le regardait avec l’air de vouloir mourir. Victor était – il aussi insupportable que l’on pouvait penser ?

_ Nous ne sommes pas en danger pour le moment.
_ En es – tu certain ?
_ J’ai senti sa magie, elle ne la maitrise pas encore assez bien pour nous causer du tord. Et maitriser la magie de l’Ordre Ancien  est l'histoire d'une vie.

Le blond grimaça. Son frère semblait plus renseigné que lui, il ne fallait pas laisser passer ça.

_ Rien ne le prouve, cependant.
_ Peut – être, mais nous serions bien malchanceux d’avoir vu naitre une nouvelle prêtresse de l’Ordre sans avoir pu faire quoi que ce soit pour l’empêcher de nous nuire.
_ C’est pourtant une possibilité.
_ Que fais – tu là, Vikky, les décisions de cet acabit ne sont pas à ta hauteur.

Le Roi fronça les sourcils.

_ Ne me parle pas comme ça.
_ Tu ne sors jamais de tes salons, et c’est bien mieux comme ça pour notre royaume, croit m…

H n’eut pas le temps de finir sa phrase. Une poigne de fer lui enserrant le cou le maintenait maintenant soulevé du sol contre un mur. Victor avait l’air en colère. Derrière les deux frères, Stéfan et le Conseiller s’éloignèrent discrètement. Les yeux plongés dans ceux de son ainé, Victor se mit à gronder.

_ Si tu me retrouves pour me traiter en moins – que – toi, sache que je ne te laisserais plus jamais faire. Ne t’avise surtout pas de retenter l’idée de me dénigrer devant qui que ce soit, ou ce n’est pas dans la branche morte du territoire vampire que je t’enverrais, mais directement en Enfer ! Si tu ne crains pas ta sorcière Lumineuse, va donc me la chercher dans Navaterre, et ne reviens pas sans elle.

Il relâcha H qui s’éloigna a vitesse vampirique vers la porte sans se faire prier.

_ Je la veux en vie ! ajouta – t – il dans un cri.

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Message  Invité Sam 22 Nov - 1:30

Les arbres ont toujours quelque chose de fascinant. Claude le pensait. Elle ne pouvait pas en détacher les yeux facilement. Jamais. Les grands troncs sombres s'élançaient vers le ciel, s'étoffaient peu à peu en milles divisions qui supportaient des centaines de feuilles qui se perdaient dans un mélange écailleux. Il n'y en avait pas un de pareil. Et surtout, ils étaient rares.

- Il y a un arbre.

 La voix d'Annie était tremblante, minuscule, comme le chuintement du vent qui s'était levé en bourrasques encore faibles qui tordaient leurs vêtements dans tous les sens.

- Je sais, Annie, répondit Claude.

 Il y avait environ une  heure qu'elles marchaient en direction de l'arbre. Le ciel était sombre, plein de nuages gonflés d'orage. Elles ne voyaient pas grand chose. Au départ, elles avait pensé à une de ces tours où vivaient les oiseliers, qui servaient d'étapes aux vols pour le courrier. Mais plus elle s'étaient approchées, et plus il leur avait paru que c'était un poteau, oublié là quelque part, pour une raison mystérieuse, peut être une idée de mur abandonné. Enfin, elles étaient arrivé plus près, et malgré les nuages et le vent qui cinglait leur paupières, les obligeant à baisser les yeux, elles avaient vu.

- C'est un arbre, Claude.

 Annie n'avait pas bougé depuis un moment. Son visage, d'ordinaire au teint plutôt mat, avait blanchi. Ses yeux étaient fixés sur l'arbre. Immobile au milieux du vent qui agitait ses jupes et ses cheveux déjà échappés du tissu, elle avait l'air d'une de ces images de tragédies que l'on voyait peinte à l'entrée des théâtres.

- Il n'y en a qu'un seul, Annie. Je n'en vois pas d'autres.


 Claude sentait cependant son pouls s'accélérer tandis qu'elle contemplait la plante, qui se tenait là, sans disparaître, impitoyablement présente au milieu des flots d'herbes hautes et de buissons de ronces.

- Claude, ça suffit, un seul !

 Annie vacilla, recula d'un pas, puis d'un autre.

- S'il y a un arbre, c'est qu'y a une forêt, pas loin.

- Mais regarde, il y a pas de forêt, Annie !

 Elle tendit les bras comme pour englober ce qui les entourait. Dans l'après-midi sombre et rugissante, des collines mouvantes percées ça et là de rochers ou de buissons. Un seul arbre, là-bas, sur la montée qui leur faisait face, près du chemin.

- Si c'est un arbre, 'y a une forêt !

 La jeune fille jeta un regard d'effroi à son amie, la respiration précipitée.

- Non, attends, calme toi, tenta Claude, on est dans le bon chemin, regarde.

 Elle sortit doucement le papier de sa robe, le tendit tant bien que mal devant elle, malgré les bourrasques qui tentaient de le lui arracher. Ses yeux sombres parcoururent les lignes sur lesquelles ils s'étaient usés tant de fois depuis qu'elles avaient quitté les larges murailles de leur petit village. Non, elles étaient dans la bonne direction. D'après la carte, quatre heures de marche, et elles seraient à la Cité Jaune.

 Sauf qu'il n'aurait pas du y avoir d'arbre près d'une route aussi proche de la Cité Jaune.

 L'adolescente releva la tête, le visage concentré. Ce n'était pas normal. Quelque chose n'allait pas. Mais elle avait suivi la route, exactement. Elle savait qu'elle ne s'était pas trompée. Elle avait tellement regardé la carte ces dernières heures qu'elle l'avait un peu déchirée aux coins, alors qu'elle savait combien il était important qu'elle ne l'abîme pas.

- Qu'est ce qu'on fait?

 La voix d'Annie était très basse, et c'est à peine si Claude l'entendit à travers le murmure de plus en plus fort du vent qui les entouraient.

- Je ne sais pas, Annie, je sais pas...

 Elle rangea la carte dans ses vêtements, se tourna vers l'autre.

- On devrait continuer, mais...Cet arbre, c'est vrai que...Y doit y avoir une erreur...Je comprends pas...

 La fille aux cheveux noirs lui jeta un regard désespéré.

- C'est pas possible...Les gens qu'on a croisés nous ont dit qu'on était près d'la Cité Jaune...

- Oui, enfin...Ça, c'était y a deux jours...On a pas mal bougé depuis. Y a eu des croisements.

- Alors on r'tourne en arrière ?

- J'imagine...Si seulement j 'savais lire...Mais si on suit la plus grande route...Ca d'vrait aller.

- Mais...On va être en retard!

- Je sais, Annie, mais on peut rien y faire.

  Elle jeta néanmoins un regard à sa main. L'on aurait dit qu'une coulée de fer s'y était logée pour créer des formes complexes. Dans quelques heures, les signes d'acier brillant rougiraient progressivement, et elle sentirait sa main la brûler, comme si elle avait touché une casserole un peu chaude. Sauf que la casserole chaufferait, encore et encore, et que l'argenté liquide s'étendrait sur sa peau en s'étirant en longs filaments, jusqu'à ce qu'elle soit enfermée dans un sarcophage brillant et chauffé à vif. Elle sa peau ne serait pas brûlée, non, mais elle la sentirait tout de même rougir et se racornir indéfiniment . Le seul moyen d'empêcher cela était de poser la main sur la large plaque de métal qui se trouvait à l'entrée de la Cité Jaune. Tout avait été calculé. Monsieur de Maistré avait chuchoté ses ordres au métal vivant, et si elles n'arrivaient pas à temps à cet endroit, pour toucher cet autre métal-là, alors la chose se mettraient en route.

- Je...Et si c'était prévu ?

- Quoi ?

- Qu'on passe près d'un arbre. Si c'était la carte pour un raccourci ? Si c'était par là qu'on d'vait passer pour y aller ?

 Annie avait aussi jeté un œil à sa main, et à présent ce n'était sans doute plus l'arbre qui faisait frémir son visage inquiet.

- Monsieur de Maistré a aucun intérêt à c'qu'on se trompe et qu'on arrive en retard. Il nous a quand même pas donné une fausse carte. Il a juste dû s'en ficher qu'on passe près d'un arbre.

- Mais Annie ! Un arbre, si près de la Cité Jaune ?

- Tu sais bien à quelle vitesse ça pousse. Il est pas bien grand. Six ou sept mètres. Ça doit faire deux mois.

- Et personne ne serait passé par là en deux mois ?

- Je l'ai vu faire, Claude ! Il a calculé à partir de la carte. Et il sait où c'est, la Ville Jaune. Alors il peut pas s'être trompé. C'est peut être une nouvelle idée d'ces fous qui croient qu'il faut étudier les arbres, comme si un truc risquait pas d'y venir.

- Oui, mais, ou alors, c'est un chemin impraticable, et on est pas censées pouvoir y'aller, et on a rien vu parce que le panneau...

- Y'aurait eu une barrière ! Fit Annie.

 Elle observa de nouveaux la marque dans sa paume, puis inspira résolument.

- Ça peut être que ça. On peut pas juste se balader sans savoir où on va, Claude. Sinon, on est fichues.

 Claude hésita un instant. Cet arbre était étrange, c'était vrai. D'un autre côté, l'hypothèse que monsieur de Maistré prenne le risque de mettre en retard celles qui devraient aller acheter les pousses de buissons fruitiers, alors qu'ils étaient si demandés, et que le prochain arrivage était attendu avec impatience...Ça n'avait pas de sens. Elle soupira, et finalement, sourit à Annie, rassurante.

- T'as raison. Et puis, c'est jamais qu'un arbre. J'en ai vu d'autres. Un seul, ça fait rien.

- J'espère bien, Claude. Franchement.

 Elles se remirent en marche, lentement, Annie à la suite de Claude, leur attention captée par les feuilles tremblantes sous la poussée du vent. Leur pas ralentit encore comme elles amorçaient la montée de la colline. Elle était haute, la pente assez abrupte, l'arbre se dressant presque tout en haut, à son sommet. Claude comprenait pourquoi elles avaient rencontré si peu de passants, alors qu'elles étaient vraisemblablement près de la Cité Jaune. Ce genre de route fatiguait inutilement les montures et faisait dangereusement pencher les carrioles. D'ailleurs, elles aussi, à moins que ce ne soient les bourrasques de plus en plus fortes qui les fassent chanceler, et les pierres qui roulaient près de leur pieds  et les déséquilibraient. Mais elles n'avaient pas le temps d'attendre. Elles n'avaient pas de temps du tout. Il fallait se dépêcher. Leurs pas accélérèrent, et les yeux rivés sur l'arbre, elles avancèrent à toute allure. Claude en avait déjà vu, pourtant. Mais, il est, vrai celui-ci était si étrange, là, tout seul, si incongru, et puis, même si elle savait qu'un arbre tout seul, ça n'avait jamais rien fait, elle ne savait pas si ça ne ferait pas quelque chose dans l'avenir.

 Elles y étaient. Les racines de l'arbre, parallèles à leur pieds, à peine éloignée de la surface terreuse du chemin. Toutes deux se figèrent, une seconde. Attendant. Il allait se passer quelque chose. C'était obligé. Elles ne pouvaient pas s'empêcher d'attendre, de s'accorder une pause, avant de franchir la limite invisible, avant que ça ne déferle. Les créatures. Puis elles avancèrent...

 Rien. Rien ! Claude se tourna vers Annie, le visage éclairé par un large sourire.

- Annie, c'est bon, tu vois !

- Je le savais , sourit la fille aux cheveux noirs, et, reprenant sa marche d'un pas tranquille : on ne s'est pas trompées, quatre heures de marche,et -

 Sa voix se bloqua d'un coup dans sa gorge.

- Oh, non...

 Il n'en fallut pas plus pour que Claude se retourne, immédiatement. Elle s'attendait à presque tout – un feu-follet, un changelin, un essaim de lucioles-contre-la-mort, un Envieux...- mais pas à cela. Devant elle, apparaissant de l'autre côté de la colline où elles étaient montées, en contrebas, s'étendait une marée de feuillages frissonnants, à perte de vue, dont elle entrapercevait les troncs tout proches. Une forêt.

- Non !

 La voix d'Annie se transforma en cri, un cri qui diminuait comme elle reculait, reculait de plus en plus, fuyait, enfin, sans nul doute terrifiée. Mais ça, Claude ne pouvait pas le voir. Elle ne parvenait plus à bouger. Elle avait beau supplier son corps de faire demi-tour, de s'éloigner, de partir en courant, rien à faire. Elle n'y arrivait pas. Elle ne pouvait que fixe la forêt mouvante, là-bas devant elle. Elle ne pouvait même pas ouvrir la bouche, même pas faire trembler ses cordes vocales. Seules les gifles que faisaient cingler le vent sur sa peau nue et ses cheveux, son cœur, qui cognait à toute volée contre sa poitrine, et ses pensées qui tourbillonnaient pour essayer de comprendre, lui rappelaient qu'elle était en vie.

- Il me l'avait dit.

 Elle ne pouvait pas tourner la tête, mais elle perçut immédiatement la lueur blanche qui éclaboussait le sol, tout près d'elle. Et surtout, elle entendit la voix, une voix incroyable, quelque chose qu'elle n'avait jamais entendu auparavant, une sorte de mélodie, oui, jamais elle n'aurait deviné que c'était une parole si ce son indicible ne s'était pas coulé dans des mots qu'elle pouvait comprendre. C'était comme si une musique exceptionnelle s'était jouée là, un instant. Elle aurait presque pu en oublier qu'elle était prisonnière de quelque chose qu'elle ne pouvait même pas voir.

- Il y en aurait une devant l'autre. Et c'est celle là qui serait pour moi. Je ne croyais pas que c'était possible, que cela arrive vraiment. Enfin, si j'avais eu à choisir, le résultat aurait été le même.

 La lueur blanche s'intensifia, entra toute entière dans le champ de vision de Claude. Elle entourait en vérité un corps, celui de la personne la plus magnifique qu'elle avait jamais vue. On aurait presque pu dire un être humain, si ce mot ne paraissait pas presque vulgaire, petit, incapable de décrire la supériorité qui émanait toute entière de lui. La peau de cet être semblait constituée de lumière, une lumière sans violence, mais d'un éclat que rien ne venait altérer. Son corps était grand, musclé, mais non, ce n'était pas ça qui le rendait si beau. En vérité, Claude aurait pu le jurer, il était exactement comme il le fallait, oui, c'était cela, tout, du plus petit grain de sa peau jusqu'à la façon dont il se tenait, on aurait dit que cela avait été mesuré, calculé,  précautionneusement, pour que tout soit exactement juste comme il fallait que cela soit. Tout, jusqu'à son visage, aux traits réguliers, encadré de mèches toutes aussi lumineuses que le reste de son corps, était également comme cela, tout était à la bonne place. Habillé d'un voile blanc irréel qui flottait autour de son corps incroyable, entouré de la lumière d'un blanc doux qui émanait de lui, il souriait d'un sourire si pur qu'il aurait pu faire monter des larmes d'émotion aux yeux du pire des tyrans. Parfait. Il était tout simplement parfait. Parfait à en crever.

- La plus courageuse des deux. J'aurais pu le deviner même si tu n'étais pas passé devant. Et puis, c'est toi qui porte mon dût.

 La perfection incarnée s'approcha d'elle, d'un pas mystérieux qui ne semblait pas toucher le sol. C'était incroyablement beau. Elle sentit une larme couler sur sa joue paralysée. Elle savait. Elle savait ce qui allait se passer.

 L'ange sourit, d'un bonheur léger qui l'eût embelli un peu plus, si cela avait été possible.

- Je le lui avait dit. Que je voulais qu'il te fasse sortir. Elles ne tiennent pas longtemps sinon, elles perdent si facilement conscience, il suffit de les approcher d'un arbre, et les voilà qui essayent de se suicider. Quelles idiotes ! Les autres ont un peu d'espoir, elles croient pouvoir s'en sortir, alors, elles tiennent. C'est si beau de voir cet espoir se briser, peu à peu. L'espoir des humaines est l'une des choses les plus mystérieuses que j'ai pu voir. Je me demande combien de temps tu tiendras, toi.

