Ness était soulagé que Christiana, encouragée par Démétrios qui avait toute sa reconnaissance, en vienne à des résolutions plus raisonnables . C'est avec une vive satisfaction, qu'il reçut enfin de ses mains le précieux coffret dont elle avait sans doute retiré tout ce qui pouvait être compromettant pour le clan Von Carter. Il lui tardait de l'ouvrir et c'est ce qu'il fit pour constater la présence effective d'un petit carnet noir épais. Un bref coup d’œil lui permit de s'assurer qu'aucune page n'avait été arrachée à la hâte. Il fut rassuré de constater qu'il avait l'air intact. En revanche il lui parut assez étonnant qu'une si grosse boîte ne servit à contenir qu'un simple carnet. De toute évidence, la femme restant toujours plus rouée que l'homme, Chrisitana avait réussi à escamoter le probable reste du contenu. Sans doute des documents ayant trait aux activités lucratives de sa famille.
Mais finalement, ce n'était pas cela le plus important. Le Dévoreur ne lui avait pas tout dit mais le chef du F.B.I. se doutait qu'un péril supérieur motivait sa requête. Il y avait l'implication de Kyle Von Carter, dans les missions que Stanzas confiait à divers agents et l'inspecteur savait qu'elles avaient un lien avec la seconde guerre mondiale. Il connaissait succinctement l'histoire de son ami même si le Roumain ne s'ouvrait pas facilement. Il était fort probable que celui-ci cherchait des renseignements sur sa famille, et devait par conséquent dénicher et ouvrir des dossiers très compromettants pour les Nazis. Enfin, ils étaient déjà compromis jusqu'au cou, mais Ness n'était pas assez naïf pour croire que Stanzas se contenterait de trouver les noms des responsables de son deuil sans rien tenter par la suite. Cet homme poursuivait un dessein personnel, il en était persuadé.
S'il acceptait de l'aider, ce n'était pas pour ce seul but, bien qu'il pût le comprendre, mais parce que le Dévoreur, au delà de son affliction intime, voulait que les choses changent sur le plan global. Que les Hommes arrêtent de massacrer les Hommes. Cette conviction était partagée par Ness, même si elle pouvait le mettre partiellement au chômage. Bien entendu, on ne peut être enquêteur du F.B.I et concevoir un tel projet sans le trouver quelque peu naïf. Mais les bains de sang peuvent aussi user et lasser. Après tout, le monde avait besoin de Héros. Il n'y avait qu'à voir ces nouvelles bandes dessinées qui fleurissaient pendant la guerre et après guerre, faisant leur fond de super héros. Les enfants en étaient d'ardents consommateurs mais pas seulement. Lui-même en lisait, en riant parfois il faut bien avouer. Il trouvait tout de même que cela aurait été bien commode d'avoir quelques super héros comme amis pour nettoyer New York. Et si Le Dévoreur était ce genre de Héros ? Et si la réalité rattrapait la fiction pour la dépasser finalement ?
Utopique ? Pas vraiment! Après tout, la réalité avait bien dépassé la fiction avec les camps de la mort de la seconde guerre mondiale et les expérimentations qu'elle avait engendré dans les deux camps. Chaque camp s'était doté à sa manière d'une arme de destruction massive et les découvertes faites dans les camps nazis comme dans les bases scientifiques américaines avaient, selon, Stanzas, ouvert le champ aux guerres modernes que Ness ne connaissait pas et qu'il ne tenait pas trop à connaître... Entendre son ami le Grand Voyageur en parler par allusion avait suffi à le glacer d'effroi. Drones, guerre chimique, manipulation mentale, surveillance aérienne globale de la terre, guerre de l'espace... Découverte de l'existence de formes de vies autres que terrestres. La liste avait de quoi donner le frisson. Si l'avenir réservait vraiment cela à ses enfants, Ness se disait qu'il faudrait des défenseurs à la raison et à l'Humanité. Peut-être bien que le professeur était en train de réunir ces défenseurs ... Peut-être bien que le monde allait vivre une ère nouvelle.
Il songeait à tout cela tout en écoutant les paroles de Démétrios et en les comparant malgré lui à celle de la fille Von Carter. Il choisit de ne pas tenir compte de sa pirouette visant à le poser une homme stupide qui ne dit pas les choses assez vite et la pousse à réagir avec méfiance, alors même qu'il était évident qu'il ne pouvait exposer le Dévoreur devant le personnel du Bacchus aussi facilement en l'associant ouvertement aux raisons de sa venue. Ce n'est que poussé dans ses retranchement par une mauvaise volonté évidente de la jeune femme, et en petit comité avec le jeune grec et elle, qu'il pouvait prendre un tel risque. Mais si on décidait de ne pas tenir compte de sa mauvaise foi, elle n'était pas foncièrement mauvaise. Cependant, ses motivations tranchaient étrangement avec celles de son compagnon, bien qu'étant finalement très humaines en apparence... Aah ! l'amour! Oui mais il n'y avait certainement pas que cela dans le crâne de Mademoiselle Von Carter. On pouvait avoir un but personnel et le conjuguer avec une vision plus large et humaniste et c'était ce que Ness percevait chez le Grec. En revanche, le discours de Mademoiselle Von Carter semblait s'attacher à sa vie future avec Kyle, leurs projets d'avant la Guerre, et en filigrane une certaine aisance qui n'excluait peut-être pas de se servir des prérogatives de ce dernier en tant que médecin pour établir des activités peut-être douteuses. Ness se dit qu'il avait certainement un raisonnement subjectif induit par sa connaissance du milieu maffieux,et du clan Von Carter. On ne sortait pas de l'illégalité si facilement quand on avait baigné dedans dès la naissance. Chassez le naturel et il revient au galop. Il imaginait mal Christiana en épouse aimante et dévouée à son médecin de mari. Il voyait en revanche très bien tous les trafics opiacés qu'un médecin pouvait alimenter s'il était abusé par un proche. Il chassa de son esprit la vision dérangeante d'une femme matrone à la tête d'un narco-trafic sous les palmiers californiens.