 Claude sentait les larmes couler sans s'arrêter sur son visage figé. Elle sentait encore, plus profondément, la peur qui tordait ses entrailles, embourbait sa respiration. Et elle ne pouvait rien faire, même pas reculer un peu, même pas mettre une distance, quoi qu'illusoire, infime, vouée à disparaître avec cette créature qui pouvait de toute façon l'attraper quand elle le voulait. Elle le sentait, comme l'ange s'approchait, cette espèce de chaleur qui émanait, et c'était horrible et effrayant, de juste sentir ça, et de savoir qu'elle ne pouvait rien faire. Le sang qui tambourinait à ses oreilles paraissait chuchoter : fuis, fuis, fuis. Elle ne désirait rien d'autre que la fuite. L'ange éclata d'un rire cristallin. Il approcha sa main d'une de ses joues, puis se ravisa.

- Non, non. Nous commencerons plus tard. Nous avons tout notre temps, maintenant. Et je n'aimerais pas que tu meures avant d'arriver à la maison. Tout mon élixir s'y trouve. Ça serait vraiment dommage de devoir renoncer à toi, depuis le temps que j'attends que tu sois mûre.

 Il pencha sa main vers sa robe, fouilla dans ses poches, y attrapa le rouleau de pièces, qu'il tint devant ses yeux, les examinant avec intérêt.

- Eh bien. Cela ne vient pas de n'importe où. Ce bon viel humain a eut bien de la chance de trouver un trésor pareil. Enfin, ne t'inquiète pas, tu as aussi du prix à mes yeux.

 Il rit à nouveaux, très amusé. Ses deux yeux brillaient comme des globes lumineux. Il s'approcha de Claude, et la regarda un instant. Le corps de la jeune fille se mit en marche. Seul. Elle se sentit bouger, mais en même temps, elle ne bougeait pas. Un vertige la saisit devant cette information terrifiante. Un bizarre soulagement, alors. Si je m'évanouis. Oui. Si je ne me réveille pas. Si seulement. Cela serait mieux. Mieux que ce que l'ange allait lui infliger. Les anges sont les pires. Elle l'avait entendu, des dizaines de fois. Il y avait toutes ces choses, dans les bois, ces choses dangereuses, qui pouvaient vous faire souffrir, vous rendre fou à lier, qui pouvaient même vous tuer. Mais les anges, eux, faisaient tout cela de manière encore plus horrible. Parce que les anges ne vous laissaient aucune chance de les fuir. Et surtout, eux, ils voulaient vous garder en vie. Les autres la voulaient tous, peu importe comment. Mais pas eux. Eux, ce qu'ils voulaient, ce qui leur plaisait, plus que tout, c'était la souffrance.

 Par paresse, ils sortaient rarement de leurs forêts, et n'attrapaient que les êtres assez fous pour s'approcher trop près d'eux. Mais ils les attrapaient, immanquablement. Et cette paresse était le seul élément qui avait permis aux êtres humains de rester en vie. Personne n'avait jamais revu une seule des victime des anges. Ils ne laissaient jamais repartir qui que ce soit. Jamais.

 Elle demeurait consciente. Et l'ange lui sourit, magnifique. Il se tourna vers la forêt, et elle sentit son corps s'avancer mécaniquement. Le vent lui-même paraissait la pousser, droit vers elle. Chacun des pas vacillants l'amenait plus près des troncs immenses et resserrés. Des buissons rampaient hors de la forêt, mais n'allaient pas bien loin, regroupée autour des hauts feuillages qui s'évasaient vers le ciel. Il lui semblait percevoir des choses dans l'ombre, là bas, entre les arbres. Des mouvements précipités, des chuchotis. Mais rien n'était pire que la lumière qui brillait à côté d'elle.

- 17 ans...Il en a fallu, du temps, à attendre...Oh, ce n'est rien, pour moi, bien sûr. Mais j'étais si impatient, cela m'a paru immense...

 Et la pente redescendait, doucement, ses pieds avançaient dans les herbes hautes qui avaient envahis le chemin, trouvant tout seuls où se poser, tranquillement, alors qu'elle hurlait à ses muscles de se contracter, de s'arrêter, même plus de reculer, non, simplement de s'arrêter...

- Je ferais attention, tu imagines...Je ne te casserais pas trop vite. Pourquoi faut-il que vous mourriez ?

 Et c'était proche, là, devant, les premières racines, quelques mètres encore, et elle les toucherait, et les ombres derrière les arbres frémissaient. S'arrêter, s'interrompre. Non, même plus. Elle essayait juste de réagir. Bouge. Bouge. Elle essayait, tout, n'importe quoi, même bouger son œil figé droit devant elle, juste ça, mais non, ça ne fonctionnait pas. Allez. Bouge. Elle essayait de crisper, juste se crisper, chanceler, tomber...Et alors...Sauf que son corps avançait, encore, sans cesse. Bouge, bouge, bouge. Ses yeux lui faisaient mal. Elle ne pouvait pas les cligner. Même instinctivement, elle ne pouvait pas. Plus rien ne marchait. Non, non, allez, bouge... Est-ce qu'il y avait quelque chose qu'elle n'avait pas essayé ? Quelque chose, n'importe quoi ? Réfléchis. Réfléchis. Il faut que tu bouges. Elle ne voyait rien, non, rien...La première ombre d'arbre glissa sur sa botte...Finit...Non...Bouge !

 Ça bougea.

- Ah ?

 La voix cristalline était étrangement interrogative. Fascinée . Un cliquetis retentit, le bruit de métal qui tombe par terre. En même temps, Claude sentit soudain son corps se tourner, violemment, et elle se retrouva face à la créature dans une position instable, comme involontaire. Face à elle, l'ange, étonné, avait levé son bras. Des cloques bizarres gondolaient sa peau, incongrues, pas à leur place. Elles formaient comme une ligne, qui partait de sa main, et elles se multipliaient, de plus en plus vite, rongeant sa peau lumineuse, soulevant sa chair brillante, dévorant les moindres centimètres qui les rapprochaient de sa poitrine nue. Puis la dernière atteignit son cœur. Et elle explosa.

 BAM !

 La déflagration souffla d'un coup, projeta puissamment Claude vers l'arrière. Loin. Très loin. Elle sentit des choses derrière elle défiler, à toute vitesse, dans son dos, quelque part sous elle, et tout autour. Le vent hurlait à ses oreilles. Mais elle n'entendait plus rien. Et ses yeux fermés ne lui permettait pas de voir. Elle ne pouvait pas les ouvrir. Une lumière blanche, trop forte, douloureuse, les brûlaient.

 Puis son dos heurta violemment quelque chose. Sa respiration se bloqua sous le choc. Désorientée, elle palpa maladroitement ce qu'elle venait de heurter -froid et dur, de la pierre- et, à l'aveuglette, se cacha derrière. Enfin, elle pût ouvrir les yeux.

 Autour du rocher, se découpant autour de son ombre minuscule, une lumière blanche épaisse éclaboussait tout. Rien. On ne voyait plus rien. Cela ne dura qu'un instant. Et la lumière recula, s'étrécit, s'éloigna à toute vitesse, perdant de sa force. Claude s'écarta du rocher, aimantée par elle. La lueur violente reculait encore, loin, très loin, se concentrait, et soudain, à un endroit qui semblait incroyablement éloignée, toujours visible pourtant, elle partit vers le ciel en une longue colonne blanche qui lui semblait un filament. Pendant une seconde, elle brilla , s'élançant vers l'orage ,brillant d'un éclat douloureux, puis soudain elle disparu.

 Claude s'écarta un peu de la pierre. Les yeux toujours tournés vers le ciel, la bouche entrouverte, elle tentait de comprendre ce qu'il venait de se passer. Ses pupilles sombres fouillaient l'espace à la recherche de la silhouette qui n'allait pas manquer de se profiler, riante, expliquant que ce n'était qu'un jeu, pour lui donner un peu d'espoir, et le voir se briser aussi sec. Elle ne vint pas. L'ange avait disparu. Tout simplement. Il n'était plus là.

- Oh, c'est pas vrai.

 Sa voix tremblait dans le silence, et elle l'entendit à peine, sous le bourdonnement de ses oreilles, mais de toute façon, elle ne l'écoutait pas. Elle ne parlait pas pour dire quoi que ce soit.

 C'est alors qu'elle prit conscience qu'il y avait la forêt. Elle ne la vit pas devant elle, elle se retourna...mais ne la vit pas non plus. La forêt avait disparu. Non, plus de forêt, plus d'ange, mais même plus de collines ou quoi que ce soit de l'endroit où elle se trouvait quelques secondes plus tôt. A la place il y avait une grande prairie vide, à peine vallonnée au loin, un certain nombre de rochers. Et, découpant cette vision, un chemin très large et pavé qui s'avançait fièrement au loin, ainsi qu'un grand panneau placé à côté où des signes qu'elle ne savait pas déchiffrer tournaient furtivement en lettres d'or.

 Ce n'était pas l'endroit où elle aurait du se trouver.

 Elle chancela. Son cœur battait si fort qu'on aurait dit qu'il voulait s'échapper loin de sa cage thoracique pour repartir beaucoup plus loin, dans un monde ou le corps qu'il animait n'aurait pas été menacé par un ange, contrôlé par lui, puis envoyé mystérieusement parcourir des distances incroyables dans un vol aveugle. Oui, peu à peu elle comprenait. Quelqu'un...Quelqu'un les avait envoyées ici, à la mort...Sans doute celui à qui elle appartenait, oui...Et là... L'envoyé de Dieu corrompu l'avait approchée, l'avait capturée, l'aurait torturé en la maintenant en vie pour toujours... Elle se mit à trembler sans pouvoir s'arrêter. L'ange l'emmenait, il avait été proche, si proche – ses bras se serrèrent convulsivement autour de sa poitrine, comme pour se protéger – elle avait pu sentir sa lumière – ses lèvres se serrèrent en une moue dégoûtée - , et elle n'avait pas pu s'enfuir, parce qu'il était là, elle n'avait pas eu le choix, ce n'était plus une question de choix, c'était juste pour lui , ce choix. Et des larmes dégoulinaient de ses yeux écarquillés  , traînaient sur sa figure avant d'aller éclabousser les brins d'herbe du sol.

 Mais il n'était plus là. Elle ne comprenait pas pourquoi, ni comment, mais il n'était plus là. Et toute cette violence grimaçante et cette douleur aliénante , c'était partit, oui, c'est partit, allez. Mais son cœur battait toujours beaucoup trop vite, sa respiration hachée ne voulait pas se calmer, et son regard sautait d'images en images, cherchant si...allait revenir.

 Elle se redressa, rapidement, avec des gestes brusques, vibrante d'adrénaline, et, sans plus s'interroger, sans un regard en arrière, elle rejoignit les pavés qui brillaient sous les nuages. Alors elle prit simplement une grande inspiration. Et la fuite.



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L'Ordre Ancien. Empty Les échos du passé.

Message  Invité Lun 22 Déc - 3:26

La nuit était tombée relativement vite. Après tout, la journée avait été riche en émotions. Alors un peu de repos ne se refusait pas. Cleya était adossée à un des murs de la terrasse qui surplombait la Cité Jaune. C'était un spectacle tout à fait magnifique, que de regarder le soleil se coucher par delà les grilles protectrices. C'était un peu comme si le soleil éclatait en des millions d'éclats pour couvrir le toit de la cité de sa lumineuse chaleur. La jeune femme était montée là pour se ressourcer, pour digérer le flot quasi - continu d'informations qu'elle avait apprit aujourd'hui. C'était difficile à gérer finalement. Elle n'avait pas prévu tout ça en quittant la Verte. Tout ce qu'elle voulait, c'était retrouver Martin. C'était s'excuser. Pourquoi avait - il fallut qu'il sache pour l’Ordre? Pourquoi ? C'était injuste parfois, la vie. Elle soupira. Le ciel au - dessus d'elle s'était paré de couleurs chatoyantes, qui ensemble formaient une toile céleste bien étrange. Elle pensait, c'était comment la nuit, là bas ? Elle ne se souvenait que très mal du morceau de ciel qu'elle observait sur l'île. Elle se souvenait de beaucoup d'autres détails, mais pas de celui - là. C'est vrai que chez elle, on avait bien trop de choses à faire pour penser à seulement relever la tête.

Cette histoire remontait à plusieurs années en arrière. Elle n’avait alors qu’une quinzaine d’années. Elle travaillait au feu avec d’autres filles, pour qu’il ne s ‘éteigne pas. C’est sa mère qui lui annonça la mauvaise nouvelle. Il était parti. Seulement parti. Sans laisser d’indice, sans un mot, sans une lettre. Sans même une pensée pour elle. Elle s’était sentie si mal qu’elle avait vomit dans l’herbe. Mais elle n’avait pas pleuré. Elle était seulement rentrée à la tante pour méditer. Il l’avait trahie, non ? Alors elle avait le droit de se sentir aussi mal ?
Lui c’était Martin, de cinq ans son aîné. Il vivait dans la ronde la plus au sud de l’île, avec les hommes de chasse. Son père voulait faire de lui un dresseur de dragons. Martin avait les cheveux noirs, c’était une chose rare sur la Verte. Ce noir si profond, on ne voyait ça que sur le grand Continent. Alors forcément, il plaisait beaucoup. Mais pas à Cleya. Elle, elle pensait à tout autre chose.
Cleya était le genre de fille que l’on avait peine à comprendre. Pas qu’elle soit d’une intelligence très supérieure à la moyenne, mais elle parlait si peu que l’on savait peu de choses de ce qui se déroulait dans sa tête. Mais les gens s’en fichaient de toute façon. Car la petite était née différente, alors ils mettaient ça sur le compte de sa nature. Elle n’était pas humaine, cette enfant. Elle était magique. Elle faisait des choses avec ses mains, avec des incantations bizarres, des choses magnifiques. Lors des veillées, elle s’amusait souvent à faire jouer des petits personnages lumineux qu’elle créait d’un coup de doigts pour illustrer les histoires. Ça plaisait beaucoup. Mais la sorcière refusait obstinément de s’attacher à qui que ce soit, car elle n’avait jamais ressenti cette chose, cette étincelle dont toutes les autres filles parlaient. Elle ne connaissait pas l’amour. Oh ça ne la dérangeait pas le moins du monde. Seulement elle ne voyait pas l’intérêt de s’attacher à quelqu’un sans raison. Alors elle attendait. Elle avait treize ans quand ses parents décidèrent de la marier avec Martin. Bien sur, ils attendraient qu’elle ait vingt ans. Ils auraient le temps de s’apprendre. Cleya n’en fut ni heureuse, ni malheureuse. Peut – être un peu dérangée que l’on ne lui demande pas son avis, mais après tout, les mariages arrangés étaient monnaie courante sur l’île. Martin, lui, entra dans une colère monstre, et refusa catégoriquement de rencontrer la future épouse pendant les deux mois qui suivirent.
Il la croisa par hasard alors qu’elle s’exerçait à la magie. Elle avait l’air épuisée, et ses cheveux ternes la faisaient ressembler à une autre personne. Le jeune homme ne songea pas une seconde qu’il parlait à Cleya.

- Tu devrais te reposer. Je ne sais pas ce que tu fais, mais ça a l’air épuisant.

La rousse lui jeta un regard étonné.

- C’est gentil de me le dire. Mes cheveux sont plus sombres que d’habitude, tu as raison je devrais arrêter.

Il sourit.

- Moi c’est Martin.
- Je sais qui tu es.


Silence. Martin attendait qu’elle se présente, mais tout ce qu’elle semblait être en mesure de faire, c’était le fixer avec de grands yeux ronds. Il se racla la gorge.

- J’attendais que tu me dises ton nom, en fait.

Elle plissa les yeux.

- Tu ne me reconnais vraiment pas alors ?
- Comment ? Je devrais ?


La jeune fille fut prit d’un éclat de rire. C’était drôle de le voir se torturer les souvenirs pour chercher à mettre un nom sur ce visage enfantin.

- Cleya. C’est moi la fiancée que tu refuses de rencontrer.

Il ne l’avait d’abord pas crue. Puis finalement, il s’était excusé. Il ajouta qu’il se sentait stupide. Et il avait rougit. La jeune fille avait trouvé sa réaction amusante. Martin semblait être un gentil garçon. Ils décidèrent de se revoir, le lendemain. Et pour que ce soit plus palpitant, ils s’accordèrent pour garder leur rencontre secrète.
Leur petit manège dura presque une année complète. Ils s’apprirent par cœur, connaissaient les secrets l’un de l‘autre, leurs histoires et leurs rêves. Martin ne voulait pas être dresseur de dragons. Ces énormes monstres lui fichaient une peur indescriptible. Lui, ce dont il rêvait, c’était de partir à l’aventure.

- On s’enfuira, il demanda un soir. Hein Cleya, on partira loin tous les deux, t’en dis quoi ?
- Ça me semble amusant.


Puis le soir d’après, ils décidèrent de partir la veille de son anniversaire. Elle aurait quinze ans, et lui l’âge d’être adulte.

- Et si on ne peut pas ?
- Qu’est ce que tu veux dire ?
- Si on ne peut pas s’enfuir ?


Il réfléchit un instant.

- Dis moi Martin, tu partirais sans moi ?
- Non, jamais. Tu es trop fragile pour que je t’abandonne.


Et ils avaient rit ensemble. Ils étaient très complices. Certainement les meilleurs amis du monde. Et ils s’entendaient parfaitement sur un point : ils n’étaient pas amoureux l’un de l’autre. D’ailleurs, Cleya ne comprenait même cette idée. Qu’est ce que ça voulait dire, au juste, « être amoureux » ? Qu’était – on sensé ressentir ? La question la titillait parfois, mais s’évanouissait très vite pour laisser place à d’autres pensées bien plus constructives. Sauf que finalement, la fameuse nuit, Cleya avait été prise d’une angoisse soudaine qui l’avait rendu si malade qu’elle était restée clouée au lit avec de la fièvre.
Le lendemain, elle songeait aux excuses qu’elle allait lui faire quand on lui rapporta qu’il avait fuit, la laissant derrière. Il avait mentit.

Cette fois, il faisait nuit pour de bon. Le soleil s’était caché derrière les hauts murs de Navaterre. Cleya frissonna : un vent frais balayait la capitale. Sur sa joue, une larme qui roulait fut chassée d’une main. Elle s’était laissée perdre dans ses souvenirs, elle détestait ça. Elle ne remarqua pas la petite fouineuse ailée qui n’avait pas perdu une seule miette de ses souvenirs, nichée sur une tuile du toit. Doucement, elle étira son corps endolori d’être trop longtemps resté dans la même position. Elle se leva, doucement, puis pas à pas, elle s’approcha du bord de la terrasse. Elle jeta un regard vers le bas. Elle était vraiment très haut. Elle songea un instant qu’elle pouvait sauter par là et s’enfuir, mais l’idée que son incantation de vol puisse ne pas marcher la vit rapidement changer d’avis. Mieux valait ne pas risquer sa vie. Elle poussa un soupir discret, faisant volte face pour rentrer. Mais alors qu’elle allait rentrer, un étouffant sentiment de terreur l’envahis. Elle se tourna vers le lointain, le souffle coupé. Elle savait parfaitement que ce sentiment ne lui appartenait pas. Elle déglutit, affolée. Quelqu’un, à quelques pas seulement des portes de la ville, avait besoins d’aide. Cleya n’avait jamais ressentit un lien télépathique aussi fort. Un peu plus et elle aurait juré pouvoir deviner un nom, mais elle chassa cette idée de sa tête aussi rapidement qu’elle y était venue. Malgré tout, elle ne pu s’empêcher de penser en dévalant l’escalier : N’aie pas peur, je viens te sauver, Claude !

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Message  Invité Mer 25 Fév - 21:58

Claude posa sa main sur la large plaque de métal juste à temps. Elle sentit les larmes d'argent, qui avait commencées à rougeoyer le long de son avant-bras, se refroidir instantanément et se rétracter comme elle touchait la plaque froide. Elle poussa un soupir de soulagement et recula comme d'autres esclaves se bousculaient derrière elle pour se libérer du charme logé dans leur paume à leur tour.

 La brûlure avait commencé à se faire ressentir une heure et demie auparavant. Elle avait cessé de courir, essoufflée, en nage, marchant à l'aveuglette sur la route déserte. Une carriole était passé, et elle avait pu demander, surmontant le frisson qui la poussait à fuir – il pourrait être là, caché. C'est peut-être un piège.- où elle était. Le couple de marchandes qui s'y trouvaient lui avaient annoncé avec étonnement le nom de la Ville Jaune. Elle ne les avait pas crues, d'abord, à cause du vide sur la route. N'étaient-elles pas à la confluence de tous les chemins, à la capitale du pays ? L'une des deux femme s'était chargée de lui expliquer vaguement que les routes étaient trop peu sûres, ces derniers temps, avant de faire avancer leur cheval. Au moment où elles s'étaient effacées au loin dans un nuage de poussière, elle avait sentit la première chaleur se réveiller dans sa main. Peu à peu, comme elle avançait, la chaleur avait augmentée, jusqu'à devenir de plus en plus pénible, de plus en plus insupportable. Quand elle était arrivée à l'entrée de la Cité, les nervures de métal s'étaient déjà éloignées de leur centre, s'enroulant voracement en direction de son coude, brûlantes.

 Avoir mal lui avait fait oublier sa peur. Mais, dès qu'elle fût libérée de cette sensation, les battements de son cœur ne retrouvèrent pas un rythme normal, bien au contraire. Elle le sentit s'affoler violemment comme pour fuir le danger. Elle recula, se retourna, et contempla, les yeux écarquillés, la plaine immense qui entourait la cité, le port qu'on entrapercevait tout près, et les montagnes au loin. Elle fouilla nerveusement le paysage, s'attendant à tout instant à voir le visage d'un ange en colère venu la détruire, elle, et pourquoi pas la Cité et le monde entier, puisqu'on racontait qu'ils en avaient le pouvoir. Oh, ils n'allaient pas loin hors des forêts, normalement. Mais il n'y avait aucune raison de penser en termes de normalement. Rien n'était normal. Leurs victimes ne leurs échappaient jamais. Jamais. Si l'on savait à quoi ils ressemblaient, c'était par des messages qu'elles avaient laissés, des dessins gravés dans la terre par des ongles ensanglantés, des histoires répandues par les anges eux-mêmes, eux qui aiment tellement cultiver la peur. Mais elle était encore là . Et l'ange aussi, forcément, car ils étaient immortels. Et c'est pourquoi il allait obligatoirement la chercher. Ils n'abandonnent jamais leur proies. Alors, sa vie allait forcément – la vie qu'elle menait – se terminer comme cela : quand il recroiserait sa route. Ce n'était plus qu'une question de temps. Son existence n'était plus qu'une énorme question de temps, car elle ne dépendait entièrement que de celui qu'il lui faudrait pour la retrouver.

 Elle ne pouvait en parler à personne. Qui la croirait ? Elle se tourna vers le brouhaha derrière elle. A l'entrée de l'énorme porte de la Cité, des centaines de personnes se pressaient . Des inconnus. Tous savaient que les anges ne relâchaient jamais leur proies. Personne ne croirait une gamine, et surtout pas une esclave. Annie ? Mais Annie n'avait pas eu le temps de le voir, c'était la forêt qui l'avait fait fuir, elle en était sûre. Et d'ailleurs...Où était-t-elle ? Pour la première fois, elle repensa vraiment à la jeune fille. Elle jeta un coup d’œil vers la Ville. Avait-elle pu l'atteindre ? Sauf que...Le chemin qu'elles avaient pris n'était pas du tout, mais pas du tout près d'ici. Où pouvait-t-elle bien être, maintenant ? Elle frissonna en songeant au métal sur son bras. Annie l'avait abandonnée...Mais elle la comprenait. Elle devait la chercher. La chercher...Repartir, là-bas, dans les collines...Prêt des forêts...Elle sentit ses muscles se contracter. Je ne peux pas. Ce n'était pas seulement la peur qui parlait. Elle ne savait absolument pas où aller. Elle ne savait même pas où Annie et elle se trouvaient quand elle avait disparu. Elle ne pouvait pas aller ainsi à l'aveuglette. C'était stupide.

 Soulagée de ne pas avoir à s'éloigner vers les contours flous et menaçants de l'horizon, elle se dépêcha d'avancer vers l'entrée, déterminée à trouver une solution pour retrouver Annie. Elle savait qu'elle pouvait rentrer sans elle. Elle savait se débrouiller à l'extérieur. Mais elle savait également qu'elle ne se le pardonnerait sans doute jamais. Et de toute façon, pensa-t-elle avec amertume, à partir de maintenant, ses jours étaient comptés.

 L'entrée de la ville se trouvait au bout d'un pont levis, abaissé, qui traversait une vaste et profonde fosse remplie d'une eau noirâtre. Il menait à la porte, une immense porte dont les deux lourds battants montaient au moins jusqu'à un tiers de la taille du mur, soit une bonne trentaine de mètres. En haut de l'épais mur, et près des portes, des rangées de soldats regardaient, placides, une foule habituelle se presser autour des murs et de l'autre côté du pont. Des marchands ambulants s'étaient installés un peu partout à l'entrée. Quelques taudis se trouvaient même non loin des douves. Mais il y en avait très peu : la population se trouvait, bien à l'abri, de l'autre côté des immenses murailles en haut desquelles ont apercevait des lignes dorées.  

 Pour entrer, il fallait cependant franchir plusieurs obstacles. Tout d'abord, l'immense foule qui, en attendant la fermeture des portes pour la nuit, se dépêchait de finir ce qu'elle avait commencé dehors. Ensuite, la queue immense qui avait commencé à se former à l'entrée. Les gardes, près de la porte, filtraient impitoyablement le flot qui s'y pressait, vérifiant les charrettes et comparant les visages avec les portraits qu'on leur avait fourni de criminels notoires. Claude se rangea, après s'être frayée un chemin, dans l'une des lignes qui avançait lentement vers l'ouverture. Tandis qu'elle patientait, son regard parcourant nerveusement les alentours, elle réfléchissait à ce qu'elle pouvait faire. Tout d'abord, un endroit où dormir. Mr de Maistré leur avait donné l'adresse d'un de ces endroits où l'on bourrait des esclaves dans des dortoirs sombres et crasseux pour un coût raisonnable. Il avait payé d'avance. Elle savait qu'elle n'obtiendrait aucune aide, là-bas. Personne ne s'inquiéterait d'Annie. Même pas pour sa valeur marchande. Le sort contracté bien malgré eux par les esclaves était la meilleure des prisons pour les empêcher de fuir. Quand à ceux qui avaient tout de même tenté cette option, on retrouvait normalement leur cadavres quelques temps après. Dès qu'ils étaient partis, on les considérait morts. En fait, il fallait mieux qu'elle n'en parle à personne, décida-t-elle en baissant les yeux vers les planches de bois rongés par la moisissure. Annie allait peut-être rentrer à temps. Elle ne doutait pas que leur maître la ferait punir s'il apprenait qu'elle n'était pas là où elle aurait dû être, qu'importait la raison. C'était la meilleure chose à faire.

 Elle était tout près de l'entrée, maintenant. Une femme, juchée sur un cheval qui traînait une charrette bourrée de malles, passait juste devant elle. Le soldat, un jeune garçon à l'air nerveux, insistait pour les fouiller une par une. Claude jeta des coups d’œils autour d'elle avec impatience. Il lui était de plus en plus insupportable de rester ainsi hors des murs, avec tout cet espace derrière elle d'où il pouvait surgir à tout moment. Elle se sentait vulnérable, là, immobile, pouvant à peine bouger, coincée au milieu de toutes ces personnes. Elle ne pouvait même pas courir. C'est comme tout à l'heure. Elle frissonna, tentant de réprimer le souvenir de ce qu'il s'était passé. Elle ne voulait pas affronter ça tout de suite. Pendant qu'elle s'était enfuit, elle n'y avait pas vraiment réfléchit. Les images et les sons lui revenaient en tête, tous seuls, terrifiants. Elle n'avait même pas essayé de comprendre les paroles de l'ange. Elle se rappelait de tout, bien sûr. Mais c'était quelque part, dans un coin de sa tête, un coin qu'elle essayait de barricader de toutes ses forces.

 Il ne restait que quatre personnes devant elle, maintenant. Un vieil homme, en haillons,  salua le soldat entre deux rires d'ivrognes. Le jeune homme le regarda sans essayer de cacher son dégoût, et ne demanda pas à fouiller son sac de toile tâché de vin. Trois personnes. Claude regardait le soldat, à présent. Il farfouillait dans sa liasse de portraits.

- Vous ne m'prenez quand même pas pour c'te tueuse ? S'insurgea la femme qu'il faisait attendre en croisant les bras avec indignation.

- Les consignes, m'dame. Toute personne ressemblant de près ou de loin...

- Vous voulez dire que je lui ressemble ? S'écria la femme, apparemment très en colère.

 Le soldat ne broncha pas, l'air las. La scène devait être lui être habituelle. En fouillant trop vite dans son tas, il fit tomber une feuille qui glissa vers Claude.

- Non, non,non ! Grinça-t-il entre ses dents.  

 Il se précipita vers la feuille et la ramassa rapidement, avant de retourner à son poste. Claude ne le suivait plus des yeux. Son regard n'avait pas bougé, fixant le bois sur lequel, se trouvait, quelques secondes plus tôt, son portrait.

 Mon portrait ?

 Elle tenta de se calmer. Non, non, ce n'est pas possible. Personne n'est jamais venu me dessiner. Ca ne peut pas être mon portrait. J'ai du mal voir. Mais l'image était comme imprimée sur sa rétine, et elle ne pouvait pas se mentir plus longtemps. C'était bel et bien son portrait qu'elle avait vu. Elle n'avait aucun doute là-dessus. Il était plutôt bien fait. Elle avait immédiatement reconnu son visage. Peu importait, à dire vrai, que ce soit elle où un quelconque sosie qui lui ressemblait si exactement. Le soldat ne verrait pas de sosie. Il la verrait, elle.

 Pâle, le cœur battant, elle releva un peu la tête, laissant les cheveux emmêlés qui dépassaient de son foulard tomber sur son visage, le cachant. Deux personnes. Il n'y avait plus que deux personnes à passer devant elle, puis le soldat la reconnaîtrait au premier coup d’œil, et l'arrêterait. Elle déglutit avec difficulté.

 Pourquoi...?

 Non, elle n'avait pas le temps pour les questions. Il fallait qu'elle trouve un moyen de s'échapper. Tout de suite. Elle était une esclave. Peu importe, pour eux, qu'ils se trompent, ils pouvaient l'arrêter et l'enfermer sur simple supposition. Leur expliquer ne servait à rien. Elle voyait déjà se dessiner les barreaux d'une prison. Ou pire. Les criminels à qui on offrait le luxe d'un portrait étaient considérés comme très dangereux. Et la Cité n'était pas du genre à s’embarrasser d'un danger, surtout d'un danger esclave. Il y avait des moyens bien plus simple d'éliminer un danger que de le garder en prison, où ils pouvaient toujours s'enfuir. Elle frissonna . Je dois partir. Elle se retourna, paniquée. La foule était venue grossir les rangs devant l'entrée comme le soleil commençait à rougir. Une marée de visages pressés les uns contre les autres lui faisaient face. Elle ne voyait aucune échappatoire.

- Eh ! Lui cria l'homme qui se tenait derrière elle dans la file. Avancez !

 Elle sursauta, avant d’acquiescer maladroitement et de se retourner pour constater qu'en effet, elle pouvait avancer. Il n'y avait plus qu'une personne devant elle, à présent. Elle marcha, lentement, les yeux baissés, ne prenant pas le risque de croiser le regard du soldat probablement curieux de savoir qui pouvait bien rechigner à venir se mettre en sécurité entre les murs de la ville.

 Je ne peux pas m'enfuir. La vérité lui était apparue, terrifiante. Mais malheureusement impossible à contredire. Si jamais elle partait, essayant de se frayer un chemin au milieu de cette agglutination compacte, elle récolterait tellement de protestations que les soldats n'auraient qu'à suivre les insultes qui la précéderaient. Non, elle devait avancer.

 Devant elle, la personne qui attendait de passer, une vielle femme, observait, l'air revêche, le soldat fouiller dans une de ses grandes valises. De temps à autre, elle lâchait un petit sifflement énervé, comme il soulevait un peu trop brusquement un objet fragile. Claude calcula qu'il lui restait une ou deux minutes pour trouver une solution. Une seule idée lui était venue, évidente : puisqu'elle ne pouvait pas sortir, il lui fallait rentrer.