Mais plus troublant, elle ne semblait pas envisager que la guerre eût pu changer Kyle et également ses projets. C'était comme si elle s'attendait à retrouver le même qu'avant son départ. Or, même s'il en savait peu sur les missions que Le Dévoreur confiait au jeune homme, et sur les circonstances de leur rencontre et de leur arrangement, il apparaissait comme évident que ce dernier avait préféré travailler pour Stanzas que de revenir vers sa dulcinée dès la fin de la guerre. C'était pour le moins surprenant venant d'un homme censé être amoureux . Mais ce pouvait être aussi le fait d'un esprit valeureux en quête de rédemption. La guerre, ça vous change un homme. La métamorphose peut s'opérer dans les deux sens et aussi bien révéler des héros que des crapules. Il y avait fort à parier que Kyle Von Carter, qui ne se nommait d'ailleurs plus ainsi, ait grandement évolué dans ses aspirations et renoncé aux premières... Le choc risquait d'être rude...
Mais Christiana avait assez de force en elle pour y faire face. Elle n'était pas le genre de femme à se laisser abattre facilement. Il fallait maintenant songer à conduire les deux acolytes à l'aéroport où un vol sur un bimoteur à hélices les attendait pour Targoviste avec escale à Londres. Le vol durerait bien deux jours mais c'était encore le moyen le plus rapide hormis le voyage par contact avec le professeur Stanzas qui rendait bien plus malade. De toute façon, pas de Dévoreur sous la main! L'homme avait tellement à faire avec son projet. Eliott se demandait bien de quelle façon mademoiselle Von Carter pourrait lui être utile mais ne doutait pas que son ami y voyait une finalité qui lui échappait.
- Nous devons songer à partir mademoiselle... Il vaudrait peut-être mieux que vous réunissiez quelques affaires personnelles. En fait, vous et monsieur de Zéa seraient les invités personnels de Mr Stanzas à Targoviste et pour quelque jours. J'espère que vous ne craigniez pas l'av...
Il n'eut pas le temps de finir de prononcer les mots qu'il disait tout en feuilletant le carnet sans lever les yeux vers la jeune femme. Un cri de surprise l'interrompit net tandis qu'un "swouiiitchzzz" accompagné d'un éclair blanc déchirait l'air. Machinalement, il cria :
- NOOOOON§ Christiana !!! Pour l'amour de Dieu! ... Mais il eut immédiatement conscience de la vanité de la supplique. Le cri venait de Démétrios qui avait vu sous ses yeux Christiana se dématérialiser. Les deux hommes échangèrent un regard effaré. Ils songèrent certainement "Mais que s'est-il passé ? Pourquoi a-t-elle choisi de disparaître alors qu'un arrangement était trouvé ? "
- Bon sang ! Comment vais-je annoncer ça à Stanzas moi ! Pourquoi a-t-elle décidé de s'enfuir ?
Le Grec semblait réfléchir avant de formuler une réponse, ce qui était parfois le signe d'une intelligence éclairée, mais en l'occurence le temps pressait. Ness décida qu'il pourrait aussi bien réfléchir dans l'avion qui les transporterait vers la Roumanie et secoua la tête d'un air très embêté.
- Venez-vous avec moi , monsieur de Zéa ? J'espère que rien de tragique n'arrivera à votre amie, mais rester ici dans l'attente de son hypothétique retour n'est pas envisageable. Le Dévoreur semble tenir à réunir les hommes et femmes de bonne volonté... Et je sais que vous en êtes... Par ailleurs, s'il y a une explication au départ précipité de mademoiselle Von Carter, c'est certainement lui le plus à même de nous la fournir. Allons chercher vos affaires et mon chauffeur nous conduira à l'aéroport... Sur la route je vous expliquerai ce qu'est un avion, ajouta-t-il se rappelant soudain la terreur qui pourrait saisir l'Athénien face à l'oiseau de fer.
- HRP:
Je clos ce rp que j'ai lu et partagé avec beaucoup de plaisir. Je laisse donc le soin à Démétrios de narrer sa version de la suite dans le rp
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] (voyage jusqu'à l'aéroport puis dans l'avion peuvent être un complément avant l'arrivée chez le Dev et la nuit réparatrice qui suivra pour chacun... Quand il sera l'heure pour Démétrios de rejoindre le bureau de Stanzas, Elymara viendra le chercher... ou Max ^^ au choix !) Bonne suite de jeu à toi !