 Ça n'allait pas marcher. Elle le su au moment même où elle arrangea ses cheveux pour qu'ils retombent sur son visage, quand elle remonta son col pour cacher la tâche de naissance, quand elle plissa les yeux pour tenter de rendre son visage méconnaissable. Elle n'était absolument pas méconnaissable. On allait la reconnaître. D'un instant à l'autre.

 Le soldat continuait de fouiller la valise de la vieille dame sous son regard mécontent. Quelques secondes, et il aurait finit. Ce serait finit. Elle avait peur. Pourquoi ? C'était vrai, pourquoi ? Après tout, c'était déjà finit. Que l'ange la tue, ou qu'elle se fasse tuer par un de ces soldats, quelle importance ? En fait, la seconde option serait sans doute beaucoup moins douloureuse. Maintenant qu'elle y pensait, si elle n'était pas arrêtée maintenant, il lui faudrait sans doute le faire elle-même. L'ange la retrouverait, aucun doute. Si elle ne voulait pas connaître une fin affreuse, c'était la seule solution. En vérité, elle aurait dû être heureuse de pouvoir en finir de cette manière, tranquillement, sans trop de mal, sans avoir à le faire soi-même, sans avoir à passer chaque seconde de sa vie à se demander si c'était le moment ou si elle avait encore du temps, au risque de ne pas pouvoir échapper à la plus horrible situation. Elle n'avait pas à avoir peur. Ce n'était qu'une corvée de moins, en somme.

 C'était faux. Tous les anges du monde auraient pu la poursuivre, elle était effrayée à l'idée de se retrouver entre les mains du soldat. La solution avait beau être la plus rationnelle possible, rien n'y faisait. La panique engourdissait ses jambes au point qu'elle ne savait pas si elle tiendrait longtemps debout. Elle n'arrivait pas à s'arrêter de trembler. Il y avait toutes ces choses qui lui semblaient soudain si précieuses, parce qu'elle allait les perdre, cet air qu'elle respirait et tout ce monde autour d'elle qui s'avançait calmement pour rentrer chez lui, et le reste de soleil rougissant le ciel sombre et endormi, et tout cela qui était si banal et si affreusement ignorant, qui existait sans se poser de questions, sans hésiter, sans remarquer qu'elle ne voulait pas mourir. Elle allait avancer, bien sûr, quand le soldat lui ferait signe, elle le suivrait, oui, et puis, quand ils l'enfermeraient, elle entrerait dans la cellule, et quand ils s'approcheraient d'elles avec leurs armes, si c'était ça – et ça n'avait pas vraiment de sens de douter, ce serait ça, elle ne pouvait plus le nier, elle avait vu le portrait - , elle se ferait tuer, elle le pouvait parfaitement. Ils avanceraient, le visage sombre et morne, mais elle se tiendrait bien droite, elle ne fuirait pas.

 Mais, même si elle serait immobile au moment où l'épée s'enfoncerait dans sa poitrine, au moment où elle aurait la certitude d'échapper à son bourreau , quelque chose en elle refuserait, quelque chose se débattrait, la peur, toujours, toujours, parce que – elle inspira bruyamment, tentant de contenir les sanglots qui montaient, quand le soldat lui jeta un « Avancez » - parce qu'elle ne voulait pas .



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L'Ordre Ancien. Empty Il faut sauver Claude !

Message  Invité Mer 25 Fév - 23:20

Une fois, quand elle était plus jeune, Cleya avait courru si vite que tous les muscles de son corps avaient finis par être douloureux quand elle s’était arrêtée. Et même la magie régénératrice dont elle usait habituellement n’avait rien pu faire pour elle. Ce jour là, la sorcière s’était promi de ne jamais plus infliger ça à son corps. Et pourtant.

Son cœur battant la chamade marquait le rythme de sa course au travers des rues de la Cité. Elle allait si vite qu’elle doutait même que ses pieds touchèrent réellement le sol, elle avait presque la sensation de voler. Mais il y avait cette chose, cette pulsation dans son ventre, ce nom qui martelait ses tempes et qui lui exhortait de se dépêcher, d’aller plus vite. Elle avait peur, de plus en plus, et c’était très étrange, car cette peur étrangère à son esprit qui s’était immiscée en elle sur le toit se mêlait désormais à sa propre peur d’arriver trop tard. Son soulagement fut alors immense quand, tournant une ultime fois, elle vit apparaître les hautes portes face à elle.

Comme toujours, le monde se bousculait pour passer les portes. Les gardes faisaient leur travail quotidien. Ils passaient en revu les visages et les cargaisons. Elle ralentit sa course. Il ne fallait pas paraître suspecte. Elle continua à avancer, heureuse que la foule à l’intérieur des grilles soit moins compacte que celle qu’elle pouvait observer, entassée devant les portes. En avançant, elle reconnu le jeune garde qui les avait fouillés, Martin et elle à leur arrivée en ville. Elle se remémora le bref échange qu’elle avait eu avec lui. Pour une raison étrange, ils étaient arrivés à un moment où l’entrée de la cité était déserte, et ils avaient alors eu le temps de plaisanter un instant. Elle savait qu’il s’appelait Julien, et ça, c’était un atout ! Elle pourrait lui lancer un sort, si c’était nécessaire. Quand la vielle femme dont il venait de fouiller les bagages s’éloigna, laissant place à une frêle jeune fille au visage caché par des cheveux emmêlés et un vieux fichu sale, elle comprit qu’elle allait, en effet, devoir se servir de sa magie. Elle le devina, car la pulsation cessa aussitôt, et qu’une voix en elle murmura « c’est bon, Claude, je t’ai trouvée ».

La fille avait fait les quelques pas qui la séparaient du garde avec une lenteur si inhabituelle qu’elle avait tiré quelques grognements des badauds. Ceux – ci ne vivaient surement pas dans les sphère arrières de la cité, ces quartiers où logeaient seulement les citoyens les plus puissants, et riches. Ce n’était d’ailleurs pas étonnant, car si l’on prenait conscience de l’heure tardive, on pouvait sans mal deviner qu’il s’agissait là de la fin de journée des paysans, et des retours de voyages des esclaves. Pendant que la fille – qui devait forcément être la fameuse Claude – avançait vers lui, Julien se remémora les portraits des personnes recherchées. Cleya sut immédiatement de quel sort elle allait avoir besoins. Il s’agit d’une magie très simple, qu’elle maitrisait depuis de nombreuses années. Elle se concentra sur le garde, se répétant son prénom silencieusement.
- Son esprit à travers mes yeux.
Elle avait susurré son incantation de sorte que personne d’autre ne puisse l’entendre. Et aussitôt, elle se retrouva à voir défiler dans tête les portraits gravés que Julien observait. Elle butta sur un visage. Elle dévisagea la fille au fichu, reconnaissant avec stupeur ses traits, les mêmes que ceux sur le papier. Rapidement, elle parcourut la courte distance qui la séparait du pont, et rejoignit le garde au moment où la jeune fille se présentait à lui.
- Julien ? risqua – t – elle.
Le garde releva aussitôt les yeux vers elle. Cleya osa un regard vers Claude, qui s’était figée, un air entre affolement et soulagement peint sur le visage.
- Qui me demande ?
La rouquine remercia mentalement Raphaël qui lui avait conseillé de se changer un peu plus tôt dans la journée, troquant sa tenue de voyage pour un ensemble cuir et soie brodé d’or : un must – have des citoyens de l’arrière Cité. Elle avait donc l’air d’une puissante. Elle pouvait le manipuler. Elle pouvait sauver Claude.
- C’est moi, vous me reconnaissez ? Cleya.
- Ah, vous ? Que voulez – vous ?
Il était sec, pas vraiment comme la première fois. Grace au sortilège, Cleya l’entendit penser « elle me dérange, j’ai du travail, moi ! ». Alors elle lui offrit son plus beau sourire, cherchant rapidement une excuse.
- Je voulais vous demander …
Demander. Demander quoi ? Que pouvait – elle bien lui demander ? Des souvenirs des longues discussions de filles qu’elle avait subit sur la Verte lui revinrent miraculeusement en mémoire, et alors elle sut quoi faire.
- Je voulais vous demander si vous étiez de garde aux portes demain ?
Le garde sembla s’étonner.
- Pourquoi ?
- J’aimerais prendre un verre avec vous, lança – t – elle avec un sourire ensorceleur.
Julien sembla soudain si joyeux, qu’elle songea qu’elle avait eut une idée brillante.
- Avec grand plaisir, mademoiselle ! Je vous retrouverais ici, à la même heure, qu’en dites vous ?
- J’en dis que c’est parfait !
Sur ce, il se retourna vers le troupeau de monde qui grondait pour passer les portes, et fit signe à la jeune fille de passer sans même faire attention à son visage, un sourire béat étirant ses lèvres, et songeant que peut-être enfin la chance lui souriait, étant donné que cette Cleya portait une tenue digne de la haute Sphère, et que c'était pourtant lui qu'elle avait invité à "prendre un verre".

Cleya attendit que la brune entre et s’éloigne de la porte pour l’interpeler. Elle lui attrapa la main alors qu’elle s’engageait sur la rue principale.
- Attendez ! souffla – t – elle, attendez Claude, je dois vous parler !
La – dite Claude se retourna vivement, retirant sa main de celle de Cleya, l’observant d’un air effaré. Il fallait espérer qu’elle ne veuille pas s’enfuir…
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Message  Invité Jeu 26 Fév - 1:05

Claude pensa qu'elle avait une chance incroyable, tout d'un coup. Quelques instants plutôt, elle se voyait déjà mourir. Mais le garde qui aurait dû l'arrêter ne l'avait pas fait, distrait par l'arrivée d'une de ces femmes au sourire assuré et à la tenue luxueuse qu'Annie aurait envié. Il avait même tourné la tête, comme l'autre lui parlait, et cessé de la regarder. L'oubliant. Vite. C'était vraiment une chance, une de celles qu'elle ne pouvait pas laisser passer.

 Le garde, trop près d'elle, commençait à discuter avec l'inconnue. Elle hésita encore un peu. Non. Il ne la regardait plus du tout. Si elle partait, il ne la verrait sans doute pas. Du moins s'il continuait à parler avec cette femme, ce qu'elle ne pouvait pas prévoir. Enfin,elle n'avait pas le choix. C'était visiblement le seul moyen d'entrer sans se faire repérer. Et qu'elle se fasse rattraper ici ou là-bas ne ferait vraiment aucune différence, de toutes façon. Elle s'avança, lentement, naturellement, comme si son cœur ne résonnait pas si violemment à ses oreilles qu'elle était persuadé qu'on pouvait l'entendre de l'extérieur. Elle fit un pas, encore un, puis un autre. A tout moment, elle s'attendait à ce qu'un rappel à l'ordre résonne dans son dos, où qu'un bras vienne agripper violemment le sien accompagné d'un menaçant« Arrêtez vous !  ». Mais rien ne vint. Elle continua, un peu plus vite, n'osant pas encore y croire, et s’engagea vers une grand rue qui lui faisait face. Elle demeurait encore sur le qui-vive. Mais les gardes, derrière elle, déjà occupés avec leur propres contrôles, ne prêtèrent absolument aucune attention à la fille qui s'avançait vers la grande rue, se perdant déjà dans une foule pressée où elle se fondait parfaitement.

 C'est alors qu'une main attrapa la sienne.

 Claude sursauta violemment. Le sourire léger qui s'était dessiné sur ses lèvres disparut immédiatement. Elle se retourna, paniquée, arrachant par réflexe sa main du garde qui l'avait rattrapé, parce que ça ne pouvait être qu'un garde. Ce n'en était pas un. C'était la femme de tout à l'heure, celle grâce à qui elle s'en était tiré. Avait-elle tout remarqué ? Était-elle venue la rattraper pour la ramener auprès du soldat ? Claude jeta des regards nerveux derrière elle, s'attendant à voir le regard de tous braqués sur elle, prêt à la poursuivre. Il n'en était rien. Même le jeune nerveux de qui l'inconnue l'avait sauvée ne paraissait pas remarquer quoi que ce soit. Elle reporta toute sa méfiance sur cette femme, qui chuchota alors rapidement qu'elle devait lui parler, à elle, Claude.

 La jeune fille tiqua immédiatement. Claude. Claude ? Comment cette femme connaissait-elle son nom ? Elle ne l'avait jamais vue. Elle était sûre que, si elle était venue au village, elle ne serait pas passée inaperçue, avec ses vêtements colorés et ses longs cheveux brillants. Et comme Claude n'était jamais vraiment sortie du village, elle pouvait être sûre de ne l'avoir jamais rencontrée auparavant. Une idée absurde lui vint à l'esprit : cette femme qui la connaissait mais dont elle ne se souvenait pas, c'était peut être sa...Non. Impossible. Elle est beaucoup trop jeune . indiqua, implacable son esprit. Honteuse de cet étrange espoir enfantin, auquel elle ne s'attendait pas, Claude se dépêcha de se concentrer plutôt sur ce qu'elle devait faire. Écouter cette femme et accepter de lui parler? Le portrait, cette inconnue qui savait son nom et voulait justement lui parler, cela sentait le piège à plein nez. Et si c'était une chasseuse de primes ? Elle avait pu voir la feuille avec son visage dans les mains du soldat, et décider de se faire un peu d'argent, quoique Claude imaginait mal cette dame élégante avoir besoin de quoique ce soit. D'ailleurs, pensa-t-elle en passant une main nerveuse dans ses cheveux pour les ramener devant son visage, il y avait peut-être des affiches avec son portrait partout dans la Cité. Elle devait faire attention. L'issue était claire : cette femme était un danger. Accepter de l'écouter était prendre un gros risque.

 Mais, pensa-t-elle en jetant un nouveaux regard à la rangée de soldat, tout près, que faire d'autre? Elle était à la merci des gardes, là-bas, à l'entrée. Un cri de l'inconnue et elle serait tout de suite capturée. Ça n'avait pas de sens. Elle ne pouvait même pas s'enfuir, ici. Les rues étaient toutes trop proche des gardes. Non, vraiment, elle n'avait pas le choix. Elle devait s'éloigner de cette menace avant toute chose. Je l'emmène loin, et quand on sera dans une rue plus éloignée... Oui, ça pouvait marcher. Et après ? Claude n'en avait aucune idée, mais tout irait mieux dès qu'elle aurait enfin pu fuir tous ces problèmes qui s'abattaient sur elle les uns après les autres. C'est pourquoi elle répondit :

- D'accord...On peut parler mais...'Faut partir d'ici. Tout de suite. Allons dans un endroit plus...Tranquille.

 Et elle ajouta, sans chercher à dissimuler sa méfiance :

- Et comment vous connaissez mon nom, d'abord?
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L'Ordre Ancien. Empty Un nouveau trésor

Message  Invité Jeu 26 Fév - 1:39

Elle avait accepté ? Vraiment ? Alors, elles pouvaient juste … Discuter maintenant ? Ça paraissait véritablement incroyable. Cleya ne put donc pas retenir l’immense sourire de bonheur qui étira ses lèvres. La pauvre fille était inquiète. C’était évident. Comment ne le serait – elle pas, avec son visage sur des affiches de recherche ? La sorcière songea qu’il faudrait sans doute lui jeter un sort pour modifier son apparance, mais elle s’en occuperait plus tard. Pour le moment, elle devait en apprendre plus sur cette fille qui lui était étrangement liée.

- Ne vous en faites pas, je vais vous emmener chez m… Enfin, ce n’est pas vraiment chez moi… Enfin, je vous emmène dans un endroit sûr, ne vous en faites pas ! Je m’appelle Cleya, et si je connais votre nom c’est parce que…

Pouvait – elle vraiment lui dire ? Après tout, les sorciers n’étaient pas vraiment populaires par ces temps sombres. Avec ce groupe de magiciens venu des iles d’Ecailles pour terroriser le Grand Continent, on avait plutôt tendance à se méfier de tout ce qui se disait posséder des pouvoirs magiques. D’autant que cela signifiait qu’à son sang s’ajoutait celui d’un monstre, et ce n’était pas vraiment marrant-marrant comme gênes. Pour autant, Cleya rechignait à lui mentir. Claude méritait de savoir. D’ailleurs, la sorcière s’étonna elle-même que le nom qu’elle avait entendu soit le bon. Mais plus elle restait là, bouche ouverte sur une phrase non terminée, plus elle voyait ses chances de discussion s’envoler. De toute façon très mauvaise menteuse, elle opta donc pour la vérité, non sans avoir lâché un long soupire avant.

- Parce que, eh bien, je suis une sorcière.

Elle fit un faible sourire et haussa les épaules.

- Vous savez, le genre avec pouvoirs magiques, ces choses là. Je vous ai … Comment expliquer ça … Entendue ? Oui, entendue dans ma tête ; il y a eu cette peur soudain, j’ai senti que je devais vous trouver, que vous aviez besoins d’aide, et j’ai couru jusqu’aux portes, et là, vous étiez là, je vous ai vue, et j’ai su… Enfin, j’ai pensé que… Et le garde, il avait ce dessin, j’ai eu peur, et je lui ai jeté un sort et vous…

La jeune femme se rendit compte, à la tête que faisait sa nouvelle rencontre, qu’elle s’était mise à parler beaucoup, et trop vite. Elle soupira donc, un large sourire peint sur le visage.

- Pardon. Je parle trop. J’ai seulement le sentiment que je dois vous emmener chez… mon ami. Je crois que vous êtes quelqu’un de très spécial, Claude, mais que vous ne le savez pas encore.

Elle lui laissa une seconde pour digérer les informations, puis elle ajouta sur un ton léger :

- Ca vous dirait un chocolat chaud ?

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Message  Invité Jeu 26 Fév - 15:47

L'inconnue avait l'air étrangement heureuse que Claude accepte de lui parler. Elle ne se doute de rien pensa la jeune fille avec espoir. Avec un peu de chance, elle pourrait s'enfuir avant que cette femme ne décide de la livrer aux soldats, si c'était bien là ce qu'elle voulait. Sinon...Peu importait. Claude ne lui faisait pas confiance. Elle avait la sensation qu'elle ne ferait plus jamais confiance à personne. Pas avec son visage plaqué, elle le devinait, sur tous les murs de la capitale. Elle frissonna à cette pensée, et résista à l'envie de se plaquer les mains sur la figure.

 Cette Cleya expliquait donc qu'elle connaissait un endroit sûr. Claude hocha la tête, se disant en son for intérieur que la prison était tout sauf un endroit sûr. Puis la jeune femme voulu lui expliquer comment elle connaissait son nom. A cette proposition, Claude ne pu s'empêcher de tendre l'oreille malgré toute sa nervosité. Quelque part, elle était très intéressée de comprendre cet étrange détail, quoiqu'elle soit au milieu d'une grande rue passante, et, désormais, aux yeux du monde, une criminelle en fuite. Elle remarqua que l'inconnue hésitait à lui répondre, pesait visiblement le pour et le contre. Si c'est une invention pour me tromper, elle le fait vraiment bien, songea Claude. Elle aurait juré que cette femme s'interrogeait véritablement. Mais pourquoi donc ? Peut-être qu'elle improvisait.

 C'est alors qu'elle dit qu'elle était une sorcière.

 Claude haussa les sourcils. Une sorcière ? Pas possible. Les sorcières n'étaient pas des dames élégantes qui discutent aimablement avec des soldats. Les sorcières étaient des femmes vêtues de haillons, parce qu'elles n'avaient aucun argent, parce qu'elle passaient à présent leur vie à fuir les soldats qui avaient le droit de les enfermer sur simple supposition de crime depuis qu'avait eu lieu un attentat magique dans la Cité. Elle contempla la femme avec stupeur. N'importe quoi! Non seulement ce n'était pas du tout crédible, mais en plus, ça ne la mettait pas en position de force. Si elle le voulait, maintenant, elle pouvait crier à un garde qu'elle avait entendu l'inconnue dire qu'elle était une sorcière, et le Lecteur de vérité local pourrait s'acharner autant qu'il le voudrait, il ne verrait aucun mensonge là-dedans. Bien sûr, il y aurait des recherches, des essais, des potions de révélation, et la femme finirait bien par être relâchée. Mais sa réputation serait salie pour toujours, et elle ne récolterait plus, désormais, que des regards mauvais. Ça ne valait certainement pas la petite somme proposée pour la capture d'une esclave.

 Non, dire cela n'avait aucun sens. Ce qui n'en avait pas non plus, cependant, c'était son explication. Elle disait l'avoir sauvée avec sa magie. Claude lui jeta un regard méfiant. Encore moins possible. Les sorciers étaient des êtres malfaisants, qui détestaient les humains et désiraient les tuer ou tous les asservir sous leur joug. Leur sang-mêlé les rendait même, disait-on, instable, et quelques fois, l'on en aurait même vu se transformer en bête féroce et tout déchiqueter sur leur passage sans le vouloir. Si la femme en face d'elle était vraiment une sorcière...Soudain, l'idée d'une chasseuse de prime décidée à la livrer à la prison lui paru beaucoup, beaucoup plus attirante.

 Aussi, elle disait l'avoir entendue. Ça aussi, c'était bizarre. Parmi les vieux livres cornés qu'elles avaient trouvés, avec Lili, dans les combles condamnées de l'orphelinat, il y en avait sur la science, et parmi eux, un sur la magie. Il s'y trouvait également quelques chapitres consacrés à tout ceux qui pouvaient la pratiquer, du simple apothicaire qui mélangeait quelques sorts au sorcier qui pouvait faire naître de la magie sans potions ou sorts fabriqués, mais avec son propre sang. Nulle part elle n'y avait lu que les sorciers pouvaient entendre les pensées des humains de sang-non-mêlé, et pourtant, l'ouvrage était très complet, au point qu'elle ne pouvait pas pu le sortir des combles tant il était épais et lourd.

 Puis l'autre ajouta quelque chose d'étrange : elle disait que Claude avait quelque chose de spécial.

 L'adolescente ouvrit la bouche comme pour protester, mais ne trouva rien à répondre. En fait, elle ne savait plus que penser. Tout ça commençait à tourner dans sa tête : l'ange, l'avis de recherche, la sorcière qui l'entendait, elle-même. Elle se rappela soudain la façon dont le corps de la créature s'était couverte d'étranges cloques, comme elle avait ressentit que ce n'était que ça n'était pas naturel. Que ce n'était pas possible qu'il lui arrive cela. Que ce n'était pas normal. Cette chair blanche et brillante n'aurait jamais du se distendre ainsi, rompant tout un équilibre, détruisant presque l'ange tout entier comme son image s'effondrait d'un seul coup avant même qu'elles n'explosent.  Elle pensa brusquement que ce n'était peut-être effectivement pas lui qui s'était infligé cela, parce qu'il n'aurait pas du le vouloir. Peut-être que c'était quelqu'un d'autre. Et, en même temps, elle se rappelait autre chose : cette espèce de sensation, quand elle essayait de s'en sortir, quand elle voulait se débattre alors qu'elle ne pouvait pas faire le moindre mouvement : ça avait bougé. Ça avait été comme lever le bras, ça avait été comme marcher. Elle avait sentit quelque chose, quelque chose à l'extérieur de son corps, comme si des mains invisibles s'en étaient échappées pour toucher, pour faire bouger, elle ne savait pas exactement quoi, c'était instinctif. Il y avait eu comme une pression quelque part, sur sa peau, sauf que ce n'était pas sur sa peau. Elle ne savait pas où, elle ne comprenait pas. Elle avait juste sentit .

 C'était comme ce jour, quand elle avait encore l'âge d'aller à l'école, où il y avait eu ce contrôle. Claude était une élève moyenne sans trop d'histoire, une petite fille calme qui disparaissait de temps à autre pour lire ou jouer là où il n'y avait personne, près des murs. Mais, cette fois là, Monsieur Larosse avait décidé de faire un contrôle surprise, et il avait ajouté que tout ceux qui auraient une bonne note auraient droit à un des vieux livres poussiéreux qui peuplaient depuis longtemps la bibliothèque de l'école et où les plus jeunes n'avaient pas le droit d'aller pour ne pas mettre le désordre. L'enfant qu'elle était alors n'avait pas encore découvert le trésor des combles, et l'idée d'obtenir un de ces livres était devenu son vœux le plus cher. Malheureusement, son niveau n'était pas assez bon pour cela, elle le savait. Ce qui n'était pas le cas de l'enfant assise devant elle quand ils se mirent au travail. Celle-ci, une véritable génie, avait déjà terminé son devoir, et la feuille reposait sagement, seulement cachée par le dos de la fillette elle-même . Claude avait fixé la feuille avec l'énergie du désespoir, priant dans sa tête pour que le morceau de papier se décale juste un peu Elle la regardait, avec toute l'intensité du monde, implorant tous les saints dans sa tête, et soudain, elle avait sentit quelque chose, quelque chose sous la feuille, et la feuille avait bougé.

 Elle avait toujours cru que c'était le vent, et que, pour une raison ou une autre, il était entrée dans cette classe aux fenêtres résolument fermées, et qu'elle avait perçu le courant d'air quelque part sur sa peau, ou que ce soit, peu importait qu'elle ne s'en rappelle plus. Elle n'avait pas pensé longtemps que c'était un saint, car le prêtre, le lendemain, leur avait appris que tricher était mal, et les saints ne faisaient rien de mal, sauf quand ils étaient encore méchants avant d'avoir trouvé Dieu. L'option du courant d'air était par contre assez bonne, et, quand elle était entrée dans la bibliothèque, les yeux brillants de ravissement, elle ne s'était pas posé plus de questions.

 Mais maintenant qu'une troisième option apparaissait, elle s'en posait. Beaucoup. Bouche bée, elle contempla ses mains, ses mains couvertes des cicatrices qu'elle s'étaient faites avec diverses travaux et des cals qu'elle avait à force de porter, soulever, bouger tout ce qu'il fallait. Était-ce possible ? Avait-elle quelque chose en elle ? Mais elle était humaine, elle le savait. Ce n'était pas possible. Sauf que tu ne connais pas tes parents, chuchota une petite voix dans un coin de sa tête. Claude releva des yeux perdus vers Cleya. En fait, l'histoire de la sorcière lui paraissait plausible, maintenant. Trop plausible.

 C'est alors que quelqu'un la bouscula. Elle se tourna dans sa direction, par automatisme. La personne qui l'avait poussée, un travailleur, probablement un paysan qui rentrait chez lui après les travaux de la journée, la regardait aussi. Ce n'était qu'un regard colérique, plein de la mauvaise fois de celui qui ne s'excusera pas et qui tient à montrer combien il s'est sentit blessé et combien vous l'avez fait souffrir en étant sur son passage. Mais Claude eût l'impression qu'il la détaillait, qu'il l'examinait, et que dans son esprit se dessinait un autre visage, celui qui se trouvait, dessiné au crayon, sur une affiche qu'il avait vu récemment. Elle eût l'impression que la bouche grimaçante s'ouvrait, lentement, pour émettre un cri, une alerte en direction des soldats. Son dos se couvrit de sueur comme elle ne pouvait s'empêcher de prendre une expression terrifiée. Puis l'homme, probablement satisfait de son petit effet, se détourna et s'éloigna tranquillement. Le suivant des yeux, Claude lâcha discrètement un soupir de soulagement, qui s'effaça bien vite dans l'air du soir. Elle se rappelait soudain combien elle était vulnérable, là, exposée à la vue de tous, comme un tas d'or abandonné. Elle devait partir. Tout de suite. Elle chuchota rapidement :

- Très bien. Très bien. Je vous suis. On y va. Vite !

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L'Ordre Ancien. Empty A travers la ville

Message  Invité Jeu 26 Fév - 20:47

Cette Claude semblait perturbée. Il fallait la mettre en sécurité. La jeune fille avait à peine finit sa phrase que Cleya lui réattrapait la main, la tirant avec elle à travers la foule. Elle lui expliqua rapidement qu’elles se rendaient plus au nord de la Cité, mais ne s’attarda pas vraiment sur les détails. Ce n’était pas important. Elle comprendrait bien assez tôt, de toute manière. Oui, c’était désormais évident que Claude était spéciale, et elle, Cleya, se devait de le lui montrer. Elle devait l’amener à Raphaël, lequel saurait exactement quoi faire. Son plan semblait parfait. Presque trop d’ailleurs. Au détour d’une rue, la lumière bleutée renvoyée par le toit en turquoise d’une immense tour lui rappela soudainement qu’à cause de Martin, elle en avait oublié la véritable raison de son voyage à Navaterre. Son cœur se serra. Ses retrouvailles mouvementées, la découverte de l’Ordre, les apprentissages de Raphaël et Claire… Tout cela lui avait un instant permis de rêver qu’elle était une autre personne. Une « prêtresse Lumineuse » avait dit la fée. Oui, peut-être que c’était vrai. Peut-être même que l’Ordre avait bel et bien besoins d’elle. Mais elle ne voulait pas de ça. Elle avait choisis un autre chemin. Les doigts de Claude se resserrant sur sa main la firent redescendre sur terre. Elles passaient près d’un groupe de soldats qui riaient bruyamment. Vraiment charmants, ironisa la rousse. Elle manqua de peu de rater la fine ruelle qui menait sur la petite cour d’entrée. Lorsqu’elles furent toutes deux devant la maison aux murs d’or, Cleya cessa enfin de courir. Voilà. Elles étaient rentrées. Mais était-ce une vrai bonne idée, finalement ? Car si secourir cette jeune fille lui avait paru tout à fait naturel, peut-être que Martin, ou Raphaël, déciderait de la dénoncer ? Après tout, elles avaient croisé des affichettes avec son visage dessiné dessus dans leur chemin. Le cœur de la jeune femme se serra. Avait – elle fait une erreur ? Avant qu’elle ait le temps de dire quoi que ce soit, la porte s’ouvrit sur Martin, l’air passablement en colère.
- Cleya ! Mais qu’est ce qu’il t’a prit de t’enfuir comme ça ?
Il sembla seulement remarquer Claude.
- Qu’est ce que … Tu es devenue folle ?! Tu nous ramènes des souillons maintenant !
Cleya fronça les sourcils.
- Cette fille a un nom, Martin !
- Et alors ? Tu n’aurais pas dû l’amener ici. Tu imagines si elle parlait de… Enfin, on- et quand je dis « on » je ne pense pas que à toi et moi- risque d’avoir de sérieux problèmes !
- Tu ne sais rien sur elle !
- Et je ne veux rien savoir ! Tu sais ce que les gens de cette ville feraient à Claire ?!
La sorcière dégluti. Oui. Oui elle savait. Mais elle n’y avait pas songé. Elle avait été tellement excitée de trouver la fille qu’elle avait ressentie sur le toit qu’elle n’avait pensé à rien d’autre. Des larmes de rage menaçaient de rouler sur ses joues à n’importe quel instant. Elle serra les dents. Elle ne s’excuserait pas d’avoir trouvé Claude. Si Martin ne voulait rien savoir, c’était son problème. Mais elle, elle savait qu’elle lui avait sauvé la vie, car si Julien l’avait reconnue, elle n’aurait probablement pas passé la nuit. Non, elle ne devait d’excuses à personne. Et si le QG de l’Ordre était trop petit pour une tête de plus, alors Cleya préférait s’en aller. La gorge nouée, elle resserra son emprise sur la main de Claude.
- Viens, Claude. On n’est pas bienvenues ici.
Et elles s’éloignèrent sous les protestations de Martin, qui ne se risqua cependant pas à suivre son amie sorcière, qu’il savait susceptible et au lançage de sort facile.

Cleya embarqua son amie d’infortune plus profondément dans la ville. L’heure était avancée, et de ce côté de la Cité, les gens étaient chez eux. Les riches ne trainaient pas en ville. C’est donc sans s’inquiéter le moins du monde que Cleya lâcha la main de Claude pour aller s’asseoir sur un banc incrusté de rubis, face à une galerie marchande. Elle observa les voilages qui servaient d’entrée à la galerie se balancer dans l’air nocturne, faisant planer une douce odeur de viande dans la rue. Il devait y avoir un restaurant là derrière. Puis son regard se tourna vers Claude, qui étrangement n’avait encore pas prononcé le moindre mot. Cleya se dit que ce n’était pas très bon signe et espéra qu’elle ne s’enfuie pas en courant.
- Vous… Vous ne venez pas vous asseoir ? tenta – t – elle fébrilement.

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Message  Invité Jeu 26 Fév - 23:26

Claude avait suivit Cleya sans rien dire. Au bout de quelques temps, alors qu'elles avançaient dans les rues de la ville, alors qu'elle entrapercevait des affiches avec son visage et des soldats un peu partout, menaçants, alors qu'elle songeait à l'ange qu'elle avait peut-être blessé et qui devait être en train de décider comment la torturer le plus possible, galvanisé par la vengeance, et alors qu'elle pensait à Annie qui était, à l'heure qu'il était, sans doute morte, brûlée vive, quelque chose s'était éteint. Tout d'un coup, elle n'avait plus rien ressentit. Toute l'énergie qui l'avait animée jusque là avait disparu. Elle n'était pas fatiguée, non, elle était vide. Elle avait l'impression bizarre d'avoir quitté son corps et de le contempler, lui qui avançait bravement dans les rues, sans faiblir malgré tout ce qu'il avait vécu aujourd'hui. Elle, était restée calée à l'intérieur, le laissant marcher comme une bonne vieille machine, pendant qu'elle-même suivait, entraînée, immobile. Elle n'était plus vraiment là.

 C'est dans cet état second qu'elle assista à l'entrevue avec le dénommé Martin. Elle ne tiqua pas au mot de « souillon » - c'est comme ça que les gens du village les appelaient, elles, les esclaves, de toutes façons. Elle avait l'habitude - .En tout cas, l'entrevue avait signé la fin de leur endroit sûr, elle l'avait compris en voyant les deux personnes se disputer, car elle n'avait pas vraiment entendu ce qui se disait. Cette très mauvaise nouvelle ne l’atteignit même pas. Tout d'un coup, plus rien n'avait d'importance. Tout cela semblait si lointain, si...Factice. Elle flottait dans une sorte de brouillard qui troublait tout ce qu'elle voyait, et la réalité autour d'elle était floue et étrange. Ça n'avait aucun sens.

 Puis Cleya l'avait entraînée dans des quartiers plus aisés, la guidant par la main, et Claude s'était laissé faire, la suivant avec la démarche hésitante d'une somnambule. La jeune fille avait jeté de vague coups d’œil aux parures et aux pierres précieuses qui se trouvaient partout sur les façades des immeubles incrustées de vrai bois. Mr de Maistré aurait tué pour obtenir tout ça. D'ailleurs, il l'avait fait, elle pensa, avant de faire un vague signe de croix sur sa poitrine, comme chaque fois qu'elle repensait à ce qu'elle avait vu cette nuit là, où plutôt à ce qu'elle n'avait pas vu, non, elle n'avait rien vu, et la femme s'était arrêté sur grande place, lui avait lâché la main pour s'asseoir sur un banc, et maintenant elle la regardait. Elle lui demanda, d'un ton inquiet, si elle voulait venir s'asseoir avec elle.

 Claude ne répondit rien. Elle avait prévu de s'enfuir, n'est ce pas ? C'était peut-être la bonne chose à faire. Mais maintenant, elle ne voyait pas très bien pourquoi. Elle se laissa tomber sur le banc, silencieusement, le visage sans expression.

- Madame...Cleya...dit-elle d'une voix atone, tournant la tête vers elle.

 Il lui semblait que les sons qui sortaient de sa propre bouche lui parvenaient de très loin, comme si elle entendait l'écho de la voix de quelqu'un d'autre.

- Merci pour votre aide, poursuivit elle. Mais...Je n'en ai plus besoin, je vais me débrouiller.

 C'était vrai. Peu importe ce qui allait se passer, maintenant, elle n'avait plus peur. Elle n'avait plus rien.

- Je crois que j'ai blessé un ange, ajouta-t-elle sur le même ton que si elle avait récité une leçon. Vous feriez mieux de ne pas restez près de moi. S'il vous voie quand il viendra me chercher, il va vous emmener aussi. Je crois que vous ne voulez pas que ça vous arrive. C'est horrible, vous savez.

 Elle ne ressentait vraiment rien, même en disant ça. Après tout, qu'importe. Cette fois, elle le pensait vraiment. Qu'importait.

- Je vais vous laisser. C'est très gentil à vous de m'avoir aidé. Mais je vais me débrouiller seule , répéta-t-elle.

 Et elle se leva, puis observa, l'air absent, les quelques rues qui se tenaient autour d'elle, en choisit une au hasard, et s'éloigna, avec la sensation qu'elle ne s'arrêterait plus jamais de marcher, parce que maintenant, il n'y avait rien d'autre à faire.



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L'Ordre Ancien. Empty Un Ange blessé

Message  Invité Ven 27 Fév - 0:25

Pourquoi ?
Cleya regarda Claude s’éloigner doucement. Sans réagir. Elle ne sut pas véritablement pourquoi elle la laissait partir, comme ça, après tout ce qu’elle avait fait pour se rapprocher d’elle. Elle ne savait pas, mais elle n’arrivait pas à bouger. Seulement la regarder s’échapper, lui glisser entre les doigts. Cette vision lui donna envie de pleurer. D’ailleurs, c’est ce qu’elle fit. Elle se mit à verser de lourdes larmes qui roulèrent sur ses joues avant d’aller se briser dans le creux de son cou. Claude ne voulait pas de son aide. Claude voulait être seule. Claude partait. Claude avait blessé un Ange. Hein ? Cleya cligna des yeux. Claude avait blessé un Ange ? Elle secoua la tête, cherchant soudainement la silhouette de la jeune fille, qui avait malheureusement disparue. Elle jura. Comment ça, « j’ai peut-être blessé un Ange » ? Comment était-ce possible ? Un long frisson secoua la sorcière, qui se rendait doucement compte qu’elle avait eu raison : cette fille était très spéciale. Car si elle disait cela, Cleya ne doutait pas un instant qu’elle en ait bien vu un, et s’en soit échappée. Sauf que pourtant, c’était impossible. La rousse se mit à réfléchir à toute vitesse. Elle devait rattraper la fille. Elle devait la ramener à Raphaël. Et Martin pouvait bien dire ce qu’il voulait, elle ne changerait pas d’avis ! Le cœur soudainement gonflé de courage, la sorcière se releva. Elle savait très bien qu’elle ne la retrouverait pas dans le dédale de rues de cette Cité sans être aidée. Elle prit donc une profonde respiration, et se prépara à lancer un sortilège de localisation.

- Ce que j’ai perdu dans le temps me revient sur-le-champ !

Elle attendit un instant, puis un vent frais vint souffler dans son dos. Le sort fonctionnait ! Comme en transe, Cleya se mit à courir, poussée par cette brise magique qui la menait vers la fille. Il fallait qu’elle comprenne. Il fallait qu’elle sache. Parce que si cette fille avait battu un Ange, elle pourrait peut être lui apprendre comment faire. Elle retrouva la silhouette mal fagotée quelques rues plus loin, déambulant telle un fantôme entre les boutiques luxueuses. Un pâle sourire éclaira les lèvre de la jeune femme.

- Hé ! appela-t-elle, Claude ! Revenez, j’ai besoins de vous parler, s’il vous plait !

Devant elle, l’interpelée se figea.
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Message  Invité Ven 27 Fév - 1:01

Elle ne savait pas depuis combien de temps elle marchait – peut-être cinq minutes, peut-être des années – quand elle entendit un cri derrière elle. Elle se retourna. C'était la femme de tout à l'heure, qui arrivait en courant, en lui demandant de l'aide.

 Claude n'attendit pas que l'autre arrive à sa hauteur pour crier :

- Vous n'avez pas compris ? Vous ne devez pas me suivre. Vous allez mourir.

 Elle fit un geste de la main qui englobait tout ce qui les entouraient.

- Si je ne sors pas d'ici très vite, tout le monde va mourir. Je ne sais pas pourquoi cet ange n'est pas encore là. Peut-être qu'il joue avec moi. Mais je sais une chose, c'est qu'il va se venger. Et à ce moment là, si il y a une personne à côté, elle mourra aussi. Ou alors...Pire.

 A ces mots, elle sentit quelque chose de désagréable. Quelque chose qui venait d'entraver sa belle résolution, et qui avait fait sonner quelques fausses notes dans son ton monocorde. Une petite pointe, de rien du tout, mais de la peur. Elle expira profondément, secouant la tête – elle ne voulait pas avoir peur. Si elle avait peur, alors tout le reste viendrait, toutes les choses horribles – elle ne voulait pas que ça vienne. Non, non, non . Subitement en colère, elle se dirigea vers Cleya. Sa voix explosa quand elle se trouva tout prêt d'elle :

- Pourquoi vous me suivez ? Pourquoi vous me faites dire tout ça ? Je me sentais si bien il y a une minute ! J'avais oublié tout ce qui s'était passé ! J'avais oublié l'ange, j'avais oublié Annie, j'avais oublié les affiches, j'avais oublié tout, tout, même mes parents, même Maddy !

 Elle s'interrompit soudain, choquée. Elle s'était jurée ne plus jamais prononcer le nom de Maddy, et le voilà qui venait de mourir sur ses lèvres . Sa colère la quitta aussi vite qu'elle était venue. A la place, elle ressentait progressivement une grande lassitude. Elle le savait, de toute façon. Elle savait parfaitement que cette espèce de transe n'aurait jamais duré. C'était juste qu'elle la regrettait tellement. Parce que maintenant, elle allait devoir affronter tout ça.

 Elle leva des yeux fatigués vers Cleya, qui par miracle n'était pas partie en courant dans l'autre sens malgré cette tirade. Doucement, Claude ajouta :

- Excusez moi . Vraiment. J'aurais pas du. Ce n'est pas d'votre faute. J'ai eu une journée, disons...Compliquée.

 Elle montra du doigt une affiche qui battait dans le vent.

- Je ne sais même pas pourquoi ces choses montrent mon portrait. J’étais simplement censée venir ici pour récupérer des plantes...Et d'un seul coup...Tout ça est arrivé...L'ange...Annie qui se perd...Et ces avis de recherche, maintenant...Je ne comprends plus rien.

 Elle soupira, admettant sa défaite. Elle ne pouvait pas juste partir. Elle ne savait même pas où était la sortie. C'était cette femme qui avait raison. Enfin, elle espérait qu'elle pouvait se fier à elle, parce qu'elle-même n'était plus en état de décider quoi que ce soit.

- Allez y. Dites ce que vous avez à me dire.
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L'Ordre Ancien. Empty Pour une nouvelle identité

Message  Invité Ven 27 Fév - 1:38

Voir l’affiche avait eut l’effet d’un électrochoc. Cleya avait aussitôt su ce qu’elle avait à faire. Alors que Claude lui laissait finalement la parole, la soricière jeta un regard circulaire à la rue, repéra trois boutique, en choisis une qui lui semblait la plus chic, et sans rien dire, attrapa le bras de Claude, et la traina jusque devant la vitrine. Comme elles avaient de la chance, c’était dans la Cité Jaune le mois des affaires, ce qui signifiait que les boutiques était ouvertes sans pause jusqu’à la fin du-dit mois. Le plan semblait parfait. La fille que les gardes recherchaient, c’était une esclave. Alors Claude devait devenir une fille des Hautes Sphères. Un sourire malicieux sur les lèvres, le regard pétillant, Cleya se tourna vers la brune, qui la regardait sans vraiment comprendre.
- Il faut que tu me racontes ce qu’il t’es arrivé, cette histoire avec l’Ange. Et que tu me parles de ton amie, et d’où tu viens. Je veux tout savoir de toi, parce que je pourrais peut – être t’aider à résoudre tes problèmes. Je te l’ai dit, je pense que tu es spéciale. Mais pour ça, je dois te mettre en sécurité. Je vais t’acheter de nouveaux vêtements, puis tu prendras un bain, et je te coifferais. Comme ça, ils ne soupçonneront plus. Tu devras aussi me dire pourquoi ils te cherchent. Je sais que tu as dis que tu ne savais pas, mais on doit trouver.
Sur ce, elle poussa la porte de la boutique, laissant à Cleya le choix de la suivre ou non. Mais au fond, elle sentait que la fille allait se laisser tenter. Elle l’avait vu dans son regard, quand elle avait parlé de la mettre en sécurité.

A l’intérieur, l’espace était très propre, les vêtements mis en valeur sur des mannequins à taille humaine ; il y avait des chapeaux, des chaussures, des robes, et d’autres tenues composées, et même des bijoux ! Oui, il y avait dans cette boutique de quoi transformer Claude en une véritable princesse. Alors qu’elle s’approchait d’une tenue particulièrement élégante, une femme sortit de l’arrière boutique, souriante.
- Ce sont des modèles uniques. Tous faits mains. Cette tenue vient seulement d’être mise en exposition. Elle vous plait ?
Cleya acquiesça. Il s’agissait d’un pantalon serré en toile ocre, accompagné d’une chemise de soie blanche à manges bouffantes, et d’un serre taille en écailles de dragon en dégradé de bruns. Oui. C’était parfait. Claude serait superbe là-dedans.
- Oui. Je l’achète. Auriez vous des bottes qui iraient avec ? Pour des petits pieds, et plutôt hautes.
La vendeuse sembla étonnée. Comme si personne n’avait jamais dépensé autant d’argent dans sa boutique. Elle tira une longue boite de derrière le comptoir. Dedans reposaient des cuissardes taillées dans le même cuir de dragon qui composait le corset. Cleya fit signe qu’elle les prenait.
- Et je souhaiterais aussi un collier.
La vendeuse allait proposer un pendentif en argent qui pendait sur un présentoir, quand son regard croisa celui de la sorcière. Elle arrêta son geste, devinant que sa cliente allait lui faire une demande surprenante.
- En bois, si possible.
Un long frisson secoua la femme. En bois ? En vrai bois ? Cette acheteuse devait être sacrément puissante. Elle tira un écrin de velours noir d’un des tiroirs secret du buffet derrière elle. Elle en tira un long sautoir en perles de bois parfaitement rondes. Ce bijou devait couter une fortune.
- Je le prend.
Au même moment, la clochette annonçant l’entrée d’un nouveau client résonna dans la pièce, faisant sursauter la vendeuse qui n’en revenait pas de tout ce qu’elle venait de vendre.

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Message  Invité Lun 2 Mar - 0:39

Claude était assez étonnée par le comportement de Cleya. La jeune femme avait finalement décidé, au lieu de simplement lui parler, de rester avec elle . Elle ne s'attendait pas à ça. En ce moment même, l'ange était peut-être en train de les regarder, depuis le ciel – elle se crispa malgré elle - , et pourtant, la sorcière ne l'avait pas encore abandonnée. Elle lui proposait même de l'aider. L'esclave qu'elle était n'avait pas l'habitude d'un tel traitement.

 Mais ce n'était probablement pas l'esclave qui avait attiré cette femme. C'était bien plutôt l'ange qui l'intéressait, elle l'avait remarqué à ses yeux brillants quand elle avait prononcé ce mot. Claude était d'ailleurs toute aussi surprise qu'elle l'ait crue si vite. Si quelqu'un lui avait dit qu'un ange avait été blessé, elle l'aurait probablement ignoré – une si mauvaise blague ne méritait même pas un sourire gêné. Mais cette femme, elle commençait à le croire, était une sorcière. Et elle avait du en voir beaucoup d'autres. Qui sait si elle n'avait pas blessé un ange, elle aussi ? Qui sait – pour la première fois depuis quelques heures, Claude ressentit une certaine excitation – elle en avait peut-être même tué un. Elle n'aurait qu'à l'aider, ou simplement lui apprendre comment faire. Et ce cauchemar serait terminé.

 Elle hésita, observant la porte de la boutique où avait disparu Cleya. L'écouter était une chose ; la suivre, une autre, vu que certaines des conséquences qui pouvaient en découler étaient bien plus dangereuses. Et si c'était une ruse pour la capturer et la livrer ? Mais, décidément, elle ne voyait pas quelle ruse. Et une personne qui avait besoin d'argent n'allait pas le gaspiller dans une de ces boutiques de luxe. Ce fût cela qui la convainquit. Elle s'avançait vers la porte, quand un cri résonna derrière elle :

- Hé, toi !

 Elle se retourna, lentement. Elle s'attendait à à peu près tout – Annie, l'ange, Cleya qui s'était téléportée. Mais c'était le garde de tout à l'heure. Ses yeux s'écarquillèrent, et elle se figea tandis que l'autre lui fonçait dessus, l'air furibond.

- J'en reviens pas. J'en reviens pas. Dire que t'étais dans ma ligne, et que je t'ai même pas vue. Heureusement que mon cher ami m'a prévenu, sinon toi et ta copine m'auriez bien entubé.

 Près de lui, un gros papillon de nuit volait paresseusement dans l'air à côté de son visage rougit par la colère. Claude le regarda, puis ses yeux effarés revinrent sur le soldat qui, une fois à sa hauteur, l'empoigna violemment par le bras.

- Mais tu ne vas pas m'échapper comme ça, future promotion, continua-t-il avec un sourire.

- Lâchez moi ! S'exclama Claude en se débattant violemment.

 Elle parvint à placer quelques coups qui firent gémir son adversaire de douleurElle n'en était pas à son coup d'essai. La bagarre était une compétence requise pour l'esclave, qui devait pouvoir protéger la bourse de son maître. Mais le soldat ne venait pas de passer une journée épuisante, et il était armé. En quelques minutes, elle se retrouva plaquée contre un mur, une lame s'enfonçant douloureusement sous sa gorge, face à un garde à l'air plutôt content malgré les bleus et les écorchures qui lui couvraient le visage. Incapable de parler, Claude lui jeta un regard meurtrier. Pas maintenant ! Pas alors qu'elle avait peut-être trouvé un moyen de s'en sortir.

- Maintenant, tu vas te la fermer et me suivre, esclave. Oh, attends, non...Je ne voudrais pas que ta petite amie s'en sorte aussi bien. Dissimulation d'informations à propos d'une criminelle recherchée, et aide à cette criminelle pour qu'elle pénètre dans notre belle Ville. Pour ça aussi, j'ai le droit de l'emmener au poste. Où est elle ?

 Claude ne répondit rien. Ce n'était pas seulement un geste de loyauté envers une femme qu'elle connaissait à peine, c'était surtout qu'elle cherchait désespérément une solution pour se sortir de là. Il n'était pas question qu'elle laisse ce type capturer Cleya. C'était la seule personne qui pouvait l'aider. Et, s'il pénétrait maintenant dans la boutique, la sorcière se retrouvait seule face à un garde officiel dans le plus conservateur des quartiers. Pas de toute que ça n'allait pas tourner à son avantage...Et ce serait finit.

 Elle n'allait pas laisser cela arriver.  

- Répond.

- D'accord, oui , grimaça-t-elle, sentant la lame s'enfoncer dans sa peau.

 Le soldat lui jeta un regard mauvais, et écarta légèrement le poignard de sa gorge pour la laisser parler.

- Eh ben ? Vas-y. J'ai pas toute la nuit.

 Claude se mit à sourire, quoiqu'à l'intérieur, elle avait bien plutôt envie de vomir. Surtout qu'elle ne savait pas exactement ce qu'elle faisait. Mais avait-elle le choix ?

- Oui, je vais vous répondre. Alors je trouve que vous êtes...Vraiment repoussant. Sérieusement. C'est assez abominable.

 Il n'en fallait pas plus pour faire passer le teint du garde de jeune cerise à brique.

- Tu veux jouer à la plus maligne, l'esclave ? Tu sais quoi ? J'ai pas besoin de toi vivante pour gagner ma prime. Alors je te conseille de te calmer si tu veux que je te trouve une utilité.

 Claude roula des yeux, l'air passablement las. En elle-même, elle était paniquée. Ce soldat lui mettait littéralement le couteau sous la gorge, et elle provoquait intentionnellement sa colère. Et si elle se trompait ? Et si ça ne marchait pas ? Mais, elle ne su par quelle miracle, ses lèvres bougèrent encore :

- Ah oui ? Eh, sinon, c'est quoi, cette chose qui vous suit ? Votre ami ? C'est juste un animal de compagnie, ça, ça sait même pas vraiment parler. Enfin, ça m'étonne pas que cette créature soit votre seul amie. Vous devez pas plaire à beaucoup de gens, conclut-elle avec un petit rire.

 Cette fois, le soldat poussa un grognement de rage, brandit son arme, et l'abattit droit dans sa direction. Instinctivement, elle ferma les yeux, serra les dents, le ventre noué, pressentant le choc. Mais rien ne vint. A la place, elle sentit quelque chose trembler, bouger devant elle. Elle rouvrit les paupières et se remit à respirer – elle avait arrêté. Face à elle, plus de soldat. A la place, l'air ondulait. Elle mit quelques instants à comprendre qu'il ne s'agissait pas d'air, mais de fines particules de poussières qui, agglutinées les unes contre les autres, formait comme une barrière protectrice entre elle et la lame – elle déglutit – dont la pointe émergeait, arrêtée à quelques centimètres de sa gorge. En même temps, quelque part, cependant, elle était étrangement euphorique. C'était elle qui avait fait ça. Elle avait vraiment quelque chose.

 Elle attendit encore quelques instants, s'attendant à un cri de surprise, un bruit de fuite, n'importe quoi, mais rien. Crispée,s'attendant à un piège, elle se décala lentement de la barrière de poussière pour voir ce qu'il pouvait bien se passer derrière. Elle constata alors qu'il ne s'agissait pas d'une barrière : c'était un véritable bloc, où était pris son agresseur tout entier. Seule dépassait le haut de sa tête, et ses yeux exorbités ainsi que sa peau crayeuse indiquaient un sérieux manque d'oxygène.

- Oh, non, non, non

 Claude recula, sans savoir quoi faire. Elle n'avait pas envie de tuer ce type, mais en même temps, elle ne savait pas comment détruire ce qu'elle venait de produire. Mais si c'est moi qui vient de le faire... Effectivement, elle sentait quelque chose. C'était là, quelque part, et elle sentait qu'elle pouvait tout faire bouger. Elle sera les dents. Plus bas...Il faut que ça descende plus bas... Elle sentait chaque microscopique particule, à présent. Allez!

 Le bloc perdit de sa solidité et tomba, avant de se reconstituer quelques centimètres plus bas. Le visage de l'homme fût libéré. Il avala voracement quelques goulées d'air, avant que sa voix ne s'élève subitement :

- Alerte ! Aler...

BAM !

 Claude avait agit instinctivement, sans réfléchir. Par terre, le soldat gisait, inconscient. Près de sa tête, un bloc compact se désagrégeait doucement en petit tas d'une innocente poussière. L'adolescente, horrifiée, s'avança avec précaution jusqu'au corps. Elle attrapa son poignet, sans pouvoir surmonter un frisson de répulsion, et le lâcha avec soulagement : il était vivant.

 Bon, au moins, je ne suis toujours pas une criminelle.

 Elle se releva. Sous le corps du garde, le bloc de saletés qui l'avait emprisonné s'était maintenant changé en énorme tas sombre. Par comparaison, la place autour de lui semblait n'avoir jamais connu le moindre grain de poussière. Elle recula, jetant des regards alentour. Personne ne se trouvait là, aucun visage n'était apparu aux immenses fenêtres à colonnes, et aucune agitation étrange ne se faisait entendre nulle part. Mais Claude était prête à parier que si qui que ce soit tombait sur ce spectacle, ni elle ni sa bienfaitrice ne feraient très long feu. Elle hésita une demi-seconde à laisser le corps tout seul avant de décider qu'elle ne pourrait jamais trouver une explication qui ne la mettrait pas en danger si on lui en demandait une, et de se précipiter vers la boutique où avait disparu Cleya.

 Une clochette tinta quand elle poussa la porte. A l'intérieur se trouvait une pièce large, luxueuse, où se trouvaient des vêtements sur lesquels on pouvait encore respirer l'odeur de l'argent. Claude repéra immédiatement la femme rousse, qui parlait avec une vendeuse. Celle-ci l'aperçu et lui jeta un regard très méfiant. Elle ouvrit la bouche , probablement pour la jeter dehors, mais Claude la devança :

- Bonjour, Madame. Excusez moi de vous dérangez. Je suis la propriété de cette Dame ici-présente. Je suis venue lui délivrer un important message .

 Puis elle se tourna vers Cleya, et ajouta, avec regard insistant pour lui faire comprendre l'urgence de la situation sans se compromettre auprès de la vendeuse:

- Dame Cleya, il faudrait que nous partions, j'ai reçu un message de...- elle prit soin de bien choisir ses mots -notre ami. Il a un...petit problème. Dehors.

 Et elle ajouta:

- Maintenant.


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L'Ordre Ancien. Empty Chaque chose en son temps

Message  Invité Lun 2 Mar - 1:26

Évidemment, il avait été très aisé de comprendre que quelque chose de mauvais s’était passé. Alors Cleya descida d’entrer dans le jeu de Claude. Après tout, pour le moment, elle était encore sale et vêtue de guenilles. Elle prit donc un air neutre, entre condescendance et intérêt, et attrapant la bourse qui pendait à sa ceinture, elle indiqua posément à Claude de l’attendre à l’extérieur. La jeune fille eut l’air si désespérée d’être renvoyée dehors que la sorcière manqua de piquer un fou rire. Une fois la fille dehors, Cleya posa simplement la petite bourse sur le comptoir.

- Je pense qu’il y a largement le compte. Gardez la différence pour vous.

Elle attrapa le sac de ses achats, et s’éloigna aussitôt, lâchant un petit sourire en entendant le petit cri d’étonnement poussé par la vendeuse en découvrant la somme exorbitante qu’elle venait d’acquérir.

Quand la porte de la boutique se referma derrière elle, Cleya comprit immédiatement d’où venait le problème. Devant elle se tenait une Claude à la mine passablement embêtée, fixant le corps gisant de Julien. La rousse fit la moue. Elle se rapprocha du corps.

- Que s’est-il passé ?

Claude lui expliqua assez confusément qu’il lui avait sauté dessus, et avait voulu leur causer du trouble à toutes les deux, et qu’elle avait donc agis en conséquence. Cleya en fut d’ailleurs assez fière. Elle s’approcha du corps, jaugeant les dégâts.

- Bon, ce n’est rien de grave. Je m’en occupe.

Elle tendit une main au-dessus du visage du garde inconscient.

- Memoria ykalos !

Le sortilège qu’elle utilisa était d’un niveau supérieur aux sortilèges de base, aussi ses cheveux se ternirent soudainement, passant du roux scintillant à un blond mat. Mais cela en valait la peine. Devant elle défilèrent les souvenirs de Julien. Elle n’en revint pas quand elle découvrit ce que Claude avait fait, mais n’en dit rien. Puis doucement, elle s’évertua à réécrire ces souvenirs.

- Quand il se réveillera, il pensera s’être battu avec un homme bourré. C’est parfait. Bon, viens avec moi maintenant. Si tu veux être tranquille, tu dois changer d’identité.

Et elle s’éloigna en direction de la maison de Raphaël.

Elles arrivèrent au QG de l’ordre quelques minutes après seulement. L’endroit était silencieux, et étrangement, elles purent entrer sans être arrêtées par qui que ce soit. La sorcière esquissa un sourire en constant que la pièce semblait désormais normale, et que le sol sur lequel elles marchaient était un plancher. Rapidement, elles montèrent à l’étage, toujours sans croiser personne, jusque dans la suite de Cleya. Là, la prêtresse emmena Claude dans sa salle de bain.

- Je veux que tu te laves. Il y a du savon ici. Tu dois être aussi propre qu’une femme riche. Et tu mettras ces vêtements, ajouta-t-elle en posant la grand sac sur un fauteuil. Si tu as besoins de moi, je serais dans la pièce d’à côté. Je t’expliquerais tout le reste une fois que tu seras prête.

Elle lui fit un dernier chaleureux sourire avant de refermer la porte, la laissant hébété dans cette grande salle de bain. Cleya avait terriblement hâte de voir Claude revêtir les vêtements de marque qu’elle lui avait acheté. Elle paria mentalement que le sautoir en bois lui irait à merveille. Sur ces douces pensées, elle se laissa tomber lourdement sur son lit, et attendit.
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Message  Invité Mar 3 Mar - 1:40

Claude avait failli se mettre à déballer toute la vérité quand Cleya avait semblé ne rien comprendre. Au lieu de quoi elle s'était dépêchée de sortir, comme si cela avait pu pousser sa fausse maîtresse à arriver un peu plus vite. Ca n'avait pas été le cas. Les quelques minutes qu'elle avait passée debout, dehors, toute seule avec le corps du soldat toujours inconscient, comptaient désormais parmi certaines des pires de sa vie – mais pour l'instant, l'ange détenait toujours le grand palmarès. Elle avait sursauté à chaque son, à chaque mouvement qu'elle percevait, persuadée qu'on allait donner l'alerte d'une minute à l'autre. Heureusement, Cleya était sortie avant qu'il n'arrive quoi que ce soit.

 Il avait alors fallu expliquer ce qu'il s'était passé. Claude avait fait de son mieux, ne pouvant s'empêcher de bafouiller et d'hésiter, tant par la fatigue que par la honte. Je nous ai mises en danger... Et puis, ce qu'elle avait fait – elle ne savait pas comment l'appeler – ce n'était pas contrôlé, pas réussi, et elle n'en était pas très fière non plus. Elle avait provoqué le soldat pour qu'il tente de la tuer parce qu'elle savait qu'autrement elle n'aurait pas pu y arriver. Rien à voir avec l'éclatante énergie qui sortit sans effort apparent des mains de Cleya pour se changer en flot d'images défilante où elle se reconnu avec étonnement. Elle compris rapidement qu'il s'agissait de souvenirs en regardant la scène. La rousse regardait pensivement, sans rien dire. J'ai fait n'importe quoi , compris Claude, et elle baissa la tête avec humilité. Elle savait parfaitement qu'elle n'était pas du niveau de la sorcière.

 De la sorcière...Elle prit alors conscience qu'elle venait vraiment de voir une sorcière faire de la magie. Elle observa Cleya avec un semblant d'inquiétude – allait-elle se transformer en bête féroce et essayer de la dévorer, après ça ? Non, décida-t-elle soudain. C'était probablement n'importe quoi. En fait, à présent qu'elle avait vu ces affiches à son effigie faisant d'elle une criminelle aux yeux du monde, elle ne pouvait pas ne pas penser à quel point la vérité était rarement décelable. Alors, la chercher dans les racontars des gens qui n'avaient du sortir du village que deux fois dans leur vie et se targuaient d'avoir combattu des milliers de magiciens enragés...Elle avait toujours su que ce ne pouvait pas être possible. Après tout, son livre sur la magie ne parlait pas de transformation incontrôlable du tout. Maintenant qu'elle y songeait, ces rumeurs effrayantes n'étaient apparues qu'après l'attentat magique sur la Ville, quand on avait ordonné la grande chasse aux sorcières. Peut être qu'on avait mentit à leur sujet, comme au sien. Mais pourquoi mentir à son sujet ?

 Elle n'avait cependant pas eu le temps de réfléchir plus avant qu'elles s'étaient retrouvées à l'endroit de tout à l'heure. Cleya l'avait emmenée d'autorité dans une salle de bain avant de lui ordonner de se nettoyer et de se préparer – comme une « femme riche » . Elle lui jeta un regard étonné – pourquoi ? Puis, elle compris le plan que devait avoir Cleya, la déguiser. Elle soupira. Pourquoi pas, mais rien au monde ne pourrait la faire passer, elle, l'esclave ayant à peine lu quelques livres tombés d'un chariot, pour une de ces personnes stoïques et hautaines, élégantes, douées de toutes sortes de talents et d'une intelligence impressionnante. Enfin, elle allait essayer. Elle devait bien ça à la femme qui l'avait mainte fois sauvée ces dernières  heures. Heures...minutes ? Tout était arrivé si vite qu'elle avait l'impression que dix ans étaient passés. Elle se serait cru dans un de ses romans d'aventures qu'elle-même, enfant, trouvait exagéré tellement de choses se produisaient à la suite, mais là, c'était la vraie vie.

 Pour ne pas faire attendre Cleya, elle se dépêcha de se déshabiller, avant de faire couler avec précaution l'eau dans la grande baignoire au centre de la pièce. Étrangement, ces gestes lui firent se sentir un peu mieux. Elle avait l'habitude de s'occuper de ce genre de chose, à la ferme. Monsieur de Maistré ne faisait pas couler son bain lui-même, bien entendu. Mais c'était bien maigre pour la réconforter. Sa réalité à elle, c'était les douches communes de l'orphelinat, avec l'eau froide surtout en hiver, puis les douches des dortoirs des esclaves de monsieur de Maistré, toujours avec la même eau, peut-être même un peu plus glacée, avec les soupirs et les cris quand elle explosait sur les corps fatigués par une longue journée de travail. Mais il y avait aussi des discussions, des rires. C'était souvent le moment, quand elle n'étaient pas trop épuisées, où elles redevenaient l'espace d'un instant des personnes qui s'amusaient, tout simplement, s'éclaboussant, se moquant de monsieur de Maistré, se bousculant, se poursuivant pendant quelques minutes. D'un seul coup, elle se sentit très seule. Cleya était là, bien sûr, mais elle ne la connaissait pas. Ses amies lui manquaient.

 Elle sortit dans l'eau avec un soupir, après s'être consciencieusement lavée dans une eau inhabituellement chaude – mais il fallait bien ça pour être une femme riche. Elle avait tellement envie de dormir, songea-t-elle en se séchant, tellement envie de se laisser tomber là, par terre,tant elle se sentait fatiguée. Elle parvint à s'habiller en bâillant. L'étoffe glissa sur sa peau avec une douceur inhabituelle. Elle constata avec étonnement qu'elle avait un vêtement pour homme. C'était en tout cas ce que l'on pouvait déduire du fait que toutes les femmes portaient des jupes, sans exceptions, dans son village, pas des pantalons. Mais elle n'en était sortie que pour s'approcher de la forêt, donc...Elle enfila avec intérêt cet habit inhabituel. Elle fit quelques pas, intimidée, craignant que les vêtements ne se cassent à chaque pas. Ils paraissaient si fragiles. Pourquoi les gens riches s'habillaient-ils si finement ? Elle aurait voulu avoir une armure pour se protéger de tous les anges de la terre.

 Comme les coutures ne décidaient pas de se briser, Claude s'enhardit, déambula quelques minutes dans la pièce. Un grand sourire vint illuminer son visage, autant parce qu'elle pouvait sourire pour beaucoup de choses quand elle était fatiguée que parce qu'elle était réellement contente. C'était tellement bien ! Elle avait la sensation de pouvoir tout accomplir, maintenant. Pourquoi n'avait-elle pas mis un de ces vêtements plus tôt ? Ah oui – parce qu'elle n'avait pas le droit. Elle secoua la tête, pensant à toutes ces occasions perdues.

 Elle enfila également les bottes, puis découvrit enfin un collier – un collier de bois. Elle suffoqua et failli laisser tomber le précieux objet. Il y avait de quoi faire s'évanouir un Monsieur de Maistré en pleine forme et lui faire vendre sans état d'âme ferme, femme et enfants. C'était de véritables perles, douces et arrondies, alignées les unes à côté des autres. C'était presque insultant de les voir se découper dans cette paume banale et couverte de cals, pensa Claude en essayant de les tenir sans trop les toucher. Pouvait-elle vraiment mettre ça autour de son cou ? Elle hésita. Cela pourrait parfaire le déguisement, aucun doute. Un tel collier ne pouvait qu'appartenir à une personne de la plus haute société, qu'importait tout le reste. Mais elle avait si peur de le casser...Et combien d'argent devrait-elle à Cleya ? La tête lui tourna. Il lui faudrait toute sa vie pour rembourser. Mais comment une esclave pourrait-elle gagner autant d'argent ? Sa propre vie ne suffirait pas – d'après l'affiche, elle ne valait pour l'instant même pas de pièces d'or. De toute façon, je ne sais même pas si je vais rester en vie, pour l'instant. Et seul ça peut m'y aider. Alors tant pis. Je verrais plus tard . Elle noua le collier autour de son cou, frissonnant au contact des perles sur sa peau nue. Elle se regarda vaguement dans le miroir de la pièce. Ses longs cheveux mouillés allaient tremper ces tissus luxueux si elle les sortaient de la serviette où elles les avaient enroulés. Elle soupira, puis se dépêcha de se nouer les cheveux avec un ruban qu'elle avait gardé dans une poche de sa robe. Enfin, elle était prête à sortit.

 Avant, cependant, elle songea cependant à vider la baignoire. Encore, d'ailleurs, une chose qu'elle devait faire habituellement pour monsieur de Maistré. Elle détestait faire ça, parce qu'il fallait mettre la main dans l'eau sale qu'il avait utilisée – beurk – et qu'ensuite, même quand elle se passait la main sous l'eau froide, elle avait l'impression répugnante qu'il en restait quelque chose, à cause du métal logé dans le creux de sa paume. Elle regarda sa main, l'air absent. Le métal...Cela lui rappelait quelque chose...Soudain, elle se souvint.

- Oh, non ! Seigneur !

 Elle jurait rarement, parce que le père leur avait appris que c'était quelque chose de l'ordre de l'abominable et que jurer était mal vu au village, mais c'était vraiment une occasion de jurer.

 Elle ouvrit la porte, et se précipita sur Cleya sans faire attention au fait qu'elle semblait endormie:

- J'avais complètement oublié, expliqua-t-elle, mais il faut absolument que je sois au village dans deux jours.

 Elle leva la paume de sa main pour la montrer à la sorcière :

- Sinon, le sortilège va se déclencher.



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Message  Invité Mar 3 Mar - 2:46

La jeune femme qui sortit en trombe de la salle de bain n’avait plus rien d’une esclave. Un instant, Cleya eut même peur, se demandant ce que cette femme avait pu faire à Claude. Puis elle avait reconnu le bois autour de son cou, les écailles du serre – taille, la toile fine du pantalon. Cette belle jeune fille, c’était Claude. La rousse n’en revenait pas. Que le changement fut aussi radical était très bon, car personne ne se douterait alors qu’il pouvait s’agir de la même personne. D’autant que la rançon était si médiocre que l’on ne soupçonnerait jamais une femme portant un sautoir comptant tant de perles de bois. Cleya était fière de son effet. Oui, c’était très réussi. Mais l’agitation de sa nouvelle compagne la sortit du demi-sommeil dans lequel elle était plongée. Elle annonça qu’elle devait rejoindre son village sous peine de subir un sortilège tout à fait douloureux. Ça, la rouquine ne l’avait certes pas prévu. Elle ne voulait pas être déjà séparée de sa Claude. Elle voulait la présenter à Raphaël. Elle voulait tout savoir sur elle. Elle voulait comprendre le lien télépathique qui avait été créé entre elles. Elle voulait apprendre ce qu’elle savait sur les anges, et sa maitrise de la magie. Non, elle ne pouvait pas se permettre de la perdre comme cela.

Alors cette main tendue devant elle était sans nul doute un problème. Cleya avait entendu parler de ce sortilège, c’était de la magie du sang, et seul le lanceur pouvait le défaire. Bref, cela n’arrangeait pas du tout la rousse. Elle serra les dents. Comment faire ? Elles ne pourraient pas être en deux jours dans quelque village que ce soit. Pas à pied. Pas comme ça. La sorcière hésita. Elle connaissait bien un sortilège qui pourrait les téléporter n’importe où. Oui mais voilà, cela requerrait absolument toute son énergie, et il lui faudrait certainement des semaines pour se remettre. Elle se mordit la lèvre inférieure. Autant demander à Claude ce qu’elle en pensait. Résignée, elle demanda d’une petite voix :

- Je peux nous emmener dans ton village. Mais ça risque de m’épuiser, et je ne pourrais plus utiliser ma magie pour quelques temps. Est-ce loin chez toi ? Et ce sort, que fait-il exactement ?

Elle n’était pas certaine de vouloir savoir ce que faisait le sort, surtout voyant l’expression apeurée de la jeune fille. Cela devait sans doute être douloureux. Très douloureux. Elle se mordit l’intérieur de la joue, et attendit la réponse.

*

Bien évidemment, H avait quitté la capitale vampire avec la vitesse que procure la peur. Oui, il avait eu peur, presque autant que le jour où Victor avait décidé de l’exiler. Il fuyait donc, les chevaux de son attelage lancés au grand galop, la mine contrite et l’esprit tourmenté. Pourquoi fallait – il toujours qu’il chercha les ennuis ? Le vampire poussa un long soupire.

Alors comme ça, il lui faudrait attraper une sorcière ? Une prêtresse en réalité. Il savait que ce ne serait pas une mince affaire. Elles avaient des pouvoirs naturels qui éloignaient toute créature maléfique. Ça, peu de monde le savait, car les humains confondaient la plupart du temps sorcières et prêtresses. En fait, pas seulement les humains. Eux – même parfois ne connaissaient même pas leur véritable nature, et l’étendue de leurs pouvoirs. Avec de la chance, celle-ci ne faisait pas exception à la règle, et n’était pas à Navaterre pour rallier l’Ordre Ancien et son entêté mage Raphaël, mais pour une toute autre raison ? Avec de la chance… Cela semblait cependant très peu probable. En effet les espions de Victor étaient partout, et ils avaient rapporté que le Cercle se reformait. C’était mauvais. Le dernier Cercle avait faillit éradiquer la race des enfants de la Lune, et c’était d’ailleurs à leur prêtresse, la légendaire Yrgûl, qu’ils devaient le fléau de craindre la lumière du jour. Avant elle, ils étaient éblouis, affaiblis, mais n’en mourraient pas. Heureusement pour eux, Yrgûl s’était laissée être consumée par sa puissante magie et s’était éteinte en lançant sa malédiction. Désormais, ils étaient esclaves du temps.

Mais H avait sentit la magie de la fille, elle n’était pas encore dangereuse. Et il le sentait, elle n’était pas intéressée par les idéaux de paix de l’Ordre. Elle aimait le pouvoir. Elle aimait la magie. Avec de la chance, il pourrait en faire une alliée des chasseurs. En tout cas, il essaierait. Au bout d’un certain temps, elle pourrait même être en mesure de lever la malédiction d’Yrgûl – enfin, rien n’était moins sur.

Avant tout cela, il fallait atteindre la Cité Jaune. Et pour cela, il lui faudrait un transport plus rapide qu’une calèche. Il se savait être à deux jours de vol à dos de dragon de la capitale. Et à une journée de course d’un village appelé Felidor, réputé pour son marché aux dragons prestigieux. Il avait donc en tête de gagner le village, de prendre l’un de ses animaux, et de rejoindre la Cité et remplir sa mission au plus vite. Car en attendant cela, il ne pourrait qu’observer le paysage, et s’inquiéter de son sort.

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Message  Invité Ven 11 Sep - 13:14

Au fur et à mesure qu'elle se rendait compte de l'ampleur des dégâts, elle se calmait. Parce que l'ampleur ne l'était pas tant que ça. C'est pourquoi elle pu répondre d'une voix un peu plus normale à la question de la nature du sort qui l'obligeait à partir et effacer toute trace de panique de son visage :

- C'est simplement le sortilège des esclaves...Comme ça, on risque pas de s'enfuir. C'est pas du vrai métal, c'est une mue de Changeforme ensorcelée pour prendre cette forme et obéir à la personne qui la possède. Celle-ci peut lui donner tous les ordres qu'elle veut, enfin, il faut qu'il puisse le lui dire, donc ça ne marche pas à distance . C'est surtout utile pour les voyages : on peut lui dire de se déclencher si elle ne touche pas tel autre métal vivant dans tel laps de temps. Ah, oui, chacun a une identité différentes, ils se reconnaissent entre eux, c'est pour ça que ça marche.

 Elle montra sa main et compléta, d'un ton détaché :

-  Et quand on n'obéit pas à l'ordre qu'a reçu le métal, alors il se met en marche. C'est à dire, il s'étend sur la peau, et dans notre tête, on sent une brûlure au fur et à mesure. Elle n'est pas réelle, c'est parce que le sortilège est relié à notre tête. Si on attend trop longtemps, alors le métal nous enferme et on meurt brûlé...Enfin...Sans l'être. Mais le possesseur du sort peu aussi le déclencher quand il le veut. Donc c'est également utile pour les punitions, conclut-elle en haussant les épaules.

 Elle ne se sentait pas particulièrement effrayée par ce qu'elle disait, parce que c'était son quotidien, tout simplement. Et puis, si elle n'avait pas peur, c'était surtout parce qu'elle savait autre chose :

- Il faut pas s'inquiéter pour ça... Si j'arrive à temps pour toucher la plaque à l'entrée du village, ça ne se déclenchera pas. Alors...

 Elle baissa les yeux, à nouveaux tourmentée. En fait, tout n'irait pas si bien que ça. Elle était recherchée, maintenant. Qui sait si la nouvelle ne s'était pas étendue jusque chez elle ? Et monsieur de Maistré ? Qu'allait-il lui faire ? Nul doute qu'il chercherait à la livrer sans hésiter. Elle pouvait presque le voir saisir sa main – c'était nécessaire pour lancer le sort – et lui donner l'ordre d'aller se livrer elle-même, avec un de ces sale petits sourires qu'il pouvait avoir quand il trouvait une punition particulièrement cruelle. Elle pouvait même deviner qu'il allait la torturer avant . En fait, c'était évident – pourquoi s'embêter à garder en bon état une chose qu'on va bientôt jeter ?

- Je sais pas si on peut utiliser votre sort...C'est très dangereux...Et puis, on peut y être dans deux jours...Mais je serais attendue, là-bas...

 Une idée se formait dans son esprit, et elle parvint finalement à la formuler à voix haute :

- Si on doit l'utiliser, on ferait mieux de le garder pour plus tard...Au cas où on aurait besoin de s'enfuir.

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L'Ordre Ancien. Empty Préparer un voyage

Message  Invité Dim 13 Sep - 19:20

La réaction relativement détendue de Claude avait pour le moins interloqué Cleya. Comment pouvait-elle, une seconde avant, être complètement désemparée, et soudainement basculer dans ce calme ? C’est qu’elle devait avoir l’habitude de voir ce sort en action. La sorcière frissonna, se demandant ce qu’avait pût être le quotidien de cette fille avant d’arriver à Navaterre. Avant de la rencontrer.

Cleya, sur la Verte, n’avait jamais connu ces différences, cet éloignement qu’impose le continent entre ceux « d’en Haut » et les autres. Elle ne l’avait appris qu’en débarquant sur les rivages du Sud. Heureusement pour elle, elle connaissait des tours pour faire apparaître de l’or, et elle n’avait eu aucun mal à se faire passer pour une Riche. Et il fallait croire que prsonne ne s’en prenait aux riches.

Claude indiqua que le métal dans sa main était en fait une peau de changeforme. La jeune femme n’était pas certaine de savoir ce que c’était exactement, mais elle se doutait que ce ne devait pas être facile de vivre avec ça accroché à soi. En tout cas, la rousse n’aurait pas aimé. Elle se racla la gorge. La brune était entrain d’expliquer de la voix la plus posée qui soit qu’elle risquait « seulement de mourir ». C’était improbable comme situation. Mais si Claude disait qu’elles pouvaient atteindre son village en deux jours, alors peut-être qu’en effet, il était plus sage de protéger sa magie. De plus, pour peu que le soleil reste de sortie, elle regagnerait du pouvoir le temps du voyage, et serait plus à même de les défendre en cas de problème. Elle jeta un regard vers la fenêtre. Le ciel était sombre au dehors. Elle se demanda : fallait-il partir dès maintenant ? Elle avait déjà voyagé de nuit, elle savait que c’était bien plus calme. Et plus sûr, malgré ce qu’on pouvait croire. Parce que les bandits ne sortaient pas la nuit, ils avaient trop peur, et c’était eux que Cleya craignait le plus. Elle n’avait pas peur des monstre ; ses pouvoirs les faisaient fuir la plupart du temps. Mais les hommes… C’était autre chose. Ils n’avaient pas toujours peur. Ils posaient problème parfois. Son regard chaud-froid se reporta sur son invitée. Il fallait peut-être lui demander son avis. Et Martin ? Qu’allaient dire les autres, quand ils verraient qu’elle avait déserté ? Mais après tout, elle ne leur devait rien. Elle ne comprenait pas ce qui était si important. Raphaël pouvait attendre.

- J’ai peur de ne pas arriver à temps. Tu penses que nous pouvons partir demain matin ? Je pensais partir tout de suite. Je crois savoir qu’il y a une écurie qui vend des chevaux à la sortie de la Ville. Mais tu préfères peut-être passer une bonne nuit avant le départ ? Je ne me rends pas compte de la distance.

Claude déciderait. Après, elle enchanterait une bourse pour lui fournir autant d’or qu’elle en voudrait. Et elles pourraient filer. Une petite voix dans sa tête questionna tout de même Cleya : Martin te pardonnera-t-il une deuxième fuite ?
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